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Le Grand-Bornand a-t-il utilisé 24.000 m³ de neige "100% artificielle" pour accueillir la coupe du monde de biathlon ?

Publié le 2 décembre 2022 à 14h54, mis à jour le 2 décembre 2022 à 15h54

Source : JT 13h Semaine

Le Grand-Bornand doit accueillir la Coupe du monde de Biathlon du 15 au 18 décembre prochain.
Mais la station haut-savoyarde manque cruellement de neige en ce début de mois de décembre.
Plusieurs associations écologistes dénoncent l'utilisation de neige "100% artificielle" pour préparer la piste qu'utiliseront les biathlètes.

"100% neige artificielle, 100% transport de neige en camion et 100% carbone". Sur Twitter, la fondatrice de Résilience montagne, une association qui défend "une montagne durable", dénonce l'enneigement de la piste de biathlon du Grand-Bornand qui doit accueillir, du 15 au 18 décembre, une étape de la coupe du monde. Problème : la station haut-savoyarde n'a reçu aucune chute de neige significative et les prévisions météo n'annoncent aucune amélioration. Si le domaine a bien acheminé plusieurs milliers de mètres cubes de neige pour pallier ce manque, la moitié est en réalité issue du "snowfarming", une technique de recyclage ancestrale. Explications.

Une pratique vertueuse ?

Pour pouvoir accueillir la coupe du monde et répondre au cahier des charges imposé par l'International Biathlon Union (IBU), la station du Grand-Bornand a besoin de près de 24.000 mètres cubes. Et face au manque de précipitations, la station n'a pas d'autre choix que d'enneiger artificiellement la piste en attendant des chutes conséquentes. Pour ce faire, elle a recours à de la neige issue du "snowfarming". 

Sur les 24.000 mètres cubes nécessaires, environ 12.000 proviennent de cette neige emmagasinée à proximité, à Chinaillon, issue du snowfarming. La technique, largement utilisée dans les pays nordiques, consiste à stocker la neige de la saison précédente pour l'utiliser dès le début de l'hiver suivant. Accumulée à proximité des pistes puis recouverte d'une importante couche de sciure de bois pour être préservée, elle est protégée des chaleurs estivales et peut ensuite être réutilisée en sous-couche. Une neige qui se conserve bien puisque les pertes sont estimées à seulement 20%.

Le procédé est présenté comme écologique pour faire face au manque de neige de plus en plus habituel dans l'Hexagone. "C'est une technique ancestrale qu'on ne fait que raviver. Sur un début d'hiver incertain, on s'assure une quantité de neige certaine. Et ça n'a pas de prix", soulignait en 2019 à l'AFP Jean Bourcet, directeur des remontées mécaniques du Grand-Bornand. "C'est une solution d'appoint intéressante quand la configuration du domaine skiable s'y prête. Elle a vocation à se multiplier, car il s'agit d'une pratique vertueuse", estimait de son côté Laurent Reynaud, délégué général de Domaines skiables de France. La technique a d'ailleurs tendance à se répandre : la station de Bessans (Savoie) y a recours pour ouvrir dès début décembre son domaine nordique. C'est également le cas pour les Confins-La Clusaz (Haute-Savoie), les Saisies (Savoie) ou les Rousses (Jura).

Du côté de Météo-France, on estime que le snowfarming offre plusieurs caractéristiques éco-compatibles : des dépenses en énergie "peu élevées" puisqu'elle n'utilise pas d'électricité, et un impact "très faible" sur le cycle de l'eau, compte tenu des volumes stockés. Toutefois, une partie de cet or blanc stocké n'est pas de la neige naturelle au Grand-Bornand, mais de la neige de culture produite via des canons à neige la saison précédente, puisque celle-ci, plus dense, fond moins facilement. Un mode de production qui est, lui, particulièrement coûteux en eau.

Et c'est ce que dénoncent les associations de défense de l'environnement comme Mountain Wilderness ou Résilience Montagne, regroupées au sein d'un collectif, qui estiment que ce procédé est trop coûteux pour l'environnement. Elles pointent également l'impact du transport en camion de ces milliers de mètres cube de neige et dénoncent, dans un communiqué, un "cirque motorisé" pour la Coupe du monde de biathlon et des "pratiques graves" à l'heure de "l'engagement de tous pour des transitions énergétique et écologique".

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Annick BERGER

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