Crise en Ukraine : les vidéos des leaders séparatistes pro-russes au cœur d'une large mise en scène ?

Ce vendredi 18 février, les médias ont largement relayé l'annonce par plusieurs dirigeants séparatistes pro-russes d'évacuations de civils vers la Russie. La raison invoquée ? Un danger majeur pour les populations, en raison d'une recrudescence des violences et d'une escalade des tensions. 

Les deux leaders qui ont évoqué ces évacuations, basés respectivement dans la région de Donetsek et Lougansk, se sont exprimés par le biais de vidéos diffusées via leurs comptes officiels sur le réseau social Telegram. Des documents qui éveillent aujourd'hui d'importants soupçons : plusieurs indices portent à croire que les images auraient été tournées deux jours plus tôt, le 16 février, ce qui accréditerait la thèse d'une opération mise en scène laissant planer l'ombre de Moscou.

Les deux vidéos au cœur de la controverse ont été postées le 18 février par le dirigeant de la "République" séparatiste pro-russe de Donetsk Denis Pouchiline, ainsi que par son homologue Léonid Passetchnik, leader de la "République populaire" de Lougansk. Il est chaque fois fait mention d'une "augmentation spectaculaire" des violences imputée à l'armée ukrainienne, qui mettraient en danger les populations. Nécessitant, de fait, leur évacuation vers la Russie voisine. 

Ces deux séquences, qui s'inscrivent dans le cadre d'un véritable bras de fer diplomatique, relèvent-elles d'une opération de propagande, voire d'une forme de coup monté ? En cette fin de semaine, peu après la mise en ligne des vidéos, des doutes ont commencé à surgir et divers observateurs ont jugé utile d'étudier en détails les fichiers partagés en ligne. Des internautes ukrainiens ainsi que des enquêteurs de la plateforme d'investigation Bellingcat ont attiré l'attention sur les métadonnées des vidéos.

Sur le réseau social (russe) Telegram, ces données initialement rattachées aux fichiers ne sont pas automatiquement supprimées, ce qui permet aux utilisateurs qui les téléchargent d'y avoir accès. Leur analyse a révélé des détails troublants : alors que ces prises de parole déclarant une évacuation des civils sont censées intervenir en réaction immédiate à une escalade des tensions, elles auraient été tournées en réalité deux jours plus tôt, le 16 février. TF1info a pu télécharger les deux vidéos, directement depuis les comptes des dirigeants séparatistes, et confirme que la date de création des fichiers indiquée correspond au 16 février.

Le journaliste indépendant Vincent Glad a par ailleurs souligné que des comptes ukrainiens "ont repéré que la vidéo [de Passetchnik, ndlr] aurait été stockée dans un dossier intitulé 'Mongoose Throw' (lancer de mangouste)". Cette dénomination, qui évoque une forme de nom de code, suscite diverses interprétations. "Une référence à l'Operation Mongoose, célèbre mission secrète de la CIA pour faire tomber Fidel Castro ?", interroge Vincent Glad. En toile de fond se dessine une potentielle manipulation, laissant suggérer une action de Moscou pour tenter de justifier une intervention dans le Donbass. Le tout présenté comme une réponse aux risques qui seraient encourus par les populations. Cette hypothèse, que ces indices tendent à rendre crédible, se révèle toutefois délicate à confirmer pour l'heure de manière indubitable.

L'Élysée, vendredi soir, a été interrogé au sujet de cette préparation des vidéos dès le 16 février. "Nous avons reçu l'information, mais nous ne l'avons pas analysé à l'heure qu'il est", a réagi la présidence, sans plus de commentaires.

Vous souhaitez nous poser des questions ou nous soumettre une information qui ne vous paraît pas fiable ? N'hésitez pas à nous écrire à l'adresse lesverificateurs@tf1.fr. Retrouvez-nous également sur Twitter : notre équipe y est présente derrière le compte @verif_TF1LCI.