Après la mise en accusation de Donald Trump, que va-t-il se passer ?

par Hamza HIZZIR
Publié le 19 décembre 2019 à 10h28

Source : TF1 Info

IMPEACHMENT - Donald Trump mis en accusation, il revient au Sénat d'organiser son procès en destitution selon un rituel qui a servi à juger deux présidents américains seulement, et dont les contours restent à préciser.

Un seul point d'accord aura finalement émergé entre les deux camps, démocrate et républicain : cette "triste" journée entrera dans les livres d'Histoire. Dans la soirée du mercredi 18 décembre, après de longues heures d'une cacophonie contradictoire, la Chambre des représentants, dominée par les démocrates, s'est prononcée en faveur de l'"impeachement" (la destitution) de Donald Trump, par 230 voix contre 197. Avant lui, seuls deux autres présidents des Etats-Unis, Andrew Johnson en 1868 et Bill Clinton en 1998, ont vécu une mise en accusation (Richard Nixon, empêtré dans le scandale du Watergate, avait préféré démissionner en 1974). Ce qui pose la question de la suite de la procédure, aux contours flous.

Concrètement,  il revient désormais au Sénat, à majorité républicaine, d'organiser son procès, sans doute dès janvier, une fois qu'un groupe d'élus démocrates de la Chambre des représentants aura transmis en main propre l'acte d'accusation du Président. Les élus de la Chambre, tenus, eux, de jouer le rôle de procureurs, liront les deux chefs retenus contre le milliardaire républicain : "abus de pouvoir" et "entrave à la bonne marche du Congrès". Drapé dans sa toge noire, le président de la Cour suprême des Etats-Unis, John Roberts, jurera ensuite sur la Bible de "rendre la justice de manière impartiale", avant les prestations des 100 sénateurs appelés à jouer à la fois le rôle de juges et de jurés. Voilà pour la théorie.

Flou juridique

Plusieurs questions pratiques, toutefois, demeurent en suspens, en premier lieu desquelles la façon dont les deux chambres coopéreront pour la suite de la procédure. Nancy Pelosi, la patronne des démocrates au Congrès, a ainsi laissé entendre qu'elle pourrait ne pas transmettre les articles d'accusation au Sénat tant qu'elle n'aurait pas obtenu de garanties d'impartialité de sa part, ce qui déclencherait une nouvelle bataille politique entre les deux partis, et donc un possible ralentissement du calendrier. "C'était notre intention", a-t-elle confirmé en conférence de presse. Avant, tout de même, de laisser planer le mystère : "Mais nous verrons ce qui se passe."

D'ailleurs, même lorsque le procès aura débuté, la question du calendrier continuera de se poser. Lors de ceux des présidents démocrates Andrew Johnson et Bill Clinton, il avait fallu une poignée de semaines au Sénat, dans les deux cas à majorité démocrate, pour les acquitter. Ce qui pourrait bien se reproduire avec le républicain Donald Trump. Mais, dans les textes, rien n'oblige le Sénat à suivre le même modus operandi. En matière de destitution, la Constitution américaine est très succincte : elle confie à la Chambre des représentants le soin de mener l'enquête et de mettre le chef de l'Etat en accusation en cas de "trahison, corruption ou autres crimes et délits sérieux", et au Sénat de le juger à une majorité des deux tiers lors d'un procès présidé par le chef de la Cour suprême. Pour le reste, le Sénat a toute latitude sur la durée et la modalité des débats. 

Je ne serai pas impartial.
Mitch McConnell, leader de la majorité républicaine au Sénat

Ainsi, il est intéressant de noter que, durant le procès de Bill Clinton, les deux parties étaient parvenues à se mettre d'accord sur des règles claires : des audiences publiques tous les jours de 13h à 18h, pour laisser la matinée aux autres missions du Sénat, des questions posées par écrit et lues par le président de la Cour suprême, trois jours pour les arguments de l'accusation, trois jours pour la défense, des débats à huis clos sur les questions de procédure... Or, le climat est aujourd'hui beaucoup plus tendu qu'il y a 21 ans et la perspective d'une entente entre les deux camps paraît fort illusoire.

Le leader de la majorité républicaine Mitch McConnell a même avoué sans fard qu'il se coordonnait "en tous points" avec la Maison Blanche, qui semble hésiter entre un procès court sans témoin et l'envie de saisir cette opportunité pour attaquer les rivaux de Donald Trump. "Je ne serai pas impartial", a-t-il aussi publiquement ajouté, corroborant l'hypothèse d'un nouveau bras de fer à venir, et actant la quasi impossibilité de la destitution. Devan un tribunal d'avance acquis à sa cause, le Président, actuellement en campagne pour sa réélection, devrait cependant bien consentir à faire face à ses accusateurs. Ou plutôt à utiliser cette procédure pour galvaniser sa base.


Hamza HIZZIR

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