ET PENDANT CE TEMPS LÀ – Le Programme environnement de l’ONU a dévoilé mardi 27 novembre son nouveau rapport sur l'action climatique, à quelques jours de la COP24. Les résultats sont plutôt alarmants : si des progrès ont été faits, les Etats s’éloignent clairement des objectifs de l'accord de Paris. Ils devraient multiplier par trois leurs efforts pour rester en deçà d'une hausse de 2°C.
"Force est de constater que nous avons fait trop peu" contre le changement climatique, a reconnu le chef de l'Etat ce mardi, avant de présenter ses mesures pour la transition écologique. Un euphémisme, si on se fie au Programme environnement de l'ONU (PNUE). Leur nouveau rapport annuel dévoilé ce 27 novembre, leur 9e sur l'action climatique, est des plus sévères. Et pour cause.
Les actions menées dans le monde ne permettent pas actuellement de limiter le réchauffement à +2°C, par rapport à l'ère pré-industrielle. Un objectif que s'étaient pourtant fixés les signataires de l'Accord de Paris et une limite à ne surtout pas dépasser pour le GIEC - le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat - au risque de changements irréversibles de la planète et de voir l'humanité s'éteindre.
Pour y arriver, les Etats devront tripler d'ici 2030 le niveau global de leur engagement par rapport aux promesses faites en 2015 à la conférence climat de Paris (COP21), souligne le PNUE, et même le multiplier par 5 pour ne pas dépasser +1,5°C, stade déjà annonciateur de dérèglements. "C'est la nouvelle la plus alarmante : l'écart (entre le niveau actuel des émissions et le niveau nécessaire) est plus grand que jamais", a confié à l'AFP Philip Drost, qui a coordonné le rapport.
🚨 Un énorme écart persiste entre ce qu’il faut faire et ce que nous faisons réellement pour empêcher le changement climatique d’atteindre des niveaux dangereux. 🚨 Consultez notre infographie interactive : https://t.co/FN5pHdrtEv #EGR2018 pic.twitter.com/IvVR8TRNjU — ONU Environnement (@ONUEnvironmt) 27 novembre 2018
Des efforts ont été certes faits : boom des énergies renouvelables, meilleure efficacité énergétique, actions publiques dans les transports ou dynamisme de l'économie verte dans le privé. Les émissions de gaz à effet de serre se sont même stabilisées pendant trois ans.... mais ils sont repartis à la hausse en 2017. Les émissions ont même atteint un niveau historique l'année dernière à 53,5 gigatonnes (Gt) équivalent CO2, soit 0,7 Gt de plus qu'en 2016. Et "rien ne dit qu'elles aient atteint un pic - ce point où elles basculent, de la hausse à la baisse", poursuit le coordinateur.
2018 devrait ainsi connaître la même tendance, selon l'Agence internationale de l'énergie. Elle prévoit une hausse des émissions dans le secteur de l'énergie, qui représente les 3/4 du total. Pourtant, pour rester à 2°C, il faudrait émettre au maximum 40 Gt CO2 en 2030, et 24 Gt pour 1,5°. On en est loin.
Le scénario du PNUE est plus sombre que l'an dernier aussi parce que les dernières recherches montrent qu'il ne faudra pas compter sur un déploiement vaste et rapide de technologies d'absorption du CO2. Lutter contre le dérèglement climatique aujourd'hui "c'est comme courir après un bus", explique Andrew Steer, président du think tank WRI. "Nous allons de plus en plus vite, nous battons des records, mais le bus accélère, et la distance se creuse".
Selon le nouveau rapport d' @ONUEnvironmt , il est estimé que la suppression de l’ensemble des subventions aux combustibles fossiles entraînerait à elle seule une réduction des émissions mondiales de carbone d’environ 10% d’ici 2030. 📉 #EGR2018 ➡️ https://t.co/alC8uIp69T pic.twitter.com/b8VitwKL14 — ONU Environnement (@ONUEnvironmt) 27 novembre 2018
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Alors que faire ? Le PNUE insiste sur l'amélioration de l'impulsion au niveau national et le rôle à jouer par les gouvernements, par exemple via "une politique fiscale soigneusement conçue [...] pour subventionner des solutions à faibles émissions et taxer les combustibles fossiles". La suppression de l’ensemble des subventions aux combustibles fossiles entraînerait par exemple une réduction des émissions mondiales de carbone d’environ 10% d’ici 2030, souligne le rapport. Une préconisation assez ironique au vu de la situation actuelle en France.
À en croire les trajectoires actuelles, de nombreux pays du G20 ne devraient d'ailleurs pas remplir leurs engagements pris à Paris, à l'image de l'UE, des États-Unis, de l'Australie, ou encore du Canada. "Les gouvernements doivent vraiment reprendre leurs contributions, et relever leurs ambitions", alerte M. Drost, du PNUE. "Il y a tant de chemin à parcourir, et nous devons agir rapidement. Pas dans des décennies, maintenant".