RÉCHAUFFEMENT CLIMATIQUE - Après dix-sept ans de travaux, le système Moïse qui vise à sauver Venise des fameuses acqua alta a été testé, vendredi 10 juillet dans la cité lacustre. Ce dispositif vise à réguler les marées dans la lagune de Venise. On vous explique comment ça marche.
Venise est menacée par la montée des eaux et régulièrement la cible de l'"caqua alta", une marée haute anormale inondant des dizaines de boutiques et hôtels ainsi que la fameuse place Saint-Marc. En novembre dernier, la cité lacustre a été le théâtre une marée de ce type, atteignant par endroit, près de deux mètres. Ce fut la pire "aqua alta" que la ville ait connue depuis plus de 50 ans.
Un phénomène accentué d'années en années par le réchauffement climatique qui fait monter les eaux et la surfréquentation touristique, accompagnée de son inévitable développement urbain, fragilise les terres de Venise. De nombreux responsables, dont le maire de Venise, avait alors appelé à mettre en service "au plus vite" le projet de digues MOSE, (Moïse en italien, Module expérimental électromagnétique) un système censé limiter l'entrée des eaux dans la ville. Il a été testé pour la première fois, en situation réelle, ce week-end. En quoi consiste ce système et est-il réellement efficace ? Voici quelques éléments de réponses.
Un système de digues mobiles qui se relèvent en trente minutes
Le projet MOSE est un ambitieux système d'ingénierie complexe composé de 78 digues mobiles placées stratégiquement aux portes de l'Adriatique, aux points d'entrée de la lagune : Lido, Malamocco et Chioggia,. Ces digues doivent pouvoir se relever en trente minutes, et une barrière capable de résister à une montée des eaux jusqu'à trois mètres au-dessus de la normale. En d'autres termes, ces caissons doivent permettre "d'imperméabiliser" la ville, lorsqu'il y a une montée brutale des eaux.
L'idée du MOSE a germé dans les années 1970, après le traumatisme infligé par l'"acqua alta" de 1966, qui avait inondé et paralysé la ville tout entière pendant plus d'une semaine. Élaboré dans les années 1980, le chantier a démarré en 2003 et il aurait dû être prêt il y a déjà trois ans. Mais il a pris du retard à cause de scandales de corruption et de surcoûts. Il a déjà coûté sept milliards d'euros, contre deux initialement prévus.
"Nous devons faire en sorte qu'il y ait cet instrument de sécurité pour le prochain automne-hiver", a déclaré le chef du gouvernement italien Giuseppe Conte, venu à Venise pour assister à une démonstration. Ce premier test, effectué vendredi 10 juillet a été couronné de succès mais les critiques émergent malgré tout. Est-il suffisant face au réchauffement climatique et à l'élévation du niveau de la mer annoncée pour la fin du siècle ?
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En novembre dernier, lors de la grande crue qui avait endommagé de nombreux édifices ancestraux, des militants s'étaient insurgé contre ce qu'ils estimaient être le résultat d'une inaction du gouvernement. Dans leur viseur, le projet Mose, justement. "Le risque pour Venise est que ce système imaginé il y a des décennies ne réponde pas aux marées extrêmes comme celle qu'on vient de vivre", déclarait Andreina Zitelli, qui a fait partie de la commission nationale d'évaluation du MOSE. "C'est un gâchis d'argent parce qu'il fallait faire des interventions diffuses. Le système lagunaire étant complexe, on ne peut pas apporter une réponse unique", expliquait cette Vénitienne de 76 ans.