Les fortes chaleurs que connaît l'Hexagone ces derniers jours accentuent aussi la pollution.Parmi les zones qui subissent celle-ci de plein fouet : la vallée de l'Arve, qui s'étend d'Annemasse à Chamonix au pied du Mont-Blanc.Un collectif d'habitants déplore de lourdes conséquences sur la santé.
En prenant un peu de hauteur, le panorama est majestueux, l'un des plus beaux de l'Hexagone : une ligne de crêtes enneigées, devant un ciel bleu sans nuages. Mais au pied du Mont-Blanc, le tableau est moins séduisant. Les habitations sont baignées d'un air chaud, presque tremblotant. La vallée de l'Arve, peuplée de 155.000 habitants permanents, fait régulièrement l'objet d'alertes de pollution aux particules fines.
Pour certains résidents comme Muriel Auprince, elle n'a plus rien d'une carte postale. "Un jour comme aujourd'hui, mercredi, on va avoir entre 2300 et 2500 camions" en circulation, décrit-elle dans le reportage de TF1 en tête de cet article, postée au bord d'une aire de régulation au pied des montagnes, à Saint-Gervais-Les-Bains en Haute-Savoie.
Les véhicules s'y arrêtent avant de prendre la direction de l'Italie. "Le problème, c'est qu'ils démarrent à froid la montée du viaduc et sont donc plus polluants que s'ils traversaient seulement la vallée", explique cette habitante, membre du collectif "Coll'air Pur". Cette pollution est d'autant plus exacerbée lorsque la météo est très clémente.
"Une pollution de fond qui rend malades nos enfants"
À Passy, depuis sa terrasse et sa vue dégagée sur la vallée, la docteure Mallory Andriantavy-Guyon observe presque quotidiennement un voile grisâtre. "J'ai découvert quelques années après mon installation que l'air était pollué alors que pour moi à la montagne, on vient respirer l'air pur. Je suis très inquiète et en colère parce que j'avais choisi un mode de vie à la montagne", déplore-t-elle.
Les sources de cette pollution sont bien connues de tous dans cette vallée très industrialisée, et depuis de nombreuses années : l'autoroute qui longe la ville, l'aire de régulation des poids lourds en contrebas, ainsi que l'incinérateur de déchets et l'usine de graphite. Enfin, les émissions liées au chauffage au bois des particuliers contribuent aussi au phénomène. Tous ces facteurs en font l'un des endroits les plus pollués du pays, avec des répercussions sur la santé de ses habitants.
Dans le cabinet de la médecin Mallory Andriantavy-Guyon, qui est également membre du collectif "Coll'air Pur", un enfant sur quatre est soigné pour une toux persistante. "On m'avait parlé de la toux de la vallée, et je confirme effectivement ce terme. Malgré le fait qu'ils soient à la montagne, les enfants présentent beaucoup de pathologies ORL ou respiratoire : cela va de la bronchiolite pour les moins de un an, à la bronchite asthmatiforme, aux crises d'asthme", détaille-t-elle. "Il y a une pollution de fond qui rend malades nos enfants."
L'an passé, une campagne d'analyses mené par le collectif avait également montré que des métaux lourds à un niveau de "toxicité chronique" avaient été détectés, dont du cadmium, "aux effets connus sur les poumons, les reins, les os, l'appareil cardiovasculaire, le cerveau et l'appareil reproductif", expliquait alors la médecin.
Une vallée quasiment privée de vents
En 2017, Santé Publique France avait même démontré que 85 décès étaient liés chaque année à l'air vicié de la vallée. La chercheuse Chantal Staquet de l'Université de Grenoble a mené des travaux qui démontrent que dans cette zone encaissée, les vents sont presque inexistants. Ses conclusions sont sans appel. "Lorsque je fais une moyenne sur un an et demi, le vent est de 1,5 km/h. Or si vous polluez dans une zone non ventilée, les polluants ne pourront pas s'évacuer et vous aurez un niveau de pollution important", explique-t-elle.
Par conséquent, les émissions polluantes doivent être fortement réduites dans cette partie de la vallée. L'État avait été mis en cause l'an passé par des habitants pour une "carence fautive" dans la lutte contre la pollution de la vallée, une faute reconnue par le tribunal administratif de Grenoble, qui ne l'avait pas pour autant condamné, faute de "lien direct et certain" entre la pollution et les maladies des plaignants.
Mais le maire de Passy considère que la qualité de l'air s'est améliorée depuis dix ans et met en avant une mesure qui permet aux habitants de toucher 4000 euros d'aides s'ils changent leur système de chauffage au bois. "Depuis 2013, il y a eu un premier plan de protection de l'atmosphère qui a été lancé", explique Raphaël Castéra, élu DVG de la commune. S'il reconnaît que "des efforts sont encore à faire", il se félicite : "Aujourd'hui, les indices et les relevés montrent une diminution sensible des polluants de 32 à 34% depuis 2012".
Pour aller un peu plus loin, d'autres pistes sont également à l'étude, comme la fermeture de l'incinérateur à déchets d'ici 2030 et le transport des camions sur des rails.
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