ÉDITO - "Avec une année 2021 parmi les sept années les plus chaudes jamais enregistrées, nous sommes déjà entrés dans le temps des conséquences de notre inconséquence", estime Fabrice Bonnifet, président du C3D, le Collège des directeurs du développement durable. Il nous livre ses réflexions.
En cette période de bons vœux, souhaitons-nous de bien profiter de 2022, car il est hautement probable que 2023 sera pire et ainsi de suite ! Explications : l'humanité est arrivée en moins de 200 ans à la convergence des pics. Pic des émissions de CO2, pic d’érosion de la biodiversité, pic des dettes publiques et privées, pic démographique, pic d’extraction des ressources naturelles, pic de la production de déchets, pic des capitalisations boursières… Dans cette situation singulière qui a été rendue possible par notre addiction aux énergies fossiles, il y a deux hypothèses.
La première consiste à croire que nous pouvons encore monter plus haut dans la démesure. C’est la théorie simpliste des optimistes et des transhumanistes déconnectés des faits scientifiques, des professionnels de la promesse électorale, des illuminés californiens - mais pas seulement - du solutionnisme technologique. Pour cette catégorie des "sans limite", tout est substituable du moment que nous restons dans la même illusion du toujours plus : les voitures thermiques par les voitures électriques, les avions kérosène par les avions hydrogène, les électrons gris par les électrons verts... Selon eux, la déplétion des ressources terrestres n’est pas un problème car il y aura toujours un plan B : plus assez de lithium, on prendra du sodium, plus assez de pétrole, on prendra du bioéthanol, comme jadis cette "sans-tête" couronnée qui proposait de remplacer le pain par de la brioche.
Les limites planétaires sont présentées partout comme un fantasme d’Amishs qui ne croient pas dans le scientisme. Tout juste admettent-ils un léger problème avec le réchauffement climatique, mais qu’à cela ne tienne, il suffit de définir une politique de croissance verte, et hop on fait croire aux mal informés qu’il est possible de croître à l’infini, avec dans le même temps des émissions de CO2 qui décroissent à l’infini.
Après la 5ème vague, on ne rêve plus hélas que d’un retour à "l’anormal" dans ses excentricités et ses gaspillages, faute d’avoir su démontrer qu’il était possible de faire autrement
Fabrice Bonnifet
Et puis pourquoi serait-il interdit de croire au Père Noël après ses 3 ans ? Si cela fait du bien à leur imaginaire de vivre dans le monde enchanté d’un Black Friday permanent. Parce que dans cette catégorie Monsieur, on a foi dans l’innovation et dans la découverte de nouveaux horizons, comme jadis on allait conquérir l’Amérique, car c’est forcément mieux ailleurs, plus loin, plus haut dans l’espace... au-dessus des pics.
La seconde hypothèse émane d’une catégorie d’individus que l’on qualifiera de réalistes rabat-joie. Leur caractéristique principale est le discernement. Leur croyance est que les arbres ne grimpent pas au ciel, que si on mange trop on grossit, que si on émet plus de CO2 que ce que la planète peut en absorber le climat se réchauffe, que l’on peut jouir de tout mais avec modération et équité…. Forcément cela fait moins rêver d’extravagance. Mais le principe de réalité et la courbe de Gauss en mathématiques qui s’applique à tout stock fini ont un côté implacable un tantinet agaçant, qui impose l’adoption d’une posture d’humilité face à l’évidence d’un effondrement civilisationnel programmé, sans réaction immédiate de notre part.
En effet, tout sage montagnard sait qu'après l’atteinte d’un pic arrive forcément la descente. Et pour nous autres Terriens perdus au milieu de nulle part, le moment est venu de se préparer à défier une avalanche de défis sociaux et environnementaux, tout en slalomant parmi nos contradictions. Le film Don’t look up les met très bien en lumière de manière sarcastique, mais empreint d’une réalité glaçante. Le déni du certain se combine avec la Commedia dell’arte de l’illusion.
Après la première vague du Covid-19, on s’était mis à rêver d’un monde d’après dans lequel nous nous serions resynchronisés au vivant, en essayant de conserver le meilleur et surtout le plus utile du confort matériel du 21ème siècle. Après la 5ème vague, on ne rêve plus hélas que d’un retour à "l’anormal" dans ses excentricités et ses gaspillages, faute d’avoir su démontrer qu’il était possible de faire autrement. Parce que passer du toujours plus au toujours moins ne va se faire sans douleur, dans un monde sans vision objective de la part des décideurs des contraintes physiques à prendre en compte. Alors fatalement avec une année 2021 parmi les sept années les plus chaudes jamais enregistrées, nous sommes déjà entrés dans le temps des conséquences de notre inconséquence, et les temps à venir ne seront qu’une longue agonie.
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