Steep : le jeu vidéo made in Haute-Savoie

Depuis la terrasse, on aperçoit les premiers sommets enneigés des Alpes et on prend une bonne bouffée d'air. Les premières stations ne sont pas loin et bientôt, les skis pourront être chaussés. En attendant, dans l'open space, on s'affaire aux derniers réglages de Steep, le premier jeu pensé et conçu dans ce petit studio d'Ubisoft Annecy, alors qu'une poignée de journalistes vient perturber la journée et découvrir le petit bijou savoyard. Nous sommes à un peu plus de deux semaines de la sortie du jeu (sorti le 2 décembre).

Pour la première fois en 20 ans d'existence, le studio est aux commandes d'un jeu ambitieux, en gestation depuis deux ans et demi et qui a été dévoilé pour la première fois en juin dernier à l'E3, la grand-messe du jeu vidéo à Los Angeles. Une année faste pour Ubisoft Annecy, l'une des branches les moins connues de l'éditeur français, qui peut ainsi sortir de l'ombre et se faire une place au soleil aux côté de Montréal qui brille souvent avec les Assassin's Creed, de Montpellier qui comptait dans ses rangs Michel Ancel – le papa de Rayman notamment- ou encore Montreuil-Paris qui abrite le siège de la société et la franchise Just Dance.

Discret jusque-là, le studio annécien est pourtant de toutes les grosses aventures d'Ubisoft (Splinter Cell, The Division, Assassin's Creed…). Sa spécialité : le multijoueur. Un savoir-faire reconnu dans le milieu. Loin du tumulte parisien, ce sont deux anciens du siège qui ont décidé il y a 20 ans de partir monter une équipe au milieu des Alpes. "Annecy et la région Rhône-Alpes se prêtaient bien au jeu vidéo car il y a beaucoup de studios sur Lyon et sa région, mais aussi de nombreuses écoles formant au jeu vidéo. De plus, on est à côté de la Suisse, dans une zone internationale", explique Rebecka Coutaz, la directrice du studio depuis cinq ans.

De six membres à ses débuts, le studio compte aujourd'hui près de 180 salariés qui travaillent sur trois marques différentes dont Steep, le bébé local. "C'est chouette aujourd'hui d'avoir l'éclairage de Steep sur le studio. C'est une forme de reconnaissance du travail qu'on a fait. On était à l'ombre des autres studios. Mais nous sommes de bons travailleurs et maintenant, nous sommes studio lead sur un jeu (responsable de la direction et de la réalisation, ndlr)", s'enthousiasme Rebecka Coutaz. "C'est une responsabilité de mener un jeu de A à Z. Ca offre de la visibilité et c'est l'occasion de porter son bébé, mais on s'expose aussi," reconnaît Igor Manceau, le directeur créatif de Steep. C'est lui qui a eu l'idée initiale et l'a portée auprès de la direction, même s'il ne cesse de répéter que "c'est une œuvre collective, une réflexion d'équipe".

Steep, c'est un peu le "jeu entre potes qui partent skier". Ici, pas de mode histoire. Le studio s'en est remis à ce qu'il sait faire le mieux et ce qu'il connaît, la montagne. Alors, attendez-vous à défier vos amis ou d'autres joueurs dans un très large monde ouvert au cœur des Alpes reconstituées, à coup de snowboard, skis, wingsuit ou parapente. "Steep, c'est une idée originale qui venait d'une possibilité technique (un moteur de jeu plus fluide développée pour le jeu Ghost Recon Wildlands à venir en 2017, ndlr) et l'impression qu'il y avait une tendance sur laquelle s'appuyer", explique Igor Manceau.

Cette tendance, c'est celle des réseaux sociaux, principalement de YouTube et du partage de vidéos d'exploits sportifs -ou non- en montagne. "Parmi les vidéos les plus vues chaque année, il y a celles des X Games, des vidéos de skis hors-piste, des images d'exploit en montagne. De plus en plus de gens se filment sur les pistes et partagent les vidéos sur les réseaux. Il y a un véritable phénomène qu'on a voulu retranscrire dans le jeu", souligne Igor Manceau.

La solidarité, l'échange sur les pistes, le fun, les membres d'Ubisoft Annecy en savent quelque chose. "Nous sommes un studio où les gens sont passionnés de ski, de snowboard ou encore de parapente. On a toujours rêvé de faire ce jeu-là. Nous n'avons même pas besoin de faire de recherches car on vit tous les jours avec les montagnes autour", résume Rebecka Coutaz. En déambulant au cœur des locaux savoyards, la montagne est en référence un peu partout, pas seulement de l'autre côté de la fenêtre, mais par de petits éléments du quotidien, des visages émaciés habitués aux hautes altitudes, un équipement bien pratique au pied du bureau. Et ce n'est pas seulement pour se mettre dans l'ambiance de Steep. Ici, Steep, c'est le quotidien et Annecy n'est pas pour rien la capitale des sports outdoor.

Et c'est ce qui a donné envie à de très nombreux collaborateurs de se mobiliser sur le jeu. "Il y a un vrai attachement des équipes au jeu car c'est le premier que l'on fait, c'est le jeu de la région", explique fièrement le directeur créatif du jeu. Pour réussir leur pari, les équipes d'Ubisoft Annecy ont aussi fait appel aux talents du coin, qu'ils soient sportifs comme le skieur freestyle Kevin Rolland ou les équipes de France de snowboard qui ont participé à l'élaboration du jeu à travers des conseils et des séances de motion capture. Ou qu'ils soient emblématiques comme les partenaires qui se sont joints au jeu (le fabricant Salomon, l'équipementier NorthFace). Un véritable jeu AOC presque 100% savoyard car d'autres studios d'Ubisoft ont également apporté leur aide (Kiev est en charge de la version PC).

Maîtriser leur sujet par cœur, connaître les lieux et avoir une motivation sans borne, tout cela a permis aux membres d'Ubisoft Annecy de se concentrer sur ce qu'ils voulaient le plus exprimer : leur soif de liberté et de grands espaces. Steep est un jeu d'exploration au sens large qui va vous transporter au sommet et vous faire frissonner dans cette montagne parfaitement reproduite. Aucun autre studio n'avait une telle expertise sur son jeu. Un jeu "de potes" de travail qui se retrouvent le week-end sur les pistes. Un jeu de partage et challenges, des valeurs essentielles à ce Steep qui ne donne qu'une envie : chausser les skis et partir à l'aventure. N'hésitez pas, la saison est enfin ouverte !