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Le nucléaire est-il vraiment plus cher que les énergies renouvelables ?

Publié le 15 novembre 2021 à 13h57, mis à jour le 15 novembre 2021 à 16h34
JT Perso

Source : JT 20h Semaine

COÛTS - Les écologistes sont vent debout contre la décision d’Emmanuel Macron de construire de nouveaux EPR, affirmant régulièrement que cette énergie est beaucoup plus chère que le renouvelable. Nous avons démêlé le vrai du faux à partir des dernières publications existantes.

Mise à jour du 15/11 : l'article a été complété par un extrait du rapport de RTE, qui préconise un mix énergétique comme le scénario le plus compétitif en 2050, et par des précisions quant à sa méthode de calcul. Une première version intégrait seulement la comparaison du coût individuel des énergies.

Face aux besoins énergétiques et à la flambée des prix qui survient en pleine campagne présidentielle, le sujet est éminemment politique. Gaz, nucléaire ou éolien, chaque responsable politique a la solution pour une énergie répondant à la demande et dans une logique de transition écologique. Prônant une société strictement fondée sur des énergies renouvelables, les écologistes avancent régulièrement l’argument financier. 

Cela a été de nouveau le cas ce lundi 15 novembre avec Yannick Jadot et Sandrine Rousseau, invités respectivement de France Inter et de LCI. Pour le candidat EELV, "le nucléaire coûte en réalité bien plus cher" que le renouvelable tandis que pour son alliée dans la campagne, "construire des nouvelles centrales est plus cher qu’investir dans le renouvelable". Alors, l’argument est-il tenable ? Peut-on mentionner le prix de l’énergie nucléaire pour défendre le renouvelable ?

L'Interview Politique du 15 novembre 2021 : Sandrine RousseauSource : TF1 Info

D’abord, de quoi parle-t-on lorsque l’on évoque le nucléaire et les énergies renouvelables ? D’un côté, on parle des dernières générations de centrales et non pas des plus anciennes dont le coût est "déjà amorti", selon Anne Bringaut, coordinatrice du Réseau Action Climat (RAC). De l’autre, on vise l’ensemble de l’énergie renouvelable existante : l’énergie éolienne, hydraulique, solaire, ou encore tirée de la biomasse ou de la géothermie. 

Une étude du Réseau de Transport d’Électricité (RTE) a été publiée le 25 octobre sur ce sujet précis. Très attendue, elle détaille plusieurs scénarios pour la future production énergétique de la France, à la lumière de deux impératifs : la garantie d’un approvisionnement en électricité et la neutralité carbone en 2050. Plusieurs critères sont alors pris en compte, comme l’impact environnemental et le coût final. Et pour comparer le coût d’une énergie, il s’agit selon RTE de "comparer le coût complet des différentes options (coût système) et non le coût individuel de chaque technologie". 

Des coûts en baisse pour le renouvelable ?

À partir de cette approche, RTE considère que les scénarios intégrant la construction de nouvelles centrales sont un peu moins couteux que celui fondé sur du 100% énergies renouvelables même si les "énergies renouvelables produisent de l’énergie à un coût complet rapporté à leur production qui est plus faible que celui des nouveaux réacteurs nucléaires". RTE explique cela par "l’intégration de volumes importants d’éoliennes ou de panneaux solaires engendre de très importants besoins en flexibilités (stockage, pilotage de la demande et nouvelles centrales d’appoint) pour pallier leur variabilité, ainsi que des renforcements des réseaux (raccordement, transport et distribution)". En d'autres termes, la production d'énergies renouvelables est moins chère en valeur absolue mais comporte des variables (comme celle de ne pas fonctionner 24h/24) qui la rendent moins "compétitive" si elle n'est pas associée à des EPR, explique RTE. 

Philippe Quirion, directeur de recherche en économie de l’énergie au CNRS et de l'association négaWatt, se montre plus sceptique. "Ça dépend du coût du futur nucléaire", avance-t-il. "L’industrie nucléaire nous dit que les prix vont baisser. C'est probable, mais de combien ? Si l’on prend les générations précédentes de centrales, on a effectivement eu une baisse des coûts au sein d'une génération donnée de centrales, mais une hausse des coûts d'une génération de centrales à l'autre. Cette baisse était modérée, de l’ordre de 20%. Si la baisse est de cet ordre-là, cela coutera moins cher d’avoir un système 100% renouvelable. Mais si le coût du nucléaire se divise par deux, comme le supposent les plus optimistes, alors cela peut être moins cher d’avoir une part de nouvelles centrales dans le futur mix énergétique". Une dernière hypothèse qui ne s'est encore jamais vérifiée sur les précédentes générations de centrales nucléaires, selon le chercheur. 

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Une autre affirmation est présente dans l’argumentaire de Yannick Jadot : le fait que "les coûts du nucléaire ne font qu’augmenter quand ceux des énergies renouvelables ne font que baisser". Pour ce faire, le candidat écologiste se fonde sur les conclusions du récent rapport de RTE, du même acabit : "Alors que le nucléaire historique s’est révélé très compétitif et le demeure aujourd’hui, les réacteurs de troisième génération ont vu leur coût s’accroître tandis que celui des énergies renouvelables a diminué". 

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Caroline QUEVRAIN

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