Craignant pour sa vie, le dernier juif d'Afghanistan a quitté le pays

T.G
Publié le 10 septembre 2021 à 6h32
Dernier juif d'afghanistan
Dernier juif d'afghanistan - Source : WAKIL KOHSAR / AFP

ÉVACUATION - Le dernier fidèle de l'unique synagogue de Kaboul, Zebulon Simentov, est parti vers "un pays voisin" à cause de l'insécurité en Afghanistan, et notamment la menace du groupe État islamique dans la province du Khorasan (EIPK).

La chute de Kaboul, désormais aux mains des talibans, ne l'avait pas empêché de continuer ses prières quotidiennes. Il avait même prévu de rester malgré la victoire des "étudiants en religion". Zebulon Simentov, dernier membre connu de la communauté juive d'Afghanistan, a fini par quitter le pays. Une opération de cinq jours lui a permis d'être conduit en lieu sûr, "dans un pays voisin", a déclaré jeudi 9 septembre Moti Kahana, un homme d'affaires et philanthrope israélien qui a organisé son évasion.

L'homme était une figure connue en Afghanistan et à travers le monde judaïque, notamment parce qu'il est resté à Kaboul lors du premier règne taliban, entre 1996 et 2001. Dans une interview de 2010 à la chaîne américaine CNN, il racontait avoir été arrêté plusieurs fois par les insurgés alors au pouvoir, et battu en détention. Cette fois-ci, malgré l'offensive des talibans et l'organisation d'un pont aérien à l'aéroport de Kaboul jusqu'au 31 août, le fidèle n'avait apparemment pas l'intention de partir. Ce dernier refusait d’accorder le "guet" (acte de divorce rabbinique) à son ex-femme, partie vivre en Israël avec leur fils. Une raison qui l'empêchait de pouvoir entrer sur le territoire de l'Etat hébreu.

Des voisins et des proches l'auraient finalement convaincu de ne pas rester pour des raisons de sécurité. Outre les talibans, qui tentent de soigner leur image internationale depuis leur prise de pouvoir, il est à craindre que le groupe État islamique dans la province du Khorasan (EIPK) s'en prenne à lui. Ces supplétifs de Daech ont attiré l'attention ces dernières semaines en revendiquant un attentat à la voiture piégé et des tirs sur l'aéroport Hamid-Karzai de Kaboul. Le départ définitif des forces étrangères, acté depuis le 31 août, l'aurait aussi convaincu de fuir à l'étranger, emmenant avec lui une trentaine de personnes, dont certains issus de l'ethnie hazara, cible des talibans par le passé.

Après un voyage en camionnettes à travers les montagnes afghanes, passant notamment par des check-points tenus par des combattants talibans, avec lesquels avaient été négociés ce départ, Zebulon Simentov serait bien arrivé à destination mercredi 8 septembre, jour de la fête de Roch hachana, le nouvel an juif. "Au premier passage frontalier, on leur a dit qu'ils ne pouvaient pas entrer en groupe de 31, seules trois personnes pouvaient traverser à la fois, a raconté Moti Kahana. Simentov a refusé que le groupe soit divisé et ils ont donc dû conduire 14 heures jusqu'au prochain poste frontière." Selon le businessman, il est possible que Zebulon Simentov se rende chez sa famille à New York, aux États-Unis, pour la fête de Yom Kippour, mi-septembre.

Cette fuite met fin à une longue présence juive en Afghanistan, qui remonte à près de 2 500 ans selon les historiens. La communauté juive en Afghanistan, qui aurait même atteint 40 000 personnes au milieu du XIXe siècle selon l'association American-Israeli Cooperative Enterprise, avait commencé à décliner vers 1870 avec l'adoption de mesures antijuives. 


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