JUSTICE – De nombreux internautes réclament que justice soit rendue suite au décès d'un étudiant en Belgique fin 2018 à l'issue d'un bizutage. Leurs messages indiquent notamment que les auteurs présumés n'ont été punis qu'avec la rédaction d'une dissertation. Une affaire en réalité bien plus compliquée.
L'histoire de Sanda Dia, méconnue en France, a été largement commentée en Belgique avant de faire l'objet ces derniers jours de centaines de publications sur les réseaux sociaux. Décédé en décembre 2018 à la suite d'un violent bizutage, le jeune étudiant de 20 ans est revenu au cœur de l'actualité au moment où un collectif demande que justice soit rendue et que soient jugés les auteurs présumés des sévices qui ont conduit à son décès.
Parmi les messages qui se multiplient en ligne, de nombreux dénoncent des sanctions beaucoup trop clémentes. Les jeunes qui ont organisé son bizutage auraient, si l'on en croit les internautes indignés, été seulement condamnés "à devoir écrire une dissertation". Une indulgence peu surprenante, "vu que leurs parents sont des magistrats, des avocats politiciens, des personnes qui sont haut placées dans la société", peut-on également lire. À l'heure qu'il est, parler d'une faillite de la justice semble pour autant précipité, des procédures étant toujours en cours.
Un jeune étudiant voulait rejoindre un cercle d’ami de 17 personnes, pour l’intégrer ils lui ont fait boire des litres d’alcool, manger des souris vivantes, des poissons vivant etc, et il en est mort. Les 17 ont été condamné à devoir écrire une dissertation 👍🏽 #JusticeForSanda — Bilel 🇲🇦 (@Mercaall) September 3, 2020
Des sanctions critiquées
Le 4 décembre 2018, trois étudiants parmi lesquels Sanda Dia ont participé à une forme de "baptême", et ce en vue d'intégrer un cercle d'étudiants nommé Reuzegom, exclusivement masculin. "Après avoir bu de grandes quantités d’alcool, les trois 'bleus' ont été amenés en voiture à Vorselaar, à environ 50 kilomètres de Louvain", résume la RTBF. Au cours de la soirée, les membres de ce collectif leur auraient demandé "de rester dans un trou rempli de glaçons. Les étudiants auraient dû boire de l’huile de poisson, ce qui aurait provoqué une augmentation anormale de leur taux de sel dans le sang. Les trois étudiants ont ensuite été admis à l’hôpital UZA à Edegem". C'est là que Sanda Dia est décédé, quelques heures plus tard.
Suite à la mort du jeune homme, le cercle étudiant a été dissout et ses 18 membres sanctionnés. L'université de Louvain leur a ainsi imposé 30 heures de travaux d’intérêt général et l'écriture d'un essai sur les rituels de baptême. C'est à la rédaction de ce texte que se réfèrent les publications évoquant aujourd'hui une "dissertation". Des sanctions perçues comme très clémentes, puisque des professeurs de l'établissement avaient publié une lettre ouverte pour dénoncer le "signal" envoyé aux "étudiants actuels et futurs". Ce à quoi le recteur a répondu par la présomption d'innocence et le souhait de voir s'exercer la justice. Les auteurs présumés ont pu poursuivre leurs études et certains, à l'issue, être diplômés.
Le site belge DH explique que si l'affaire "refait surface" ces dernières semaines, cela s'explique par le fait que "la responsabilité des 18 membres du cercle étudiant Reuzegom va être discutée lors d'un procès". En effet, "ils sont tous cités à comparaître dans le cadre de l'enquête pour homicide involontaire, traitement dégradant et administration de substances nuisibles, qui a été ouverte suite au décès de Sanda Dia". Le 4 septembre, les réseaux sociaux se sont animés à dessein : c'est précisément à cette date qu'un éventuel renvoi devant le tribunal correctionnel devait être décidé.
Tandis que le collectif mobilisé pour soutenir la famille et les amis de Sanda Dia se mobilisait, le renvoi a finalement été repoussé, note la Voix du Nord. Un nouveau report dans un dossier qui a déjà été retardé par le passé. La RTBF soulignait en effet que "l’enquête sur la mort du jeune étudiant, initialement aux mains du parquet d’Anvers, avait été transférée à celui du Limbourg car il est apparu au fil de l’enquête qu’un juge du tribunal de première instance d’Anvers avait un lien familial avec un membre du cercle étudiant impliqué".
Des suspects protégés par leur statut social ?
Si cette affaire a ému la Belgique néerlandophone, elle s'étend désormais hors des frontières de la Flandre. Un fait divers tragique en marge de laquelle se joue aussi une forme de lutte des classes. Dans son récit de l'affaire, le quotidien néerlandais Volkskrant explique que le père de Sanda Dia, ouvrier sur une chaîne de montage automobile, voyait d'un bon œil le fait que son fils puisse se constituer un réseau. Intégrer un tel cercle d'étudiants, au sein duquel "il y avait des garçons qui allaient devenir avocats, juges, politiciens, notaires ou médecins, tout comme leurs parents", était susceptible d'aider le jeune homme dans sa future carrière. "Le père de Sanda […] pensait qu'il pourrait aller plus loin s'il avait les bonnes relations", relate le journal.
Les suspects, que l'on présente comme originaires de milieux sociaux très favorisés, ont-ils bénéficié d'une clémence particulière ? Des blogueurs réclamant que justice soit rendue pour l'étudiant décédé le suggèrent, en dénonçant "une politique de classe et de race qui se manifeste aussi dans la justice". L'avocat du père de Sanda Dia dénonce quant à lui une "élite flamande" qui "resserre ses rangs" dans la tourmente.
La presse a notamment raconté qu'à la suite des faits, "les lieux où le baptême a eu lieu ont été nettoyés", tandis que les membres de l'association s'appliquaient à "effacer toutes les photos et vidéos du bizutage". Par la suite, "après consultation des parents, il a été décidé que les dix-huit personnes concernées devaient devenir invisibles en ligne". Tous les comptes des étudiants incriminés ont alors été supprimés des réseaux sociaux. Des actions conjointes perçues par certains comme l'illustration d'une solidarité entre membre d'une élite intellectuelle et économique, et qui seront logiquement étudiées par la justice.
En résumé, il apparaît trompeur d'affirmer que la mort de Sanda Dia n'a entraîné pour les étudiants qui participaient à son bizutage qu'une sanction mineure consistant à réaliser une dissertation. Si la réponse de leur université a été jugée trop indulgente (y compris par de nombreux professeurs), il est important de rappeler que des procédures judiciaires sont toujours en cours et qu'elles pourraient entraîner des renvois devant la justice ainsi que d'éventuelles condamnations.
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