A LA LOUPE - Le président américain s'est vanté sur les réseaux sociaux d'avoir obtenu que les Etats membres de l'Otan paient chaque année 530 milliards de dollars supplémentaires, tandis que les Etats-Unis verront leurs contributions baisser. Une somme bien loin de la réalité.
Créée en avril 1949, l'Otan a célébré ses 70 années d'existence lors d'un sommet, organisé non loin de Londres, les 3 et 4 décembre. Chefs d’Etats et de gouvernements des pays membres de l’Alliance se sont réunis pour l'occasion. Et Donald Trump en a profité pour fustiger - une fois de plus - le manque d'efforts financiers de certains pays, allant jusqu'à traiter de "grands délinquants" les Etats dont les dépenses en matière de défense sont inférieures à 1% de leur PIB. Selon lui, les Etats-Unis portent l'essentiel du financement de cette organisation transnationale et il compte bien faire bouger les lignes.
De retour aux Etats-Unis, il s'est vanté d'avoir obtenu des engagements allant dans ce sens. "J'ai réussi à faire en sorte que les pays de l'Otan paient 530 milliards de dollars par an en plus, et les Etats-Unis moins" a-t-il assuré.
Le correspondant du New York Times à la Maison Blanche a rapidement dénoncé ces propos : "Trump n'a pas réussi à faire en sorte que les pays de l'Otan paient 530 milliards de plus par an. Il en est très loin. D'ici 2024, les pays de l'Otan auront dépensé - en cumulé - 400 milliards de plus sur 8 ans, autrement dit une moyenne de 50 milliards par an. Et cette augmentation a commencé avant Trump".
400 milliards de hausse sur huit ans
A quelques jours du sommet de Londres, le secrétaire général de l'Otan avait en effet détaillé les hausses de dépenses de la part des alliés européens et du Canada, en termes de défense. Jens Stolenberg se félicitait d'une augmentation de 4,6% en 2019, soulignant qu'il s'agissait de la cinquième année de hausse consécutive, comme le montre le tableau ci-dessous. Cette tendance a donc débuté bien avant l'arrivée de Donald Trump à la Maison Blanche.
D'ici à la fin de l'année 2020, les membres de l'Otan, hors Etats-Unis, auront donc investi 130 milliards de plus depuis 2016. Selon les dernière estimations, cette hausse cumulée des dépenses de défense devrait atteindre les 400 milliards d'ici 2024, soit sur 8 ans. "C'est un progrès sans précédent et cela renforce l'Otan", a-t-il applaudi.
Pour autant, les dépenses de chaque Etat restent très inégales. Les Etats-Unis ont ainsi un budget militaire bien plus élevé que ses alliés, comme le dévoile le graphique ci-dessous, mais cet écart est à nuancer.
D'une part, ces montants ne prennent pas en compte la taille économique du pays. En 2006, les ministre de la défense de l'Otan se sont accordés pour consacrer au moins 2% de leur PIB aux dépenses de défense, un moyen de contribuer équitablement, en fonction des moyens nationaux. La crise économique a conduit certains Etats à tailler dans leur budget militaire, mais de plus en plus d'Etats s'en rapprochent (cf. le graphique ci-dessous). Pour le moment et en dehors des Etats-Unis, seuls la Bulgarie, la Grèce, le Royaume-Uni, les pays baltes, la Roumanie et la Pologne ont franchi cette barre des 2%.
Surtout, il convient de noter qu'il s'agit là de budgets nationaux de défense et non de contributions directes à l'Otan. Les Etats-Unis notamment n'ont cessé d'augmenter leurs dépenses dans ce domaine, notamment depuis l'attentat du 11-Septembre. Cet argent peut être utilisé dans le cadre d'interventions militaires internationales qui ne s'inscrivent pas forcément dans le cadre de l'organisation. Pour l'Otan, ces budgets permettent le financement dit indirect de l'Alliance, qu'il s'agisse du déploiement de soldats dans le cadre d'une opération conjointe, de la mise à disposition de véhicules blindés, de navires ou d'hélicoptères ou encore d'un soutien médical.
Les contributions dites directes permettent quant à elles de financer "les dépenses de l'Alliance qui servent les intérêts des 29 pays membres, explique l'Otan, et qui n’incombent à aucun d’entre eux en particulier, par exemple, les dépenses relatives aux systèmes de défense aérienne ou aux systèmes de commandement et de contrôle en place à l’échelle de l'Otan."
Le budget civil, qui couvre les dépenses de fonctionnement du siège situé à Bruxelles, s'élève à près de 237 millions en 2019. Le budget militaire qui est dédié à la structure de commandement est de l'ordre de 1,4 milliard d'euros. Ces dépenses indirectes sont donc limitées et dans tous les cas, très éloignées des 530 milliards avancés par Donald Trump. C'est pourtant principalement sur ces deux budgets que le président américain a obtenu une plus grande équité.
Une meilleure répartition des dépenses de fonctionnement
Les pays contribuent depuis la fin de la guerre en fonction de leur taille économique, autrement dit le revenu national brut. Jusqu'à aujourd'hui, les Etats-Unis contribuaient ainsi à hauteur de 22,1% du budget propre à l'Otan, quand l'Allemagne payait 14,7% du total, la France et le Royaume-Uni 10,5%, l'Espagne 5,5% et la Belgique 1,9%.
A l'avenir, les Etats-Unis réduiront leur contribution à 16,35% du budget de fonctionnement. L'Allemagne a accepté de s'aligner sur ce même pourcentage. Les autres pays verront également leur contribution augmenter, par exemple de 1,9 à 2,1% pour la Belgique (l'équivalent de 3,5 millions par an). Seule la France a fait de la résistance en rejetant tout net cet accord.
Les Etats membres de l'Alliance, en dehors des Etats-Unis, participent donc davantage aux dépenses de l'Otan, qu'il s'agisse des dépenses directes ou indirectes, mais cette hausse budgétaire reste limitée et bien loin des centaines de milliards de dollars annuels avancés par Donald Trump.
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