POLÉMIQUE – De nouveaux bancs, légèrement inclinés, sont actuellement testés sur le quai de la station de métro Stalingrad à Paris. Une expérimentation très commentée par les internautes, qui y voient un nouveau stratagème pour empêcher les SDF de s'y installer. Ce que conteste la RATP.
Est-ce une vision futuriste du mobilier urbain ou une volonté détournée de faire fuir les SDF du métro parisien ? La question se pose après l'installation ces derniers jours de nouveaux types d'assises sur le quai de la station Stalingrad (Xe arrondissement), comme le rapporte Libération.
"Des sortes de sièges ou de banquettes qui n’en sont pas vraiment et qui s’apparentent à des blocs inclinés de couleur bleu", décrit le quotidien. Cette expérimentation a été largement commentée sur les réseaux sociaux par des internautes indignés, qui y voient surtout une nouvelle façon d'empêcher les personnes sans domicile fixe de s'y installer.
Bravo au @GroupeRATP , grand favori du "Prix Laurent Wauquiez", qui lutte contre l'assistanat avec ce magnifique mobilier anti-SDF !! 👏 pic.twitter.com/aMWi5sBTrR — Guillaume Meurice (@GMeurice) 18 mars 2017
Honte au @GroupeRATP pour ce "mobilier" anti-SDF. On ne lutte pas contre les pauvres mais contre la pauvreté. #RATP https://t.co/sncGEgTPgl — Guy Pichard (@GuyPichard) 18 mars 2017
N'oublions on pas qu'on a retiré à @Paris bcp de bancs et placé ds le métro des bans anti -sdf ! #Angoulême #Honte pic.twitter.com/livUlF8bnY — Julia (@Ju_zzly) 25 décembre 2014
La RATP se défend
Contactée par Libération, la RATP botte en touche, faisant valoir que "ces nouvelles assises offrent une possibilité de s’asseoir à tous les voyageurs et facilitent le nettoyage". Interrogée sur le lien de causalité entre la mise en place de ces sièges et les SDF, l'entreprise répond être au quotidien "très mobilisée et préoccupée" par la prise en charge des sans-abri.
Pour autant, elle concède auprès du quotidien que "les espaces de la RATP ne sont pas adaptés à des séjours prolongés et le métro ne peut avoir vocation à devenir un lieu de vie et d’accueil des personnes sans domicile fixe, car rien n’est pensé comme tel".
Une chose est sûre, les bancs inclinés fleurissent déjà dans de nombreuses villes, et ce n'est pas le seul stratagème utilisé par les municipalités pour empêcher les sans-abris de s'asseoir ou se coucher. Piques sur le sol, fausses plantes décoratives... Les idées ne manquent pas.
On voit de plus en plus les surfaces s'incliner. Cela ne se remarque pas forcément mais c'est largement suffisant pour rendre l'endroit désagréable si l'on veut y stationner.
Arnaud Lefort du Collectif Survival Group
"En fait, le phénomène n'est pas nouveau", nous expliquait dès 2014 le photographe Arnaud Elfort, du collectif d'artistes contre l'exclusion sociale, le Survival Group. Cela fait plus d'une dizaine d'années que les premiers dispositifs sont apparus en France".
Les bancs sont l'exemple le plus parlant : progressivement coupés par des accoudoirs, ou prenant des formes circulaires, il y devient impossible de s'y allonger. "Et puis il y a tout un arsenal de dispositifs plus pernicieux, un peu plus discrets, voire esthétiques", poursuivait Arnaud Elfort, citant en exemple "les pentes" : "On voit de plus en plus les surfaces s'incliner. Cela ne se remarque pas forcément mais c'est largement suffisant pour rendre l'endroit désagréable si l'on veut y stationner. Il y a également de nombreux espaces végétalisés, avec des bacs à fleurs ambivalents. La dimension décorative n'est qu'un prétexte".