ÉCOLOGIE - Pour se fournir en cuir, de nombreuses marques entretiendraient des liens avec des entreprises impliquées dans la déforestation en Amazonie, indique une étude publiée lundi par l'ONG environnementale Stand.earth.
Entre sa consommation d'eau astronomique, ses émissions de carbone et l'utilisation massive de produits toxiques pour l'environnement, la mode ne fait pas figure de bon élève en matière d'écologie. Elle fait même partie des industries les plus polluantes au monde. Selon une étude publiée lundi par l’organisation environnementale Stand.earth, certaines marques aggraveraient encore leur empreinte environnementale en jouant un rôle important dans la déforestation de l'Amazonie.
Ainsi, selon des chercheurs qui s'appuient sur des centaines de milliers des données douanières, Prada, H&M, Zara, Adidas, Nike, New Balance, Asics, Ralth Lauren, UGG, Fendi et le groupe de luxe français LVMH, entre autres, auraient des liens avec des entreprises impliquées dans cet écocide afin de se fournir en cuir. Plus de la moitié d'entre elles entretiennent notamment de multiples liens d'approvisionnement avec le plus grand exportateur de cuir brésilien, JBS, connu pour son impact dans la déforestation amazonienne. "On savait qu’on trouverait quelques cas dans l’industrie de la mode en faisant cet exercice, mais on n’avait pas entrevu qu’autant de marques seraient concernées", note auprès du journal québecois La Presse Greg Higgs, l’un des responsables de l’étude.
Selon l'International Council of Tanners (ICT), près de 65% du cuir utilisé mondialement serait d'origine bovine. Or, la demande s'accroît d'année en année. Des projections, relayées par le Guardian, montrent que pour continuer à fournir aux consommateurs des portefeuilles, des sacs à main et des chaussures, l'industrie de la mode doit abattre 430 millions de bovins par an d'ici à 2025, contre 290 millions en 2016. Une grande partie de ces animaux est élevée au Brésil où les éleveurs, afin de pouvoir faire paître leurs bêtes, abattent progressivement la forêt.
Pour pouvoir faire vivre cette industrie, tout comme celle du soja ou de l'huile de palme, la déforestation en Amazonie bat record sur record. En un an, elle a encore augmenté de 22%, dépassant les 13.000 km2 et un inégalé depuis 15 ans.
Des politiques environnementales de façade ?
"Un tiers des entreprises interrogées a mis en œuvre une sorte de politique environnementale, et on aurait pu s'attendre à ce que cela ait un effet sur la déforestation", fait remarquer le chercheur Greg Higgs au Guardian. "Le taux de déforestation augmente, donc leurs mesures n'ont pas d'effet matériel."
Sur les 84 entreprises analysées par le rapport, 23 avaient même des politiques explicites sur la déforestation, indique Stand.earth. Pour les chercheurs, ces entreprises violent "probablement" leurs propres politiques, LVMH s'étant par exemple pourtant engagée au début de l'année à protéger l'Amazonie avec l'Unesco.
Des engagements attendus au niveau européen
En novembre, la Commission européenne a présenté une nouvelle réglementation pour interdire dans l'Union européenne l'importation de soja, bœuf et produits tirés du bœuf, huile de palme, bois, cacao, café, ainsi que certains produits dérivés (cuir, ameublement...), quand ils contribuent à la déforestation. "Ce règlement est très ambitieux, nous le porterons comme une priorité de la présidence française de l'UE" qui commencera en janvier, a indiqué à l'AFP la secrétaire d'Etat Bérangère Abba.
Les entreprises importatrices seraient tenues de recueillir les données précises du lieu de production, afin de s'assurer que les matières premières commercialisées en Europe ne sont pas issues de terres déboisées après décembre 2020, et n'enfreignent pas les règles du pays producteur. Selon WWF, les importations de l'UE sont à l'origine d'environ 16% de la déforestation associée au commerce international.
La France, qui prendra la présidence de l'UE dès le mois de janvier, entend faire de la déforestation importée une priorité. En 2018, elle s'est déjà engagée à mettre fin d'ici à 2030 à la déforestation liée à l'importation de produits y contribuant dans les filières cacao, hévéa, soja, huile de palme, bois et ses produits dérivés, bœuf et produits tirés du bœuf.
Lors de la COP26, qui s'est tenue début novembre, plus de 100 pays se sont engagés pour enrayer la déforestation d'ici à 2030, dont le Brésil et la Russie, pays pointés du doigt pour l'accélération de la déforestation sur leurs territoires. S'il s'agit d'un signal positif, pour Greenpeace, cela donne néanmoins le feu vert à "une décennie supplémentaire de déforestation".
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