Un cerf abattu dans une propriété privée : retour sur une polémique

par Maud VALLEREAU
Publié le 24 octobre 2017 à 20h10, mis à jour le 24 octobre 2017 à 22h23
Un cerf abattu dans une propriété privée : retour sur une polémique
Source : AFP

ANIMAL - Un cerf a été abattu samedi par un chasseur dans le jardin d'un pavillon privé à Lacroix-Saint-Ouen (Oise) après une chasse à courre. Une affaire qui a suscité de très vives réactions. LCI revient sur un week-end de polémique.

C’est dans la bien nommée rue des Veneurs que la polémique est née. Au commencement, une chasse à courre en forêt de Compiègne samedi après-midi. Un cerf traqué par les veneurs de la Futais des Amis finit par trouver refuge dans le jardin d’un pavillon de Lacroix Saint-Ouen (Oise). Une photo publiée dans la presse locale résume la suite : le maître d’équipage en train d'enjamber le portail de la propriété. A la fin, une détonation, le cerf est abattu samedi soir. 

Depuis, l’émotion ne retombe pas. Sur la toile, des personnalités, à l'image d'Aymeric Caron, s’insurgent et très vite, Alain Drach, qui a achevé l'animal, est à son tour traqué. Une pétition est lancée contre lui. Sa photo et ses cordonnées sont publiées. "J’ai reçu des centaines de menaces de morts. Je comprends que des gens puissent être émus. Mais on ne peut pas diffamer, menacer, ou prétendre des choses fausses. On me présente comme un voyou qui rentre illégalement chez les gens pour tirer un cerf, c’est faux", s'insurge le chasseur chassé joint par LCI qui a décidé de déposer plainte. 

Accord des propriétaires

Alors que la mairie de La Croix Saint-Ouen rappelle qu’un arrêté interdit la chasse à courre dans ses rues, l’homme répond qu’il n’était pas "en acte de chasse" : "Pour moi, la chasse était terminée. Aucun chien, aucun cheval n’est entré dans le village ou dans le jardin. Mais un animal aux abois est considéré comme blessé et devient la propriété et surtout la responsabilité de celui qui l’a amené là. Je suis donc entré dans le village pour voir comment ramener le cerf dans la forêt. Et j’avais l’autorisation de rentrer dans la propriété puisque la gendarmerie avait appelé les propriétaires qui étaient en Bretagne". 

La maréchaussée confirme : "Ils avaient donné leur accord pour pénétrer sur leur terrain et mettre fin au trouble à l’ordre public, idéalement en préservant la vie de la bête, ce qui a été tenté". Un périmètre de sécurité avait alors été mis en place "pour éviter d’une part les blessures de l’animal, et d’autre part, les altercations chasseurs et anti-chasseurs qui étaient présents", détaille la gendarmerie. Car ce samedi-là, le hasard calendaire veut qu’une manifestation anti-chasse à courre se déroule à Compiègne.  

"Situation dangereuse"

"Durant 50 minutes, nous avons essayé de faire sortir l’animal mais ça n’a pas marché. L’animal devenait relativement ‘vindicatif’, ce qui est normal. Mais la situation devenait dangereuse", juge Alain Drach. "Les chasseurs en sont venus à la conclusion qu’il n’y avait pas d’autres solutions pour mettre fin au trouble à l’ordre public et aux souffrances de l’animal, qui saignait et était épuisé,  précise pour sa part la gendarmerie. De notre côté, nous n’avons pas les moyens - comme des lassos ou des fusils à seringues hypodermiques – de faire autrement,  alors nous avons fait confiance à ceux qui en avaient l’habitude". Le cerf est alors tué. 

Mais pour les défenseurs de la cause animale, la réponse aurait pu être différente. "Le cerf n’était pas blessé, il suffisait de le laisser se reposer avant de repartir", avance le collectif Abolissons la Vénerie Aujourd’hui (AVA), interrogé par 20 Minutes. La société de Vénerie a lancé de son côté une enquête "afin de connaître le détail exact des événements". Si les conclusions ne sont pas encore connues, Pierre de Boisguilbert son secrétaire général estime d’ores et déjà que "l'équipage n’a pas enfreint les règles". "Lorsqu’un animal se retrouve dans une propriété privée,  on doit prévenir les forces de l’ordre, répond-il à LCI. Et après, on applique la loi : nul ne peut chasser sur le terrain d’autrui sans son consentement.  Nous devons donc nous rapprocher du propriétaire et suivre ses instructions". 

Au-delà du débat juridique qui finira par être tranché, reste cette autre photo : celle d’un cerf immobile dans une allée d’une propriété privée, sans défense malgré ses bois majestueux. Les militants d’AVA qui organisent leur rassemblement annuel samedi prochain n’auraient pu espérer plus triste publicité. 


Maud VALLEREAU

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