À Marseille, de nombreux commerçants et entrepreneurs possèdent des véhicules anciens.Mais dès le mois de septembre, il ne sera plus possible de rouler dans le centre-ville sans vignette Crit’air.Cette mesure les met quelque peu dans l’impasse.
Sur les routes de Marseille, le camion à pizza de Bruno n’est plus tout jeune. Il roule depuis 45 ans. Et sur son tacot, pas de vignette Crit’air. “Il n’y a pas de vignette. Un véhicule de 1978, c’est hors catégorie”, explique Bruno.
Pour pouvoir continuer de rouler en centre-ville, il va devoir se débarrasser de son camion dès le week-end prochain. Il en a commandé un nouveau pour 56.500 euros d’occasion. Il a dû contracter un nouvel emprunt. "De toute façon, c’est ça ou on va être obligés d’arrêter de travailler. On ne nous a pas laissé le choix. On fait un crédit, on recommence à zéro. Avec les mêmes risques financiers. Ça tue le petit commerce", déplore-t-il.
Et quand on lui dit qu’il pollue l’atmosphère, Bruno répond que la ZFE (zone à faible émission) n’est pas la solution. "On jette du matériel qui est en état de fonctionner, sans le recycler, pour en prendre du nouveau. On se donne bonne conscience. On ne fait que la mesure ici sur la ville de Marseille, on se dit effectivement oui ça pollue moins, sauf que tout ce que tu as fait fabriquer en Chine et ailleurs, c’est sur eux que ça émet", poursuit Bruno.
De nombreux entrepreneurs doivent changer de véhicule
Sur le marché du centre-ville, beaucoup d’entrepreneurs ont le même discours. Ici, très peu de camions sont flambants neufs. Ce primeur va lui aussi devoir changer de véhicule. "Nous avons deux camions : un Crit’air 3 et un Crit’air 4. Les finances ne nous permettront pas de changer en si peu de temps. Ça, c’est pas possible", affirme-t-il.
Consciente du problème, la mairie assure qu’une tolérance sera appliquée lors de la mise en œuvre. "L’objectif, c’est bien sûr qu’on respire un air plus pur, mais à l’heure actuelle, il est très compliqué de verbaliser des personnes qui n’ont pas d’autre choix que d’utiliser leur voiture individuelle. On ne choisit pas de garder un véhicule ancien. C’est souvent qu’on ne peut pas acquérir un véhicule plus récent", admet Audrey Gatian, adjointe (DVG - Printemps marseillais) à la mairie de Marseille en charge des mobilités.
"Trois ans de perte d’espérance de vie liée à la pollution atmosphérique, dans le centre de Marseille"
Le calendrier est toutefois maintenu. À Marseille, l’enjeu de santé publique est primordial. "On sait par exemple que dans le centre de Marseille, on peut aller jusqu’à trois ans de perte d’espérance de vie liée à la pollution atmosphérique alors que si on va en périphérie de la ville, dans les zones rurales, les impacts sont bien moindres", déclare Dominique Robin, directeur d’Atmosud.
Pour se mettre en règle, certains entrepreneurs ont trouvé une solution accessible aux petits budgets. Marc Venaut a opté pour la location avec option d’achat pour changer ses véhicules. "Ça varie entre 400 et 500 euros par mois pour un véhicule, donc si vous en faites deux, ça fait 1000 euros", soupire-t-il. Neuf, un véhicule comme celui qu’il a choisi coûte environ 30.000 euros.
À partir de septembre, c’est plus de 20% des utilitaires français qui ne pourront plus circuler dans le centre de Marseille.