Les machines à voter sont régulièrement contestées aux États-Unis.Ce dispositif pourrait bien être à nouveau au cœur de la controverse.Alors que les "midterms" auront lieu ce mardi, les républicains les plus radicaux préparent leurs arguments.
Aux États-Unis, la "machine à voter" a plus de vingt ans. Et fait désormais partie intégrante du processus électoral. Mais après avoir été saluée comme une innovation capable de faciliter l'accès à ce droit démocratique, voilà qu'elle est au cœur de toutes les suspicions. À l'instar de Donald Trump avant eux, des dizaines de candidats conservateurs l'érigent en bête noire. Après en avoir fait la raison de la défaite du candidat républicain en 2020, ils comptent bien la désigner à nouveau comme la cause de tous leurs maux lors des "midterms", les élections législatives de mi-mandat, qui auront lieu ce mardi 8 novembre.
Réelle inquiétude ou tentative de parasiter le déroulement du scrutin ?
Avant même le scrutin de mardi, les républicains les plus radicaux aiguisent leurs arguments. Amateurs de scénarios complotistes, ces "bébés-Trump" voient en effet la machine à voter comme la cible de hackers de gauche ou en font la proie de logiciels construits à l'étranger pour favoriser le vote démocrate. Alors pour empêcher la gauche de "voler l'élection", selon l'expression utilisée par Donald Trump lors de sa défaite, on prône d'ores et déjà un retour au traditionnel comptage manuel des bulletins. Preuve que le sujet prend de l'ampleur, la candidate républicaine au poste de gouverneur de l'Arizona, Kari Lake, a engagé une action devant la justice fédérale pour que l'État écarte les machines tabulatrices, "potentiellement non sécurisées". Car selon cette ancienne présentatrice vedette d'une chaîne de télévision locale, ces technologies "privent les électeurs de leur droit d'avoir leur vote compté et enregistré selon un processus exact, vérifiable, légal et transparent". Pour rappel, ces machines sont placées sous vidéosurveillances et les bulletins sont munis de codes-barres afin de permettre à chaque électeur de traquer son vote jusqu'au dépouillement. Preuve que son argumentaire tombe à plat, cette égérie trumpiste n'a jamais fourni de preuves à la justice pour étayer ses accusations. Sa demande a été déboutée. Elle a fait appel.
Mais dans au moins deux comtés ruraux, l'Arizona et le Nevada, cette guerre menée contre le vote électronique a eu gain de cause. Ils ont tous les deux autorisé cette technique, justifiant leur décision par la défiance locale envers les "drop-box". Une décision qui n'est pas du goût de tout le monde. La branche du Nevada de l'American Civil Liberties Union, grande organisation américaine de défense des libertés, est ainsi allée jusqu'à assigner en justice le comté de Nye, dans l'espoir de le voir revenir sur sa décision de comptage manuel.
Car cette technique exige du temps. Et génère davantage d'erreurs et de délais lors du dépouillement. Une étude publiée en 2018 dans l'Election Law Journal a ainsi montré que les comptages électroniques "étaient, dans l'ensemble, davantage exacts"." Ces changements de dernière minute dans le Nevada et l'Arizona instaurent des conditions chaotiques, qui favorisent les erreurs et sapent la confiance, notamment car, c'est plus compliqué pour le public de surveiller", a donc regretté Pamela Smith, présidente de l'organisation apolitique Verified Voting, auprès de l'AFP. "Les machines de comptage fournissent exactitude, efficacité et rapidité au processus de traitement des voix", a souligné quant à lui Gregory Miller, cofondateur de l'organisation OSET Institute, une ONG qui vise à renforcer la démocratie en renforçant la confiance dans les outils de vote. Selon lui, le comptage manuel fait planer le risque d'un "chaos provoqué".
Si certaines inquiétudes - fondées ou non - peuvent expliquer cette chasse à la machine à voter, d'autres observateurs s'inquiètent d'ores et déjà de l'impact de ce discours sur le scrutin. Car, suivant l'exemple de Donald Trump qui n'a jamais reconnu sa défaite, de nombreux candidats républicains pourraient utiliser ce dispositif pour interférer dans le scrutin. "Il existe un risque grave que l'élection dégénère en des revendications incalculables de la part de 'négateurs' et de ceux qui cherchent à instiller la crainte, l'incertitude et le doute", avertit d'ores et déjà Gregory Miller. Dans un tel scénario, il est "possible que les résultats des élections de mi-mandat ne soient pas établis avant des mois."