MONDE D'APRES - Largement pratiqué depuis la crise sanitaire, le télétravail influence désormais les recherches immobilières. Les cadres des grandes villes souhaitent désormais pouvoir le pratiquer dans une pièce dédiée. Sondages et ressenti des professionnels en agence font clairement ressortir cette tendance. Mouvement durable ou simple contrecoup du confinement ?
A peine sortis du confinement, ceux qui cherchent à acheter un logement ont déjà revu l'ordre des priorités de leur critères. Télétravail en tête, 24% d'entre eux tiennent ainsi à disposer d'une pièce isolée consacrée au travail, selon une étude de l'Observatoire du moral immobilier du groupe SeLoger, publiée début juin.
Car certes pour du télétravail occasionnel les intéressés pouvaient envisager de poser leur ordinateur sur un coin de table. Mais c'est une autre histoire pour une pratique amenée à devenir plus régulière. Alors que les cadres traînent des pieds pour revenir au bureau, la question est en tout cas désormais au cœur des réflexions des chefs d'entreprise.
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En agence immobilière, "l'impact du confinement sur la volonté ou le besoin immobilier des clients est très net", observe Eric Allouche, le directeur exécutif du réseau Era France, contacté par LCI. "Aujourd'hui, le critère de la pièce en plus pour travailler - tout comme l'espace extérieur (balcon, terrasse ou jardin) est un plus". Qu'il s'agisse d'une pièce dédiée ou de la possibilité d'aménager un espace mixte bureau/chambre d'ami, cela implique d'acquérir quelques mètres carrés supplémentaires.
Lorsque le budget n'est pas extensible, ce besoin de place pousse logiquement à s'éloigner du cœur des métropoles. Selon l'étude de SeLoger, 20% de ceux qui cherchent à acheter un bien ont ainsi revu à la hausse la superficie de leur futur logement et 38% ont élargi leur périmètre de recherche. Sans toutefois trop s'éloigner des villes qui concentrent toujours le gros des emplois.
Pour un même budget, acheter plus grand, c'est s'éloigner
Par exemple dans la capitale, où les prix sont toujours plus fous, c'est vite vu. "Les clients de Paris se présentent dans les différentes agences un peu partout en banlieue avec le souhait de déménager pour plus grand. Pour se limiter à l'exemple de Rambouillet (Yvelines), vous pouvez en effet acquérir une belle maison avec 1.000 m² de terrain pour le prix de 50/60 m² à Paris", illustre Eric Allouche.
C'est donc à dessein que Cadremploi, le site de recrutement destiné aux cadres, publie ce vendredi 19 juin son palmarès des villes où vivre au vert dans la grande couronne parisienne (et parfois à moins d'une demi-heure de la capitale), plaçant Saint-Germain-en-Laye (Yvelines) en tête. Une semaine après avoir diffusé un précédent classement à l'échelle de la France et portant alors Angoulême au pinacle.
A noter qu'à Paris intra muros, le mètre carré avoisine en moyenne les 10.500 euros, contre 3.900 euros dans les Yvelines, 2.800 euros dans le Val d'Oise ou 2.700 euros en Essonne et en Seine-et-Marne, selon les dernières données des Notaires du Grand Paris arrêtés à fin mars. Sachant qu'en dépit d'une chute vertigineuse des transactions pendant le confinement, les prix ont néanmoins continué de monter.
Un espace supplémentaire et une connexion de bonne qualité
Outre la pièce dédiée, l'accès à internet a bien sûr aussi son importance. La qualité de la connexion ou le raccordement à la fibre optique apparaît ainsi comme une priorité pour 53% des futurs acheteurs, toujours selon SeLoger. "A moins de 100 km de Paris et aux abords des grandes villes, l'accès internet n'est plus une question aujourd'hui. Dans les Yvelines par exemple, la fibre est déjà présente dans de nombreux endroits et les travaux pour l'installer sont en train d'accélérer" nuance-t-on cependant chez Era.
Nous sommes ainsi passés il y a déjà quelques années d'une époque après-guerre où nous voulions plus, à une époque actuelle où nous voulons mieux.
Eric Allouche, Era
Mouvement durable ou simple contrecoup du confinement ? "Cette envie d'espace supplémentaire et d'éloignement de la densité urbaine, sans pour autant trop s'éloigner de son lieu de travail - où il faut maintenant penser à revenir au moins une partie de la semaine - n'est cependant pas nouvelle", aux yeux d'Eric Allouche.
A son avis, cela s'inscrit dans quelque chose de plus profond et de quasiment sociologique : "L'idée est en train de s'installer que différents dangers nous guetteraient, dont l'incertitude au sujet de la nécessité de se reconfiner car la crise sanitaire n'est évidemment pas terminée. Nous sommes ainsi passés il y a déjà quelques années d'une époque après-guerre où nous voulions plus, à une époque actuelle où nous voulons mieux. Télétravailler, se déplacer moins souvent, s'éloigner un peu plus pour plus grand et pourquoi pas demain cultiver ses légumes dans son jardin, s'inscrit finalement dans une perspective globale en accord avec la préoccupation de moins polluer".