Allemagne : un centenaire, ancien gardien de camp nazi, condamné à 5 ans de prison

TG
Publié le 29 juin 2022 à 16h05

Source : Sujet TF1 Info

Josef Schütz, 101 ans, a été condamné mardi à une peine cinq ans de prison.
Il devient la personne la plus âgée à être reconnue coupable de complicité de crimes commis pendant l'Holocauste.

Traquer les criminels de guerre nazis. Jusqu'à leur dernier souffle. La justice allemande a, pour la première fois, condamné un ancien gardien de camp de concentration plus que centenaire. Josef Schütz, 101 ans, a écopé de cinq ans de prison. Cet ancien sous-officier des Waffen SS a été jugé coupable de "complicité" dans le meurtre d'au moins 3.500 prisonniers lorsqu'il opérait entre 1942 et 1945 dans le camp de Sachsenhausen, au nord de Berlin. Entre son ouverture en 1936 et sa libération par les Soviétiques le 22 avril 1945, ce camp a vu passer quelque 200.000 prisonniers, principalement des opposants politiques, des juifs et des homosexuels. 

Des dizaines de milliers d'entre eux ont péri, victimes principalement d'épuisement dû au travail forcé et aux cruelles conditions de détention.

"Vous aviez constamment la fumée du crématorium dans le nez"

"Pendant trois ans, vous avez regardé comment des prisonniers étaient torturés et tués sous vos yeux (...) par votre positionnement sur le mirador du camp de concentration, vous aviez constamment la fumée du crématorium dans le nez", a déclaré le président du tribunal de Brandebourg-sur-la-Havel (Est) Udo Lechtermann. "Toute personne voulant fuir le camp était fusillée. Ainsi, tout gardien de camp a participé activement à ces meurtres", a-t-il ajouté. Avant de conclure : "Il y a des endroits où on ne doit pas être et des choses qu'on ne doit pas faire".

À l'annonce de la sentence, plus importante que le minimum de trois ans de prison pour complicité de meurtres inscrit dans le droit allemand, l'accusé en chaise roulante, habillé d'une chemisette grise et d'un pantalon de pyjama, est resté stoïque. En raison de son âge, mais peut-être aussi car la justice n'a pas dit son dernier mot : son avocat, Stefan Waterkamp, annoncé qu'il irait en cassation, repoussant au mieux à 2023 une application de cette peine qui semble hypothétique étant donné l'état de santé fragile de Josef Schütz. 

Des récits contradictoires sur son passé

Jamais au cours de la trentaine d'audiences, il n'aura exprimé le moindre regret. Au contraire, lundi il a encore nié toute implication, se demandant "pourquoi il était là", et affirmé que "tout est faux" à son sujet. Pourtant, Josef Schütz a avancé plusieurs récits sur son passé, parfois contradictoires. Dernièrement, il a prétendu avoir quitté la Lituanie au début de la Seconde Guerre mondiale pour rejoindre l'Allemagne où il aurait travaillé comme ouvrier agricole durant tout le conflit. Une version contestée par plusieurs documents historiques mentionnant notamment son nom, sa date et son lieu de naissance prouvant qu'il avait bien été affecté de fin 1942 à début 1945 à la division "Totenkopf" (Tête de mort) des Waffen-SS. 

Après la guerre, il a été transféré dans un camp de prisonniers en Russie puis s'est installé dans le Brandebourg (région autour de Berlin), travaillant comme paysan puis serrurier, sans jamais être inquiété. Jusqu'à ce que les autorités décident ces dernières décennies d'accentuer leur quête de justice.

Pourtant "simple" gardien de camp, Josef Schütz a été condamné à une lourde peine comparée à d'autres décisions récentes, illustrant la sévérité accrue, quoique jugée très tardive par les victimes, des juges. En juillet 2020, un tribunal avait infligé une peine de deux ans de prison avec sursis à un ex-gardien du camp de Stutthof, Bruno Dey, 93 ans.  Le cas le plus emblématique a été la condamnation à cinq ans de prison de l'ancien gardien du camp d'extermination de Sobibor, John Demjanjuk en 2011. Il avait fait appel et était décédé un an plus tard, sans avoir été incarcéré.


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