Législatives en Russie : l'opposition crie à la fraude, l'UE dénonce "un climat d'intimidation"

Publié le 20 septembre 2021 à 14h26, mis à jour le 20 septembre 2021 à 17h30
Les élections législatives en Russie ont été marquées par des soupçons de fraudes massives.
Les élections législatives en Russie ont été marquées par des soupçons de fraudes massives. - Source : OLGA MALTSEVA / AFP

CONTROVERSE - Revendiquant la victoire à l'issue du scrutin, le parti du Kremlin affirme détenir la super-majorité nécessaire pour modifier la Constitution sans l'appui d'autres formations. Mais l'opposition dénonce des fraudes massives.

Un scrutin contesté qui fait jaser jusqu'à Bruxelles. Au lendemain des législatives, la communauté internationale et l'opposition russe ont dénoncé, lundi 20 septembre, des fraudes massives, le parti du Kremlin revendiquant une super-majorité des deux tiers des sièges de la chambre basse du Parlement, la Douma. 

La formation Russie unie rassemblait 49,64% des voix, selon des résultats portant sur 95,15% des bureaux de vote. Comme lors du précédent scrutin il y a cinq ans, le parti au pouvoir disposera d'au moins 315 mandats sur 450, majorité suffisante pour réformer la Constitution sans l'appui d'autres forces politiques. Le parti présidentiel devance les communistes (19,41%), malgré un score en baisse par rapport aux 54,2% et 334 sièges en 2016.

Vladimir Poutine "remercie les citoyens russes"

"Pour le président (Poutine) le plus important est bien sûr que les élections aient été concurrentielles, dans la transparence et la probité", a estimé le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, se félicitant en outre que Russie unie ait "rempli sa mission"

"J'aimerais particulièrement remercier les citoyens russes, vous remercier pour votre confiance chers amis", a de son côté affirmé Vladimir Poutine lors d'une réunion avec la cheffe de la Commission électorale diffusée à la télévision. 

"Ce sont les élections de la fraude électronique"

Un résultat contesté par l'opposition anti-Kremlin, pour l'essentiel interdite de scrutin, à l'instar d'Alexeï Navalny, emprisonné depuis son retour en janvier 2021 en Russie après un empoisonnement qu'il attribue au pouvoir en place. Les opposants à Vladimir Poutine ont signalé des bourrages d'urnes, un report suspect des résultats du vote en ligne et des observateurs du décompte chassés des bureaux de vote. 

Des soupçons de violations que le gouvernement allemand a demandé à "tirer au clair", tandis que l'Union européenne a dénoncé "un climat d'intimidation" et le manque d'observateurs internationaux. Washington, de son côté, a jugé que les Russes avaient été "empêchés d'exercer leur droit civique" aux législatives.

Le dirigeant communiste, Guennadi Ziouganov, généralement mesuré, a aussi dénoncé des falsifications et appelé Vladimir Poutine à faire cesser "cette sale cuisine". Ces élections "vont creuser les divisions croissantes de la société", a-t-il mis en garde. À Moscou, place-forte des détracteurs du Kremlin, ces derniers ont affirmé que les résultats du vote en ligne avaient été falsifiés, permettant ainsi d'inverser la tendance défavorable à Russie unie observée lors du décompte des votes papiers.

"Honte aux auteurs, initiateurs et penseurs de ce marasme", a réagi sur le site de la Radio Echo de Moscou, Sergueï Mitrokhine, candidat du petit parti libéral Iabloko et qui s'estime dupé par ce scrutin. "Ce sont les élections de la fraude électronique", a lâché sur Twitter Ivan Jdanov, un lieutenant en exil de Navalny, "il ne s'agit pas d'un dépouillement, mais d'un vol".

Une baisse "évidente" du niveau de transparence

La popularité de Russie unie, minée par les affaires et la chute du niveau de vie, était en berne avant le vote, avec une cote de confiance inférieure à 30%, selon le baromètre de l'institut étatique Vtsiom. "Les gens sains d'esprit (...) n'ont pas pu voter pour ce parti", a estimé auprès de l'AFP Dmitri Gavrilov, électeur moscovite et membre du syndicat des écrivains russes. L'ONG spécialisée Golos a qualifié d'"évidence" la baisse du "niveau de transparence" et "de clarté du système électoral". Des accusations balayées par la présidente de la Commission électorale, Ella Pamfilova, louant "la transparence" du scrutin.

Ces élections ont été précédées par des mois de répression et la mise à l'écart de la quasi-totalité des opposants anti-Poutine. Les autorités ont également forcé Apple et Google à supprimer l'application de l'équipe d'Alexeï Navalny donnant des consignes de vote. Étant donné le score en hausse des communistes, son mouvement a revendiqué le succès de leur stratégie du "vote intelligent", consistant à appeler à voter pour les candidats les mieux placés pour gêner ceux de Russie Unie.

Comment Vladimir Poutine verrouille les élections en RussieSource : JT 20h WE

Outre Russie Unie et les communistes, trois partis sont en position de siéger à la Douma : les nationalistes de LDPR (7,47%), les centristes de Russie Juste (7,42%), et un nouveau venu, le parti des "Nouvelles personnes" (5,39%). Ces formations politiques sont considérées dans la ligne du pouvoir. Le parti du Kremlin arrive en tête aussi de dizaines de scrutins régionaux, comme en Tchétchénie, où le dirigeant autoritaire Ramzan Kadyrov a récolté... 99,6% des suffrages exprimés.


La rédaction de TF1info

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