Elections européennes : faut-il avoir peur du traité transatlantique ?

Publié le 19 mai 2014 à 19h28
Elections européennes : faut-il avoir peur du traité transatlantique ?

ECONOMIE – C'est l'autre enjeu de la campagne européenne. Le traité transatlantique, dont les négociations ont repris lundi entre l'Union européenne et les Etats-Unis, provoque de nombreuses polémiques. Ses opposants craignent en effet qu'il ne conduise à une remise en cause des normes européennes en termes d'environnement et de santé.

C'est l'un des thèmes phares de la campagne pour les européennes. Négocié dans le secret entre Bruxelles et Washington, le traité de libre échange transatlantique, alias TTIP (Transatlantic Trade and Investment Partnership) ou Tafta (Transatlantic Free Trade Area), suscite une opposition de plus en plus virulente de la part des ONG et de certains partis politiques. En France, le FN, les écologistes et le Parti de gauche en France ont même placé le dossier au cœur de leur campagne. La future majorité au Parlement européen aura en effet pour mission d'approuver ou non cet accord. Alors qu'un cinquième round de négociations a débuté lundi en Virginie (Etats-Unis), Metronews fait le point sur ses enjeux.

De quoi s'agit-il ?

Le "partenariat transatlantique de commerce et d'investissement" vise à faire tomber les barrières commerciales entre l'Union européenne et les Etats-Unis dans de nombreux domaines économiques. Il prévoit par exemple de supprimer les taxes douanières, comme celles qui pèsent sur des produits agricoles et alimentaires (comme le fromage, taxé à 100% par les Etats-Unis), d'harmoniser les réglementations des deux côtés de l'Atlantique et de fixer des normes communes. Les négociations, entamées officiellement à l'été 2013, sont censées aboutir en 2015. Elles rassemblent une centaine d'experts et de consultants (commerce, agriculture, transports, etc) mandatés par des grandes entreprises et les Etats.

Quels gains peut-on en attendre ?

Le Tafta ouvre un gigantesque potentiel selon ses défenseurs : en créant la plus vaste zone de libre-échange au monde, les Etats-Unis et l'Europe mettraient en commun 820 millions de consommateurs, ce qui représenterait la moitié du PIB mondial et 30% des échanges commerciaux de la planète. Une étude indépendante, commandée par Bruxelles avant le lancement des discussions en juillet 2013, avait chiffré à 90 milliards d'euros par an l'accroissement potentiel de l'économie américaine et à 120 milliards celui de l'économie de l'UE, soit entre 0,5% et 1% de la richesse de cette dernière. Un chiffre relativement faible, "beaucoup de barrières douanières étant déjà tombées" ces dernières années entre le Vieux Continent et les Etats-Unis, note Patrick Messerlin, professeur émérite à Science Po. Mais selon lui, "l'effet dynamique de l'ouverture" des deux marchés pourrait engendrer des gains biens supérieurs. Ce spécialiste du commerce international prend l'exemple de ceux que l'on pourrait attendre de la suppression de la coûteuse mise aux normes de sécurité à laquelle doivent se plier les véhicules européens pour être vendus sur le marché américain.

Pourquoi fait-il peur ?

D'abord parce que les négociations sont menées dans l'opacité la plus totale par la Commission européenne et les représentants américains. Les thèmes de discussion de ce nouveau round, comme les précédents, n'ont d'ailleurs pas été rendus publics. Outre cet aspect, les détracteurs du traité brandissent la menace d'une dérèglementation généralisée des normes sociales et environnementales européennes au profit de celles, plus flexibles, des Américains... Exploitation du gaz de schiste, pesticides, OGM, protection des données personnelles... Les doutes sont nombreux. "Demain, les multinationales pourraient forcer le gouvernement français à accepter l'importation de bœuf aux hormones ou encore le poulet à la dioxine", assure ainsi Europe Ecologie-Les Verts.

Autre point de discorde : les Américains réclament la mise en place d'un mécanisme de protection pour les entreprises qui s'estiment lésées par les pouvoirs publics. Face aux Etats souverains, les multinationales verraient ainsi leur pouvoir renforcé. Ce qui pourrait par exemple permettre à des entreprises américaines de biberons de poursuivre la France en justice pour avoir interdit le bisphénol A , selon les détracteurs du traité.
 


La rédaction de TF1info

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