ILLECTRONISME - Un sénateur propose de détecter lors de la Journée Défense et Citoyenneté le manque de compétences en informatique, au même titre que les problèmes d’illettrisme. Environ 15% des Français seraient concernés. Explications.
Que ce soit pour effectuer un achat en ligne, payer ses impôts, rédiger un CV et chercher un emploi, ou bien tout simplement pour s’informer : aujourd’hui, le numérique est partout. Et les illectronistes doivent faire face à de nombreuses difficultés : car tout est mis en œuvre pour inciter les gens à utiliser de plus en plus les services numériques, ce qui accentue davantage encore le sentiment d’exclusion. Bref, c'est un véritable handicap.
Alors que l’illettrisme avait été déclaré Grande cause nationale en 2013, son avatar numérique, l’illectronisme (comprenez le manque de maîtrise des outils numériques, et l’exclusion qui en résulte) toucherait pas moins de 15% de la population, soit près de 10 millions de Français, d'après les chiffres du Ministère de la Recherche et de l’Economie numérique.
"Le numérique, c’est devenu l’alphabet des temps modernes"
C’est justement pour lutter contre cet analphabétisme numérique que le sénateur socialiste du Lot-et-Garonne Pierre Camani a déposé un amendement au projet de loi Egalité et citoyenneté, qui sera examiné la semaine prochaine par le Sénat. "Le numérique est devenu l’alphabet des temps modernes, relève l'élu. Une maîtrise minimale de l'informatique est aujourd’hui requise pour un nombre toujours croissant d’activités quotidiennes."
Le but de cet amendement ? Mieux évaluer le manque de compétence des adolescents en matière d’informatique à l’occasion de la Journée Egalité et citoyenneté, au même titre que les problèmes d’illettrisme : "Je m'étonne encore chaque jour du fossé qui peut exister entre ceux qui maîtrisent ces outils numériques et les non-initiés, notamment dans les zones rurales comme dans le département du Lot-et-Garonne", souligne le parlementaire.
Un indicateur de l’état d’avancement des sociétés numériques
Il suggère pour y remédier d’étendre le dépistage de l’illettrisme à l’illectronisme par le biais d'un test d'évaluation. "Par exemple, effectuer une recherche en ligne ou utiliser un logiciel de traitement de texte, détaille le sénateur. En cas de résultats insuffisants, les jeunes seraient alors incités à passer le Passeport Internet Multimédia (PIM) ou le Brevet Internet et Multimédia adultes (B2i adultes), ainsi qu’à se rendre dans un Espace Public Numérique (EPN) proche de leur domicile".
Ce serait aussi une manière pour les pouvoirs publics de se doter d’un indicateur adapté pour mesurer l’état d’avancement des sociétés numériques, souligne Pierre Camani. En raison du fait qu’Internet est composé à 90% d’écrit, "la population en difficulté avec les acquis simples (lire, écrire ou compter) est souvent la même que celle qui est touchée par le manque de compétences en informatique", regrette l'élu.
"Une part non négligeable de jeunes se retrouvent désemparés face aux outils numériques"
Les personnes les plus touchées par l'illectronisme sont les individus en situation de précarité sociale ou économique, les seniors, les non-diplômés ainsi que les grands ruraux. "Le plus inquiétant, c’est que l'on constate qu'une part non négligeable de jeunes se retrouvent désemparés face à l'utilisation de ces outils numériques", note Pierre Camani. Bien qu'ils maîtrisent les jeux vidéos et les réseaux sociaux, ils sont perdus quand il s'agit d'utiliser ces technologies dans un but autre que le divertissement.
Et pourtant : la question de l'illectronisme n'a rien de nouveau ! On doit la première utilisation de cette formule à Lionel Jospin, à l’occasion d’un discours à Hourtin, en Aquitaine, le 26 août 1999 : "L’essor des technologies de l’information ne doit pas creuser un 'fossé numérique'. L’Internet ne doit pas nourrir de nouvelles inégalités dans l’accès au savoir. […] A travers l’école, en particulier, l’Etat peut prévenir 'l’illectronisme', avant qu’il ne devienne un nouvel avatar de l’illettrisme."
"Le secteur associatif est très présent dans la lutte contre l’illectronisme"
Heureusement, le secteur associatif est très présent dans la lutte contre l’illectronisme, notamment par le biais des espaces publics numériques qui sont répartis sur tout le territoire, et notamment dans les zones rurales. "Ces lieux de rencontre proposent des activités d’initiation ou de perfectionnement et offrent un accès libre à Internet avec du haut débit", précise Pierre Camani. On en compte aujourd'hui plus de 5.000 dans l'Hexagone.
De même, la démocratisation des smartphones - plus de 46% des Français en sont équipés, selon une étude sur les usages mobiles du cabinet Deloitte - et des tablettes, dont l'usage est de plus en plus adapté et intuitif, apporte un début de solution contre l’illectronisme. Tout comme l’omniprésence de l’écrit dans le numérique , des mails aux SMS, en passant par les applications de messagerie instantanée, comme Twitter ou Facebook, pourrait en inciter certains à s’améliorer.
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