Numérique : les Français de moins en moins confiants, mais de plus en plus... clients

par Cédric INGRAND
Publié le 26 février 2020 à 18h05
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PARADOXE - Le baromètre annuel des professionnels de l'e-commerce est formel : avec le temps, la confiance des Français face au numérique s'amenuise, principalement sur tout ce qui touche à la vie privée mais aussi face à l'intelligence artificielle. Pourtant, dans le même temps, leurs usages contredisent parfois leurs craintes.

Il y a dans ce pays une fracture. Avec le temps, avec l'explosion des usages mobiles et la généralisation du haut et du très haut débit, les usages du numérique concernent l'essentiel de la population adulte. Les chiffres sont en constante augmentation. Mais avec un corollaire, constant lui aussi : un manque de confiance. 

C'est ce que constate depuis dix ans le baromètre annuel de  l'Acsel, le syndicat des professionnels du commerce et des services en ligne. Un baromètre dont les résultats évoluent doucement avec le temps, mais dont le constat central ne bouge pas : si le Français est de plus en plus client de tout ce que le numérique peut lui apporter, sa confiance plafonne.

Le plafond de verre des 40%

La confiance dans les usages  numériques en France en 2020, selon l'enquête annuelle de l'ACSEL
La confiance dans les usages numériques en France en 2020, selon l'enquête annuelle de l'ACSEL

Année après année, la confiance globale ne bouge ainsi que très peu, un curseur bloqué sous la barre des 40%, un chiffre en légère baisse même pour 2020, à 37%. C'est en entrant dans les détails que se dessinent les vraies tendances. Cette année, ce sont les réseaux sociaux qui voient leur capital confiance continuer à s'enfoncer, puisque seul un internaute sur quatre leur fait confiance. Plus surprenant, la dégringolade en dix ans des services d'administration en ligne, qui restent pourtant plébiscités par les administrés. Seuls deux secteurs ont gagné en confiance en dix ans : le commerce en ligne et la consommation collaborative avec toutes les plateformes de commerce entre particuliers. 

Pourtant, malgré la défiance, les affaires continuent, avec des services numériques devenus des évidences, comme une nouvelle normalité qui ne ferait plus débat. C'est le cas justement pour tous les services publics en ligne, pour le commerce, les messageries instantanées. On arrive même avec des scores quasi-impériaux pour des applications comme la banque en ligne, qui touche aujourd'hui 92% des sondés -autant dire que l'on ne saurait plus faire sans.

Les usages du numérique en France en 2020, selon l'enquête annuelle de l'ACSEL
Les usages du numérique en France en 2020, selon l'enquête annuelle de l'ACSEL

La Cnil comme levier de la confiance, le RGPD encore mal connu

Pour autant, la demande de l'internaute est forte quand il s'agit de garantir la sécurité de ses données et de sa vie privée. Pour se protéger, le sondé attend beaucoup du législateur. La Cnil, vieille de plus de quarante ans, est ici plébiscitée, loin devant les garanties techniques de sécurité ou la capacité de l'internaute à agir en justice. Le RGPD, ce règlement européen qui protège nos données, paye un peu sa jeunesse, puisque à peine 43% d'internautes se disent plus confiants grâce à lui et que seuls 6% se disent désormais en pleine confiance face aux garanties qu'il offre. Sur ce point, heureusement que c'est la Cnil qui doit en organiser l'application.

Réseaux sociaux et données personnelles, le paradoxe français ?Source : Sujet TF1 Info

L'intelligence artificielle, en mode "Monsieur Jourdain"

À la fois enthousiastes face à ce que le numérique leur a apporté en vingt ans et échaudés face à certains excès, les Français approchent les nouveaux usages avec une curiosité prudente. Meilleur exemple, l'intelligence artificielle. Plus de la moitié des sondés disent l'avoir déjà utilisée, un chiffre probablement loin de la réalité.

Car ce que bon nombre des sondés semblent ignorer, c'est que même s'ils n'en ont pas idée, leurs données ont forcément déjà été  traitées par une intelligence artificielle, que ce soit l'anti-spam de leur service de mail ou le classement et la détection automatique de personnes et d'objets dans leurs photos postées en ligne ou stockées dans le cloud. Comme M. Jourdain qui faisait de la prose sans le savoir, tous les internautes bénéficient déjà d'une manière ou d'une autre des avancées de l'IA. À elle de ne pas décevoir leur confiance.


Cédric INGRAND

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