Les propos haineux sur le web plus que jamais dans le viseur de Berlin : l’Allemagne, un pays modèle en la matière ?

Publié le 6 juillet 2017 à 12h41
Les propos haineux sur le web plus que jamais dans le viseur de Berlin : l’Allemagne, un pays modèle en la matière ?

CONTRE-ATTAQUE – Face à la propagation des propos haineux et des "fake news" sur internet, l’Allemagne a choisi de s’attaquer directement aux réseaux sociaux comme Facebook ou Twitter si ceux-ci ne retirent pas les contenus en cause sous 24H. Les amendes pourront monter jusqu’à 50 millions d’euros. Qu’en est-il en France ? Etat des lieux.

Déjà intense, la traque s’intensifie. L’Allemagne a décidé de s’attaquer aux grands réseaux sociaux qui ne se soumettraient pas à leur devoir de modération des contenus haineux ou des "fake news". Des contenus de plus en plus récurrents sur internet. Les géants du web comme Facebook et Twitter seront désormais menacés d'amendes pouvant aller jusqu'à 50 millions d'euros s'ils ne retirent pas rapidement les propos racistes, antisémites, islamophobes ou homophobes, ainsi que les fausses informations, de leurs plateformes.

Une loi en ce sens a été adoptée vendredi 30 juin par les députés allemands, dans un domaine où Berlin se veut en pointe au plan européen et exemplaire du fait du souvenir des persécutions nazies. L'initiative découle notamment de la spectaculaire envolée des commentaires nauséabonds à la suite de l'arrivée outre-Rhin de plus d'un million de migrants en 2015 et 2016.

Seul 1% du contenu signalé du Twitter allemand retiré

Berlin a décidé de sévir car il accuse les groupes internet de ne pas s'être suffisamment disciplinés. "Les plateformes internet ne prennent pas de mesures adéquates, notre expérience a clairement montré que sans pression politique les réseaux sociaux ne bougeront pas", souligne le ministre allemand de la Justice, Heiko Maas. Un rapport du gouvernement en avril affirmait ainsi que Twitter n'avait retiré en moyenne que 1% des commentaires signalés comme non appropriés par ses usagers.

"La liberté d'expression s'arrête là où commence le droit pénal"
Heiko Maas, ministre allemand de la Justice

Si certains s’inquiètent déjà d’un possible excès de zèle dans la censure par principe de précaution, Heiko Maas, à l'origine du texte qui doit encore être validé par la chambre haute du Parlement pour entrer en vigueur (ce qui devrait normalement être le cas), juge que "la liberté d'expression s'arrête là où commence le droit pénal". Et d’ajouter : "Les menaces de mort et les insultes, l'incitation à la haine ou la négation de l'Holocauste ne font pas partie de la liberté d'expression, elles constituent au contrainte une atteinte à la liberté d'opinion d'autrui."

Une fois la loi – qui vise aussi la propagande "terroriste" et la pédopornographie – passée,  les opérateurs des réseaux sociaux auront 24 heures pour retirer tout commentaire marqué par les usagers comme outrancier et considéré comme violant la Constitution allemande. Un autre délai a été fixé à sept jours pour une catégorie moins outrancière de commentaires. Outre l'amende de 50 millions d'euros pour les groupes, les dirigeants de ces sociétés risquent individuellement une amende supplémentaire de 5 millions d'euros maximum s'ils n'obtempèrent pas en cas de demande de retrait.

Et la France dans tout ça ?

Ces mesures drastiques pourraient-elles voir le jour en France ? Le taux de suppression des contenus haineux s’est "très significativement amélioré", observait mardi la Licra, après l’annonce par plusieurs associations de la levée de leurs poursuites contre Twitter. Une procédure similaire, lancée contre Youtube et Facebook, a quant a elle été suspendue le temps de discussions en vue d’un accord. 

SOS Racisme et l’Union des étudiants juifs de France avaient assigné en mai les trois réseaux sociaux après avoir soumis leurs services du 31 mars au 10 mai 2016 à un "testing de masse". 586 contenus "racistes, antisémites, négationnistes, homophobes, faisant l’apologie du terrorisme ou de crimes contre l’humanité" avaient alors été signalés. Mais seuls 4% avaient été supprimés sur Twitter, 7% sur Youtube et 34% sur Facebook.

Violence sur les réseaux sociaux : au collège, la prévention avant tout Source : JT 13h Semaine
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Aujourd'hui, en France, les internautes ont plusieurs possibilités pour signaler des contenus haineux : Point de Contact, créé par l’Association française des prestataires de l'internet (AFPI, ex-AFA) en 1998 ; la plateforme Pharos du ministère de l'Intérieur, ou encore le site internet de la Licra. Des enquêtes pénales peuvent être ouvertes après ces signalements. Les contenus litigieux peuvent également être retirés à la demande de la police sans ouverture d'une enquête. 

Les sanctions, rarement appliquées proportionnellement au nombre de contenus haineux, prévues par l'article 227-24 du Code pénal, peuvent aller de trois ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende. 


La rédaction de TF1info

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