À trois semaines de leur sortie de l'UE, les Britanniques ne voteraient plus pour le Brexit

par Cédric INGRAND
Publié le 9 décembre 2020 à 19h12
À trois semaines de leur sortie de l'UE, les Britanniques ne voteraient plus pour le Brexit
Source : AFP

TOO LATE - Cinq ans après la campagne du référendum, les courbes des camps du "Leave" et du "Remain" se sont croisées. De quoi promettre à Boris Johnson un horizon politique compliqué si le Brexit se passait mal.

Sur le papier, l'histoire est pliée. Dans trois semaines, le Royaume-Uni sortira officiellement de l'Union européenne, quatre ans et demi après en avoir décidé par référendum, à 52% contre 48, et un an seulement après avoir offert à Boris Johnson une large majorité conservatrice à la Chambre des Communes, comme un mandat donné à celui qui promettait en campagne :"Get Brexit Done" (obtenir le Brexit). Mais alors que l'échéance approche, l'opinion outre-Manche a bien changé d'avis.

En effet, si les électeurs britanniques devaient retourner aux urnes aujourd'hui, c'est bien le "Remain" qui l'emporterait haut la main, avec une dizaine de points d'avance sur le "Leave". Un retournement de l'opinion que l'on retrouve dans plusieurs sondages, qui suivent son évolution depuis le référendum, mais un revirement qui ne changera rien à l'affaire. Tout au plus sonne-t-il comme un avertissement politique au gouvernement conservateur, alors que les modalités de la sortie du pays de l'UE sont encore suspendues à des négociations sans fin qui ont bien peu de chances de trouver une issue favorable.

Selon plusieurs sondages, si l'on reposait la question de la sortie de l'UE aux Britanniques, c'est aujourd'hui le "Non" qui l'emporterait.
Selon plusieurs sondages, si l'on reposait la question de la sortie de l'UE aux Britanniques, c'est aujourd'hui le "Non" qui l'emporterait. - YouGov

Selon les analyses, si le changement s'explique, c'est par l'empilement de nombre de raisons très différentes. Au-delà de la difficulté et du feuilleton sans fin qu'est la sortie de la Royaume-Uni de l'Union, la perspective d'un "no deal", d'une sortie sans accord commercial avec l'UE, inquiète bien au-delà de ceux qui auraient voté contre le Brexit. Aujourd'hui, seul un électeur sur cinq soutient le "no deal", qui inquiète beaucoup du côté des entreprises, une sur trois ne s'estimant pas prête en cas de sortie sans accord. De quoi pousser le camp des indécis du référendum à se ranger désormais dans la colonne du "Non". Si l'opinion évolue, c'est aussi dans une certaine mesure par une lente évolution démographique : le "Leave" était massivement porté par les seniors, qui laissent progressivement leur place à de plus jeunes générations de votants, bien plus europhiles.

Les grands travaux du Brexit dans le Kent au Royaume-UniSource : JT 20h WE

Quand le Brexit galvanise l'Europe

Autre effet ricochet d'un Brexit pas aussi simple que ses promoteurs ne l'avaient promis : le retour du spectre d'une Écosse qui reprendrait son indépendance, ostensiblement pour reprendre sa place dans l'UE. Depuis le référendum sur le Brexit, le "Oui" des Écossais à l'indépendance aurait ainsi gagné cinq points, pour atteindre 51%.

Mais les effets du Brexit sur l'opinion se font également sentir une fois passée la Manche, et pour les mêmes raisons. En jouant les épouvantails, sur son principe peut-être mais surtout sur le casse-tête de sa réalisation, et sur ses conséquences néfastes, le Brexit semble avoir galvanisé le sentiment européen dans nombre de pays, et particulièrement chez les jeunes, comme le constate une étude annuelle de Pew Research. Ainsi, entre 2019 et 2020, les opinions favorables à l'Union européenne sont à leur plus haut en Allemagne, en Suède, aux Pays-Bas... et au Royaume-Uni. Malgré le Brexit, l'UE y recueille 60% d'opinions positives, contre 37% d'opinions défavorables. Presque à la virgule près le même score que la France.


Cédric INGRAND

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