Biélorussie : comment le pouvoir tente de museler les figures de la contestation

Publié le 9 septembre 2020 à 13h21, mis à jour le 9 septembre 2020 à 13h29
Biélorussie : comment le pouvoir tente de museler les figures de la contestation

MANIFESTATIONS - Un mois après le début d'un mouvement de contestation inédit visant le président Alexandre Loukachenko, ce dernier multiplie les tentatives d'intimidation auprès de ses opposants.

Réduire au silence la poignée d'opposants qui, depuis désormais plus d'un mois, tente de faire plier son pouvoir. Telle est la stratégie en Biélorussie du président Alexandre Loukachenko, aux commandes depuis 1994. 

Dernière tentative d'intimidation en date ? Celle exercée sur Maxime Znak. Ce juriste de 39 ans a été interpellé mercredi par des hommes masqués et en civil, selon le service de presse de son groupe d'opposition qui a publié une photo des faits. 

Quelques heures auparavant, c'est Maria Kolesnikova, elle aussi en première ligne de la contestation, qui avait fait les frais de la répression des autorités. Emmenée de force à la frontière entre la Biélorussie et l'Ukraine dans la nuit de lundi à mardi, cette femme de 38 ans s'est extirpée par la fenêtre de la voiture avant de se diriger vers la frontière biélorusse, où elle a été arrêtée. L'opposante a "déchiré son passeport", ont témoigné ses alliés mardi, pour faire échouer cette tentative d'exil forcé. En vain. Finalement, Minsk a reconnu ce mercredi son arrestation, mais a affirmé qu'elle avait été jetée dans les mains des forces de l'ordre par... ses camarades.

Des opposants exilés à l'étranger

En musclant sa répression vis-à-vis de Maria Kolesnikova et Maxime Znak, le président Loukachenko tente de museler le dernier carré d'opposants à même de le faire chuter. Maria Koleshnikova est en effet la dernière des trois figures féminines de l'opposition durant la campagne présidentielle à demeurer dans le pays. Les deux autres, la candidate Svetlana Tikhanovskaïa et Veronika Tsepkalo, se sont exilées à l'étranger.

Anton Rodnenkov et Ivan Kravtsov, présents à ses côtés à la frontière, ont fait, eux, le choix de quitter leur pays. Les deux hommes ont raconté avoir été emmenés de force lundi matin par des inconnus et transportés dans diverses administrations, menottés et un sac sur la tête. Interrogés et menacés de poursuites judiciaires, ils se sont finalement vu proposer de quitter le pays. "Ce qui les intéressait, c'était le transport de Maria Kolesnikova hors des frontières. Ils l'expliquaient par la nécessité d'une désescalade de la situation" en Biélorussie, a expliqué Ivan Kravtsov. Mark Znak, lui, est un des sept membres de la direction du Conseil de coordination, formé pour obtenir une transition au pouvoir et négocier le départ du président Alexandre Loukachenko. L'avocat et la prix Nobel de littérature Svetlana Alexievitch étaient, à ce jour, les derniers dirigeants de ce présidium encore en liberté en Biélorussie.

Combien de temps le juriste va-t-il rester en détention ? Pour l'heure, la police et les services spéciaux (KGB) n'ont pas confirmé son arrestation. Seule certitude : celle-ci intervient un mois jour pour jour après la présidentielle qui a déclenché un mouvement de contestation sans précédent dans le pays dénonçant la réélection frauduleuse de M. Loukachenko, aux commandes depuis 1994, face à l'opposante Svetlana Tikhanovskaïa, novice en politique. Cette dernière, qui s'est exilée sous la menace en Lituanie dans la foulée du scrutin du 9 août, a réclamé sa "libération sans délai". Pas sûr que Loukachenko donne suite à ce plaidoyer, lui qui réclame le soutien russe face à la mobilisation de foules jamais vues depuis son arrivée au pouvoir en 1994. Il s'est d'ailleurs entretenu ces jours-ci avec le président russe Vladimir Poutine, qui a promis d'envoyer des troupes si la contestation devait dégénérer en violences. 


Thomas GUIEN

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