Le Canada vit les pires feux de forêt de son histoire, avec une superficie équivalente à la Grèce déjà détruite.Une étude scientifique pointe le rôle déterminant du changement climatique dans leur ampleur.Il a rendu sept fois plus probables les conditions météo extrêmes qui ont favorisé ces incendies, et augmenté de 50% leur intensité.
Le réchauffement climatique a rendu au moins sept fois plus probables les conditions météo extrêmes derrière les feux qui font rage au Canada cette année, selon une étude publiée ce mardi 22 août par un réseau de scientifiques spécialisé dans ce type d'analyses. Les chercheurs du World Weather Attribution (WWA) ont en effet déterminé que le changement climatique, provoqué par l'activité humaine, a augmenté la probabilité de températures élevées et de faibles taux d'humidité, ce qui a joué un rôle majeur dans la propagation du brasier.
Tant que nous ne cesserons pas de brûler des combustibles fossiles, le nombre d'incendies de forêt continuera d'augmenter
Friederike Otto, climatologue
"L'augmentation des températures crée des conditions semblables à celles d'une poudrière dans les forêts du Canada et du monde entier", a déclaré dans un communiqué l'une des chercheuses ayant participé à ces travaux, la climatologue britannique Friederike Otto. "Tant que nous ne cesserons pas de brûler des combustibles fossiles, le nombre d'incendies de forêt continuera d'augmenter", a conclu la scientifique.
Pour leur étude, 16 chercheurs du WWA se sont concentrés sur des feux survenus entre mai et juillet au Québec, afin d'étudier une zone homogène en matière de climat et de végétation. Quantifier l'impact du changement climatique directement sur le nombre de feux ou leur superficie est très difficile, ont-ils expliqué, notamment à cause du rôle d'autres facteurs, comme la cause directe d'un départ de feu ou encore les stratégies employées pour protéger les forêts. C'est pourquoi ils se sont concentrés sur l'effet du changement climatique sur les conditions météo propices aux incendies.
Indice "forêt-météo"
Les chercheurs ont utilisé un indice appelé "forêt-météo", qui combine la température, la vitesse du vent, l'humidité et les précipitations, afin d'estimer le risque d'incendie. Ils ont isolé la période de sept jours durant laquelle les conditions météo étaient les plus favorables aux feux, entre mai et juillet. Selon leur analyse, ces conditions extrêmes ont été rendues deux fois plus susceptibles de se produire à cause du changement climatique, qui a aussi rendu ces conditions 20% plus intenses.
Dans un deuxième temps, ils ont voulu évaluer la sévérité des conditions météo sur toute la saison écoulée, en s'appuyant sur les valeurs quotidiennes dérivées du même indice, de janvier à juillet. La probabilité que de telles conditions favorables aux incendies surviennent sur cette durée a été multipliée par sept par le réchauffement des températures, ont-ils déterminé. Elles ont en outre été rendues 50% plus intenses.
"Le changement climatique augmente considérablement l'inflammabilité du combustible disponible pour les incendies de forêt, ce qui signifie qu'une simple étincelle (...) peut rapidement se transformer en un véritable brasier", a expliqué Yan Boulanger, chercheur pour le ministère canadien des Ressources naturelles, qui a participé à ces travaux.
La période de mai à juin a été la plus chaude enregistrée au Canada depuis le début des relevés en 1940. Les fortes températures ont entraîné la fonte rapide de la neige au mois de mai, permettant aux feux de se développer de façon précoce. Le pays connaît cette année la saison des feux la plus dévastatrice de son histoire. Plus de 1000 incendies sont actifs d'est en ouest, et plus de 15 millions d'hectares ont déjà brûlé, soit une superficie supérieure à celle de la Grèce. Cela représente déjà plus du double du précédent record enregistré sur une saison des feux complète - alors que celle-ci est encore loin d'être finie cette année. Environ 200.000 habitants ont dû être évacués, et quatre personnes sont décédées.