ÉDITO - Quelles leçons tirer de la course aux vaccins contre le Covid-19 en matière de lutte contre le changement climatique ? Fabrice Bonnifet, président du C3D, le Collège des directeurs du développement durable, livre son éclairage.
Personne ne conteste que l’émulation provoquée par la compétition engendre des solutions originales qui n’auraient pas pu survenir aussi rapidement en d’autres circonstances. Dernier exemple en date : la course aux vaccins face à la pandémie de Covid-19. Elle a été le fantastique théâtre d’une féroce compétition entre les acteurs du "Big Pharma" et leurs éco-systèmes, pour être les premiers à sortir le "vaccin qui tue", ou plutôt qui sauve on l’espère, dans le contexte sanitaire singulier que nous subissons.
Les partisans de la libre concurrence pure et parfaite ne tarderont pas à nous dire qu'il s'agit d'une preuve de plus que l’économie de marché et la technologie nous sauvent. Car grâce à la stratégie vaccinale, la vie va bientôt pouvoir reprendre son cours d’anormalité habituelle, avec les 48.000 morts annuels associés à la pollution de l’air, l’augmentation infernale des émissions de CO2 et la fréquence des catastrophes climatiques corrélée, ou encore l’érosion dramatique de la biodiversité… Bref, des tragédies déjà bien intégrées, qui accompagnent nos vies depuis des décennies. Le drame de l’humanité, c’est que nous finissons par nous habituer à nos conditions de vie dégradées qui, progressivement et insidieusement, deviennent le nouveau point de référence. Au rythme de la dégradation du climat, à quoi va bien pouvoir servir la compétitivité sur une planète étuve ? La "compétition" serait-elle la seule source de progrès dont l’humain est capable ?
Certes, comme dans la nature, les forts vivent et les faibles meurent. Mais dans la nature précisément, le cynisme n’existe pas. L’entraide et la solidarité entre et inter espèces dominent plus que la brutalité de la caricaturale loi de la jungle. L’économiste Gus Speth nous éclaire sur la réalité des mesures à prendre face aux défis écologiques qui nous font face : "Avant, je croyais que les plus grands défis auxquels devait répondre la Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE) étaient les inégalités, la perte de la biodiversité, l’effondrement des écosystèmes et le changement climatique. Je croyais qu’on pouvait résoudre ces problèmes avec les progrès scientifiques. Mais, j’avais tort. Les plus grands défis de la RSE sont l’égoïsme, la cupidité et l’apathie… et pour y faire face, il nous faudra une transformation spirituelle et culturelle."
Pour opérer cette transformation la compétition ne sera d’aucun secours, nous devons surtout apprendre à collaborer beaucoup mieux et plus intensément. La complexité des défis est telle que seule une approche transversale et transdisciplinaire permettra de les résoudre. Mais concrètement quels sont les verrous à faire sauter pour y parvenir ?
Nous avons désormais davantage besoin d’un état d’esprit solidaire que de génies solitaires
Fabrice Bonnifet
Premièrement, nous devons cesser cette mise en concurrence systématique, en tout domaine, qui génèrent plus de ressentiment que de résultats. Tous les secteurs soumis à l’ultra concurrence permanente finissent par générer un océan rouge du sang des parties prenantes, dont la variable d’ajustement est toujours la destruction du capital social et environnemental. La compétition, ancrée dès le système scolaire, conduit à un individualisme exacerbé qui conduit à faire émerger des individus certes brillants, mais souvent dépourvus des softskills élémentaires les empêchant de coopérer efficacement avec les autres. Nous avons désormais davantage besoin d’un état d’esprit solidaire que de génies solitaires.
Deuxièmement, nous devons réinventer nos méthodes de travail en adoptant des approches véritablement collaboratives, coordonnées par des leaders qui reconnaissent avant tout l’équipe et les comportements bienveillants. Pour cela, il est requis de partager un objectif commun porteur de sens social et environnemental, un "why" responsable et ambitieux. Ceux qui possèdent un pourquoi humaniste qui les font vivre peuvent supporter tous les comment et non pas besoin d’être sans cesse stimulés par la concurrence !
Enfin, nous devons faciliter des interactions fortes et en confiance entre acteurs de toutes origines et tous statuts qui se reconnaissent principalement pour leurs compétences. L’efficacité de ces interactions dépend de leur caractère volontaire et nous soumises à un "cascading" hiérarchique stérile qui freine, s’il ne les tue pas, les meilleures volontés. La collaboration est une source de symbiose, l’excès de compétition ne conduit qu’à la névrose.
Revenons au vaccin. Les mutations actuelles posent des questions nouvelles et forcent les laboratoires, et les nations, à envisager d’autres formes de coopération. Alors que les variants se propagent sur tous les continents, ne serait-il pas temps pour les laboratoires d’accepter de travailler à livre ouvert, et de faire en sorte que les capacités de production des uns soient mis au service des autres dans l’intérêt de l’humanité ? Non ni la compétition, ni la concurrence ne permettront de résoudre l’équation climatique et ses enjeux sociaux, nous devons apprendre à mieux collaborer pour le bien commun et à adopter des postures plus modestes face au vivant. C’est, pour le vaccin comme pour le climat, une question de vie ou de mort.
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Bienvenue dans le podcast "Impact positif", dédié à celles et ceux qui veulent changer la société et le monde. Devant l'urgence climatique, la crise démocratique, une société aux inégalités croissantes, certains ont décidé de ne pas rester les bras croisés, ils ont un coup d'avance, l'audace de croire qu'ils peuvent apporter leur pierre à l'édifice. Ils sont ce que l'on appelle des Changemakers.
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