Au Royaume-Uni, certains comptent miser sur la chaleur corporelle pour pallier la flambée des coûts de l'énergie.Une salle de concert écossaise utilise la chaleur perdue qui émane de ses clients pour réchauffer ou refroidir son bâtiment.Récupérée via des bouches d'aération, l'énergie est ensuite stockée en sous-sol.
Sur les terres écossaises, la musique n'est pas seulement une tradition : elle est désormais au service d'une drôle d'innovation. Dans la large salle de concert SWG3 à Glasgow, la scène se présente a priori de façon classique, avec des musiciens, des lumières et un parterre de quelque 1300 spectateurs, qui dansent, tapent des mains et filment le spectacle. Mais ce que le public ne sait pas, c'est qu'il représente au même moment une source d'énergie grâce à la chaleur corporelle qui émane de lui. Un système novateur permet d'exploiter cette énergie pour la convertir en chauffage.
"Il y a une crise du pouvoir d'achat en ce moment, alors j'imagine que ce serait une bonne solution, si on pouvait utiliser partout des gens pour produire de la chaleur", se réjouit une spectatrice dans le reportage du 20H de TF1 en tête d'article. "On va devoir faire plus la fête pour réchauffer les gens !", glisse une autre. Les artistes eux-mêmes s'en amusent. "Je vais dire à tout le monde ce soir que nous faisons de l'énergie pour la salle, je suis sûr que les gens vont bouger", lance le chanteur Callum Beattie.
45.000 euros économisés par an
La chaleur générée par le public pendant le concert est réutilisée pour chauffer d'autres pièces du bâtiment, heureusement sans aucune odeur. La chaleur humaine est absorbée par des bouches d'aération situées au plafond de la salle de spectacle. Puis le système fonctionne grâce à des pompes à chaleur : l'énergie est transportée via des tuyaux sous l'édifice, à 200 mètres de profondeur. Elle est stockée pour ensuite être redistribuée à n'importe quel moment dans les salles, en empruntant le même chemin en sens inverse. De quoi refroidir ou réchauffer les espaces.
"Si on avait recours à des radiateurs électriques, on utiliserait trois à quatre fois plus d'électricité pour le chauffage et deux fois plus pour le refroidissement", explique David Townsend, fondateur de la société Townrock Energy, spécialisée dans ce type de technologie. Si le dispositif est dix fois plus cher à installer qu'un système énergétique classique, il est écologique et se révèle en bout de course bon marché : le patron de la salle de concerts voit sa facture s'alléger de 45.000 euros par an, soit l'équivalent d'un quart de sa consommation d'énergie.
Jusqu'à 1000 watts produits en dansant
Et pour cause, un corps humain émet environ 100 watts de chaleur rien qu'en étant au repos. Mais lorsque l'on fait de l'exercice de manière générale, cette chaleur peut être multipliée par dix et même dépasser les 1000 watts, de quoi faire bouillir un litre d'eau en six minutes seulement, expliquait dans une analyse l'an passé Amin Al-Habaibeh, professeur de systèmes d'ingénierie intelligents, à la Nottingham Trent University.
Dans une salle de 500 personnes en train de danser, "elles pourraient générer ensemble 150 kW de chaleur, soit 3600 kWh sur 24 heures", autrement dit l'équivalent de l'énergie de cinq chaudières à gaz, explique-t-il. "Compte tenu de la récente hausse des prix de l'énergie et de la volonté mondiale de parvenir à des émissions nettes de carbone nulles, des systèmes de ce type pourraient constituer un moyen simple et révolutionnaire de réduire la consommation de combustibles fossiles et les factures d'énergie", conclut le spécialiste.
Le directeur de SWG3 Andrew Fleming-Brown souhaite désormais suivre en temps réel la production de chaleur, et pourquoi pas en tirer des leçons. "Nous allons pouvoir savoir qui est l'artiste le plus chaud au sens propre. Pour l'instant, ce n'est pas un critère de programmation, mais c'est quelque chose que nous aimerions développer", lance-t-il. En pleine crise mondiale de l'énergie, les ingénieurs souhaitent à présent installer ce système dans d'autres lieux, comme des discothèques à Londres ou à Berlin. D'autres villes européennes expérimentent déjà cette technologie, comme Paris : un immeuble rue Beaubourg, dans le IVe arrondissement, récupère la chaleur qui émane des passagers de la ligne 11 du métro, une première dans le pays.
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