Le zoo de Pont-Scorff transformé en centre pour animaux sauvages : les dessous d'un projet "inédit"

Publié le 30 décembre 2019 à 18h57
Le zoo de Pont-Scorff transformé en centre pour animaux sauvages : les dessous d'un projet "inédit"
Source : DAMIEN MEYER / AFP

INTERVIEW - Grâce à une importante médiatisation, le rachat du zoo de Pont-Scorff (Morbihan) par le centre Rewild a pu se faire en cinq jours, un temps record. Le site doit maintenant préparer ses 560 pensionnaires à recouvrer leur état sauvage, mais aussi accueillir d'autres animaux issus du trafic. Deux des trois co-présidentes de Rewild racontent ce projet fou à LCI.

Réunir la somme de 600.000 euros pour racheter le zoo de Pont-Scorff, dans le Morbihan, afin de le transformer en un centre de réhabilitation et d’accueil destiné aux animaux sauvages victimes du trafic, le pari était audacieux. Et pourtant, les fondateurs du centre Rewild, une coalition de sept associations, l’ont fait la semaine dernière en un temps record de cinq jours. Pour LCI, Lorane Mouzon et Lamya Essemlali, deux des trois co-présidentes de Rewild, reviennent sur ce vaste projet. 

Quel était votre objectif en rachetant le zoo de Pont-Scorff ?

Rewild : L’objectif principal de Rewild est la lutte contre le trafic d’animaux. On a eu l’opportunité d’acheter ce zoo pour créer un espace dédié aux victimes de ce trafic. Le but est donc de permettre aux animaux qui s'y trouvent actuellement d’être les premiers à bénéficier d’un retour dans leur pays d’origine, soit en sanctuaire, soit dans la nature pour ceux qui sont capables de se débrouiller par eux-mêmes. Racheter un zoo pour en faire un centre de réhabilitation d’animaux issus du trafic, c’est une première. Les zoos ne se vendent pas, il n’y a pas d’annonce "zoo à vendre". Ça se fait dans un petit microcosme et bien souvent, cela reste dans la famille. Que ce soit fait par une coalition d’associations, c’est encore plus inédit.

Lamya Essemlali, Lorane Mouzon et  Perrine Crosmary, les trois présidentes de Rewild.
Lamya Essemlali, Lorane Mouzon et Perrine Crosmary, les trois présidentes de Rewild. - Damien MEYER / AFP

La collecte de dons achevée, quel avenir pour le zoo de Pont Scorff ?

Rewild : On s’était donné cinq mois avec l’ancien propriétaire pour réunir les 600.000 euros nécessaires, on l’a fait en cinq jours. Tout se bouscule donc un peu plus vite que prévu, il faut à la fois gérer le projet et la partie administrative du zoo, puisqu’on en est les gestionnaires. Pour le moment, on commence par parer au plus urgent. On est en plein audit de tous les animaux du zoo, pour s’assurer de la conformité des marquages, de leur état de santé, mais aussi des installations qui sont à remettre à niveau. En parallèle, une partie de l’équipe travaille sur la prise de contact avec des partenaires pour accompagner les retours d’animaux dans leur pays d’origine. Dans dix jours, on va accueillir un couple d’oiseaux saisis (lors d'un démantèlement de trafic, NDLR). Ils seront les premiers à faire un retour à la nature puisqu’ils ont déjà été évalués.

La prochaine étape sera d’accueillir d’autres animaux victimes du trafic. Or, on a beaucoup de mal à estimer le nombre que cela représente : tant qu’il n’y avait pas de structure capable d’assurer la réhabilitation des animaux, il y avait très peu de contrôles réalisés. Ce que l’on sait, c'est que cela risque de représenter un nombre d’animaux assez conséquent. On a déjà reçu des demandes de placements. Pour pouvoir avancer dans les premiers mois, on va encore être tributaires des dons puisqu’on a le projet de changer l’économie du site, de le fermer au public, de mettre en place une restauration végétarienne, des conférences sur la conservation… C’est pour cela qu’on laisse la cagnotte ouverte.

Quel message souhaitez-vous faire passer avec un tel projet ?

Rewild : L’essence même de Rewild, c’est de montrer aux gens qu’un autre rapport au monde sauvage et au monde animal est possible. Qu’il est possible d’avoir un lien avec les animaux sauvages sans qu’ils soient enfermés sous cloche, à notre disposition. On voit déjà que les consciences s’éveillent. Dans l’univers du cirque par exemple, il y a une pression de l’opinion publique, à tel point que des communes interdisent les animaux dans les cirques. 

On veut que les gens prennent conscience que les zoos ne font pas de la conservation à proprement parler, ils font surtout du commerce. C’est en réalité une industrie de loisirs très lucrative. Prenons le directeur du zoo de Beauval qui est le président de l’Association Française des Parcs Zoologiques. L’association des amis de Beauval, pourtant nettement bénéficiaire, n’a pas donné un euro ces deux dernières années à la conservation. Son directeur a préféré investir dans de nouvelles infrastructures faisant venir plus de visiteurs. C’est un choix. 


Caroline QUEVRAIN

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