Bourse : qu'est-ce que le VIX, cet "indice de la peur" qui ne connaît pas la crise ?

par Cédric INGRAND
Publié le 14 mars 2020 à 10h09, mis à jour le 14 mars 2020 à 10h15
Bourse : qu'est-ce que le VIX, cet "indice de la peur" qui ne connaît pas la crise ?

EN HAUSSE - Dans un marasme boursier sans précédent, une valeur affiche une croissance insolente. Une valeur pas comme les autres qui quantifie la "volatilité du marché", un indice au vert qui n'est en fait une bonne nouvelle pour personne.

34 pour cent de hausse, en une seule séance. Un jour habituel, ce genre de performance boursière serait déjà une curiosité. Mais quand elle arrive en plein bain de sang sur les places mondiales, un jour de krach généralisé où le CAC40 signe la plus forte baisse de son histoire, quand elle est la seule ligne verte dans un océan de rouge, on comprend vite que l'on n'est pas face à une valeur comme les autres.

Son nom, c'est VIX, pas le nom de code de l'action d'une entreprise, mais un indice un peu particulier. Des indices, on connaît ceux des places boursières, comme le CAC40 ou le SBF120 qui expriment en un chiffre la santé des 40 et 120 plus grosses sociétés cotées à Paris. Wall Street a de son côté le Dow Jones et le NASDAQ. Il existe aussi des indices qui mesurent un secteur économique ou une zone géographique. VIX, lui, est basé sur l'indice S&P 500 de 500 valeurs vedettes aux États-Unis, mais il n'en exprime pas la valeur, juste la "volatilité".

Un Jean-qui-rit quand le marché pleure

"En fait", explique Marc Fiorentino, spécialiste des marchés financiers et cofondateur du site MeilleurPlacement, "le VIX quantifie le niveau de nervosité des opérateurs sur le S&P 500, c’est-à-dire les écarts de cours par rapport à la moyenne des écarts de cours historiques. Plus il y a de variations erratiques dans un sens ou dans l’autre, plus le VIX est élevé." Une sorte de Jean-qui-rit, mais uniquement quand les marchés vont mal, et pour cause : il exprime la panique, qui s'exprime rarement à l'achat. "Il traduit la volatilité dans les deux sens", poursuit Marc Fiorentino, mais les choses sont toujours moins violentes à la hausse, elles se font dans un climat plus serein, là ce sont les ventes en panique qui provoquent beaucoup plus de volatilité." Et si l'indice n'est pas une valeur sur laquelle on peut investir, il existe nombre de valeurs dérivées du VIX, certaines d'ailleurs qui amplifient ses mouvements. L'une d'entre elles affichait hier une hausse en séance... de 62%.

Alors, qui sont ces investisseurs qui ont profité de la hausse exceptionnelle du VIX ? À en croire Marc Fiorentino, ils sont rares. "Ceux qui investissent sont d'ordinaire des gens qui cherchent à protéger leur portefeuille à la baisse", des prudents qui utiliseraient le VIX comme une assurance pour les jours de gros temps. Ce serait d'ailleurs l'usage normal d'un tel indice. Logique : quand le marché tangue, seul VIX est au beau fixe, de quoi compenser au moins en partie les pertes de son portefeuille boursier.  A l'inverse, sur un marché en hausse régulière, comme depuis la fin de la crise de 2008, VIX est presque toujours dans le rouge, c'est même son état normal. Parier sur la baisse de l'index était ainsi devenu un pari assez peu risqué, un pari qu'ont fait nombre d'investisseurs, sur des montants sans cesse croissants. 

De la "cocaïne monétaire" au "Very Bad Trip"

Ainsi, l'essentiel des investissements sur le VIX le jouaient à la baisse, pour des investisseurs qui ont perdu énormément d'argent quand le VIX est passé du rouge à une hausse sans précédent. Des investisseurs qui auraient mal anticipé la crise, obnubilés par la longévité d'une martingale qui avec le temps semblait infaillible. "J'appelle ça la cocaïne monétaire", sourit Marc Fiorentino, "les gens étaient dans une ambiance hallucinogène, ils croyaient soudain qu’il n’y avait plus de risque et que la Bourse était garantie par les banques centrales. Là, du coup, forcément, c’est Very Bad Trip." De quoi refroidir les ardeurs de ceux qui ne croyaient plus à la volatilité des marchés, et rendre au moins un temps au VIX sa vocation première, celle d'avertir la Bourse d'une tempête qui s'annonce.


Cédric INGRAND

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