Ukraine : Macron, Poutine, Stoltenberg, Pouchiline... les 10 acteurs-clés de la crise

Publié le 20 février 2022 à 19h19

Source : JT 13h WE

Emmanuel Macron s'est entretenu ce dimanche avec les présidents ukrainien et russe.
Le Kremlin semble adhérer aux propositions de pourparlers du président français.
Alors que les déclarations se multiplient de part et d'autre, tour d'horizon des positions des dix principales figures impliquées dans cette crise.

Paris joue la carte de la diplomatie tous azimuts, Washington prophétise une invasion inéluctable, les séparatistes accusent les Ukrainiens d'agression, Kiev appelle l'Otan à ne pas fléchir... et Vladimir Poutine reste mystérieux sur ses intentions. La reprise des combats au Donbass et le faux retrait russe des frontières ont exacerbé les positions de tous les acteurs de la crise qui se joue aux frontières de l'Ukraine, et dans sa province en partie prorusse du Donbass. Nous avons listé les 10 figures les plus centrales de ce qui pourrait devenir un conflit majeur, et résumé leurs positions actuelles.

Vladimir Poutine, l'indéchiffrable

L'incontestable maître d'un jeu qu'il a lui-même créé. Toutes les parties prenantes du conflit qui se dessine ont estimé, à un moment ou à un autre de la crise, que c'est Vladimir Poutine seul qui déciderait de la suite de l'histoire en train de s'écrire. Joe Biden s'est même dit vendredi "convaincu" que le maître du Kremlin avait pris "la décision" d'envahir l'Ukraine, démontrant que l'issue de la crise ne dépend plus que de cela. Les précédents les plus inquiétants ne manquent pas, du morcèlement de la Géorgie qu'il avait orchestré en 2008, à l'annexion de la Crimée en 2014, en passant par le soutien aux séparatistes du Donbass dans un conflit qui perdure depuis 8 ans.

Après avoir supervisé lui-même les manœuvres militaires en Biélorussie, et fait annoncer ce dimanche qu'elles seraient finalement prolongées, le président russe a finalement semblé entrouvrir la porte à des discussions directes avec l'Ukraine, après son entretien téléphonique avec Emmanuel Macron. Des pourparlers auront lieu à plusieurs niveaux dès les prochains jours. Sergueï Lavrov, l'inoxydable chef de la diplomatie russe, qu'il dirige depuis 18 ans, s'entretiendra avec son homologue français dès lundi, notamment sur la question des "garanties de sécurité" qu'exige Moscou.

Denis Pouchiline, le maître de Donetsk

Quadragénaire à la barbe bien taillée, sur un visage aux faux airs poupins, Denis Pouchiline est depuis 2018, le "président" de la république autoproclamée de Donetsk, une enclave séparatiste prorusse au cœur du Donbass ukrainien. Entré tardivement en politique, après s'être financé grâce un système pyramidal trouble, et élu lors d'un scrutin dénoncé par les observateurs internationaux, Denis Pouchiline est aussi membre depuis l'année dernière du parti de Vladimir Poutine, Russie Unie. Il demande la reconnaissance de son État, et son rattachement à la fédération  de Russie, de même que son voisin Léonid Passetchnik, qui dirige de son côté la "république" séparatiste de Lougansk.

Les deux hommes ont chacun diffusé vendredi une vidéo, appelant solennellement à l'évacuation des civils les plus fragiles vers la Russie, à cause de bombardements dont ils accusent l'Ukraine. Lesdites vidéos auraient cependant été enregistrées avant même la flambée des actes militaires sur la ligne de front, dont la plupart des observateurs estiment d'ailleurs qu'ils sont jusqu'ici le fait des seuls séparatistes.

Volodymyr Zelensky, le tenace

Son plaidoyer lors de la Conférence de Munich sur la sécurité n'est pas passé inaperçu. Le président ukrainien, un ancien acteur qui semble avoir pris la mesure du rôle, a appelé les Occidentaux à ne pas fléchir devant Poutine, et à soutenir le "bouclier de l'Europe" que constituerait son pays. Appelé par Emmanuel Macron juste après l'entretien crucial de celui-ci avec Vladimir Poutine ce dimanche, Volodymyr Zelensky s'est dit prêt aux pourparlers directs que semble enfin accepter son homologue russe. 

Joe Biden, l'inflexible

Joe Biden n'en démord pas : il est "convaincu" que Vladimir Poutine a déjà pris "la décision" d'envahir l'Ukraine. Sa voix à l'étranger est sur la même ligne : le secrétaire d'Etat Antony Blinken, de longue date un homme du premier cercle des proches de Joe Biden. Celui-ci s'est démultiplié sur les plateaux de télévision américains ce dimanche, martelant que la Russie était "sur le point" d'envahir l'Ukraine... tout en assurant qu'une issue diplomatique était possible "jusqu'au dernier moment"

Toute la tactique américaine de ces dernières semaines est concentrée dans ce double message : exposer les plans de l'adversaire, le menacer de sanctions "sans précédent", et lui laisser une issue diplomatique. Antony Blinken a d'aileurs assuré que Joe Biden était même prêt à rencontrer Vladimir Poutine "à tout moment, qu'importe le format si cela permet d'éviter 

une guerre".

Emmanuel Macron, le pragmatique

Le président français continue de s'activer sur le front diplomatique : son appel à Vladimir Poutine ce dimanche semble avoir conduit le président russe à s'ouvrir à une nouvelle séquence de négociations directes avec l'Ukraine, alors que les heurts sur le terrain avaient atteint un niveau maximal depuis la reprise des hostilités. L'Élysée se garde d'affecter une posture triomphaliste pour ce qui semble pourtant une véritable percée : l'illisibilité des projets du président russe invite à la prudence, et l'échéance des élections présidentielles se rapproche pour un Emmanuel Macron qui pourrait difficilement déclarer sa candidature en pleine crise internationale. 

Loukachenko, l'ami fidèle

L'indéboulonnable président biélorusse a eu l'occasion une nouvelle fois de démontrer sa fidélité à son homologue russe. Théâtre d'exercices militaires à grande échelle, qui devaient s'achever ce dimanche mais viennent d'être prolongés, la Biélorussie fournirait surtout une base arrière cruciale pour l'armée russe dans ce conflit, en la rapprochant par le nord de Kiev, la capitale ukrainienne. Bousculé par des manifestations sans précédent en 2020, l'autocrate Alexandre Loukachenko se maintient au pouvoir depuis 18 ans, alternant bravades et preuves d'allégeance à l'égard de Moscou. 

Poutine et Loukachenko ont supervisé eux-mêmes les essais de missiles russes balistiques et de longue portée ce samedi, une provocation explicite, à destination de l'Ukraine comme des voisins européens de la Biélorussie, que sont la Pologne et les Pays baltes. Au cours de son entretien téléphonique avec Emmanuel Macron, le président russe aurait assuré, selon l'Elysée, que ces exercices ont vocation à prendre fin, et l'équipement militaire russe à quitter le territoire biélorusse.

Jens Stoltenberg, le sceptique

Arrivé à la tête de l'Otan peu après l'annexion de la Crimée par Moscou en 2014, l'ancien Premier ministre norvégien Jens Stoltenberg est un ancien pacifiste, mais qui n'est pas dupe des velléités de Vladimir Poutine. C'est le premier, la semaine dernière, qui a constaté publiquement que le retrait de troupes annoncé par Moscou n'était pas vérifié sur le terrain. Jens Stoltenberg dirige l'alliance militaire qui est au cœur des préoccupations affichées par le président russe. Si Kiev n'est pas membre de l'Alliance atlantique, et que sa demande d'adhésion n'a guère évolué depuis 2008, Jens Stoltenberg avait vigoureusement rejeté, en décembre dernier, la demande d'un "véto russe" à l'entrée de l'Ukraine dans l'Otan. 

Ursula Von der Leyen, prête au pire

Seule femme de cette galerie de portraits, la présidente de la Commission européenne n'est pas en retrait dans le ballet diplomatique en cours. Elle a notamment profité de la tribune de la Conférence sur la sécurité de Munich, pour accuser Moscou de "réécrire les règles de l'ordre international", et de prévenir qu'envahir l'Ukraine pourrait coûter "un avenir prospère" à la Russie. Déterminée à mettre en place des sanctions si l'armée russe franchissait les frontières ukrainiennes, elle s'est aussi déclarée consciente du coût que celles-ci pourraient avoir en retour sur certains pays européens, notamment si l'acheminement de gaz russe devait être sacrifié.

Boris Johnson, la ferveur du converti

Dans une interview diffusée par la BBC ce dimanche, le Premier ministre britannique a affirmé que la Russie préparait "ce qui pourrait être la plus grande guerre en Europe depuis 1945", assurant même que "tous les signes montrent que le projet a en quelque sorte déjà commencé". Il par ailleurs une nouvelle fois brandi la menace de sanctions économiques contre Moscou, alors que Londres, souvent accusé d'avoir fermé les yeux sur l'afflux d'argent russe sur son sol, promet désormais des représailles significatives. "Nous allons empêcher les entreprises russes de lever des fonds sur les marchés  britanniques", a détaillé Boris Johnson, "et nous allons même, avec nos amis américains, les empêcher de faire des transactions en livres et en dollars".

Scholz, l'incertain

Olaf Scholz était à Moscou, lors de l'annonce d'un retrait de troupes russes, qui s'est avéré factice. Le nouveau chancelier allemand fut bien obligé d'y voir un signe de "désescalade", dont la réalité factuelle ne serait démentie que quelques heures plus tard. Soupçonné d'un biais prorusse par les autorités ukrainiennes, à la suite notamment du refus de Berlin de livrer des armes à Kiev est aussi à la tête d'un pays très dépendant du gaz russe, que le gazoduc Nordstream II aurait dû acheminer directement, en court-circuitant l'Ukraine. Ce weekend, sa ministre des Affaires étrangères, a pris ses distances avec les rapports alarmistes de Washington, en invitant à "ne pas présumer des décisions de Moscou".

Les dernières informations en provenance de Moscou laissent espérer une trêve diplomatique, à en croire le récit que l'Élysée a fait de l'entretien entre Emmanuel Macron et Vladimir Poutine. Le dialogue direct entre les Ukrainiens et les Russes devrait reprendre à plusieurs niveaux dès cette semaine, suspendus cependant à l'espoir d'une accalmie sur le terrain au Donbass.


Frédéric SENNEVILLE

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