SONDAGE EXCLUSIF TF1 - Éoliennes, pêche, protection du littoral... les inquiétudes des Français pour la mer

Publié le 20 novembre 2023 à 19h06, mis à jour le 21 novembre 2023 à 9h44

Source : JT 20h Semaine

Un vaste débat public sur la mer et ses usages s'ouvre ce lundi 20 novembre et va durer jusqu'au 26 avril.
Tous les Français sont appelés à y participer, sur les littoraux ou en ligne, pour dessiner ensemble l'avenir des côtes de l'Hexagone.
À cette occasion, TF1info révèle les conclusions d'un sondage Ipsos pour la CNDP sur les Français et la mer : celui-ci montre notamment leur souhait de réglementer les usages de la mer.

"La mer en débat". L'intitulé est sobre, mais la démarche, elle, est inédite : la Commission nationale du débat public (CNDP) ouvre ce 20 novembre un vaste débat sur l'avenir des façades littorales de l'Hexagone. Tous les Français sont invités à participer à ces échanges, en ligne ou lors de réunions publiques, et ce, jusqu'au 26 avril. "Aujourd'hui, plus que jamais, nous devons avoir ce débat sur la mer", souligne Ilaria Casillo, vice-présidente de la CNDP. Les services de l'État préparent en effet les documents stratégiques qui vont dessiner l'avenir du littoral français à l'horizon 2030.

Les sujets sont nombreux : pêche, activité portuaire, tourisme, parcs éoliens en mer, conséquences du changement climatique sur les littoraux. "La planification doit traiter de trois éléments fondamentaux, explique Ilaria Casillo. D'abord, comment on partage la mer, entre la pêche, la défense, les transports, les activités de tourisme ; puis comment on protège la mer (changement climatique, retrait du trait de côte, etc) et enfin, la question de l'énergie, avec le développement des parcs éoliens en mer."

44% des Français aimeraient vivre au bord de la mer

À cette occasion, la CNDP a réalisé une vaste enquête, qualitative et quantitative, avec l'institut Ipsos, dont TF1 Info dévoile les résultats. "Cette enquête montre l'importance de la mer pour les Français", commente Ilaria Casillo. 44% des sondés aimeraient vivre au bord de la mer s'ils avaient le choix ; un chiffre qui passe à 52% chez les femmes âgées de 35 ans et plus. "C'est un espace thérapeutique et démocratique qui fait du bien collectivement. Pour les Français, la mer fonctionne comme une chambre de décompression collective."

Ce sondage montre toutefois l'inquiétude des Français. "Ils estiment que nos côtes sont bien préservées, mais ils sont inquiets pour l'avenir", résume la vice-présidente de la CNDP. Ainsi, 67% d'entre eux jugent que les côtes sont bien préservées, mais 59% des sondés se disent "pessimistes" sur l'avenir du littoral français ; 63% parmi les habitants du littoral.

Sans une mer en bonne santé, aucun usage n'est possible
Ilaria Casillo, vice-présidente de la CNDP

Parmi leurs craintes, l'érosion du trait de côte apparaît comme la préoccupation majeure : 39% des sondés le perçoivent comme la principale menace (ils sont 51% chez les Français de 60 ans et plus). Autre préoccupation, à égalité (39%), la pollution provenant des activités terrestres, puis le changement climatique (37%), le tourisme de masse (35%), la montée des eaux (30%), le développement de l'urbanisme (23%) et la surpêche (17%).

Pour répondre à leurs inquiétudes, deux mots-clés ressortent de l'étude : régulation et cohabitation. C'est l'État qui est perçu comme le principal acteur pour réguler les usages et faire cohabiter les activités. Selon Ilaria Casillo, pour les personnes consultées, "sans une mer en bonne santé, aucun usage n'est possible." Ainsi, s'ils devaient arbitrer, une majorité de Français préféreraient faire primer la préservation des littoraux sur les aspects économiques. Ainsi, 76% des sondés souhaitent "avant tout protéger les milieux marins, et donc renoncer à exploiter les espaces et les ressources de la mer, quitte à renoncer aux bénéfices économiques que cela pourrait avoir."

Parmi les inquiétudes, 40% des personnes interrogées comptent sur l'État pour réglementer l'industrie et ses rejets ; 38% estiment qu'il faut pousser les touristes à adopter des comportements plus durables ; 37% attendent davantage de réglementation sur l'urbanisme ; 33% demandent que soient évités les rejets agricoles sur le littoral et 32% plaident en faveur de davantage de zones protégées sans activités humaines.

Ainsi, 80% des Français estiment qu'il faut limiter l'accès aux zones littorales pour les préserver ; et 80% d'entre eux jugent que le développement touristique des dernières années a "un impact environnemental négatif sur ces territoires".

Sur les éoliennes en mer, les Français sont partagés

Sur un autre volet, le rapport des Français à la pêche est ambivalent. Ainsi, pour 90% des Français, le développement de la pêche industrielle a eu des conséquences très négatives sur la mer et 84% jugent que les méthodes de la pêche industrielle sont trop "destructrices" pour l'environnement et les écosystèmes ; mais dans le même temps, ils sont aussi 86% à juger que le maintien des activités de pêche permet de maintenir les emplois et le tourisme sur les côtes françaises. 80% des sondés estiment aussi que le secteur français de la pêche est "essentiel pour nourrir la population". 

La planification maritime passera également par le développement de parcs éolien en mer : l'État mise sur 50 parcs à l'horizon 2050. Sur ce volet, 68% des Français estiment que c'est un levier important pour permettre à la France d'atteindre ses objectifs en matière d'énergie renouvelable. Mais 70% des sondés plaident pour des parcs "concentrés en quelques endroits" plutôt qu'une multitude de petits parcs. Et ils sont 68% à juger que les pâles des éoliennes ne "posent pas un problème esthétique majeur". Ce chiffre est encore plus important chez les Français qui vont au moins une fois par mois à la mer : 74%.

Mais là aussi, les sondés sont partagés sur un élément central : 50% d'entre eux pensent que l'éolien en mer risque de réduire le tourisme littoral.

C'est tous ces sujets que le débat public devrait permettre de faire avancer, espère-t-on du côté de la CNDP. Les Français peuvent contribuer directement en ligne ou télécharger l'application sur leurs smartphones. Ils pourront aussi assister aux débats organisés sur les quatre façades littorales de l'Hexagone. "Nous avons mis les moyens, assure Ilaria Casillo. Nous avons une équipe de 40 personnes qui va sillonner la France pour faire vivre ce débat sur les territoires."

Une cartographie interactive, élaborée par tous les Français

Autre grande nouveauté de ce débat public, par rapport aux autres débats organisés jusqu'ici, thème par thème, projet par projet : la cartographie interactive. La CNDP va élaborer des cartes à partir des commentaires effectués par les internautes, qu'ils soient des acteurs économiques, potentiels touristes sur le littoral, associations ou autres. 

Cela permettra à chacun d'exprimer sa vision de la planification maritime de la France et ses priorités. Et cela tombe bien : selon l'enquête Ipsos, 94% des sondés jugent important que les Français soient associés aux enjeux liés à la mer. Pour Ilaria Casillo, il y a un "vrai enjeu d'information et de prise de conscience sur l'état écologique de la mer". À l'issue de ce vaste débat, le premier de cette ampleur, la CNDP livrera un compte-rendu détaillé de toutes les contributions ; charge à l'État d'y répondre sous trois mois. 

Méthodologie : sondage Ipsos réalisé en ligne pour la Commission nationale du débat public du 24 au 26 octobre 2023, selon la méthode des quotas, auprès d'un échantillon de 1700 personnes, représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus, ainsi qu'un sur-échantillon de 1207 personnes résidant à 40 km ou moins de la mer. 


Marianne ENAULT

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