Elle affirme avoir été dupée par son mari : Djamila, djihadiste française condamnée à la perpétuité en Irak

Publié le 17 avril 2018 à 17h08, mis à jour le 17 avril 2018 à 18h03
Elle affirme avoir été dupée par son mari : Djamila, djihadiste française condamnée à la perpétuité en Irak
Source : AFP

IRAK - Djamila Boutoutaou était jugée pour appartenance au groupe Etat islamique (EI). Tout au long de l’audience, elle n’a cessé de répéter : "c'est mon mari qui m'a obligée".

Elle a dit avoir été dupée par son mari. Mais la Cour pénale centrale de Bagdad ne lui a retenu aucune circonstance atténuante : la djihadiste française Djamila Boutoutaou a été condamnée ce mardi à la prison à perpétuité pour appartenance au groupe Etat islamique.

Tunique rose, voile marron couvrant sa tête mais laissant apparaître son visage, des fines lunettes, Djamila Boutoutaou, Française d’origine algérienne, a comparu dans un box grillagé. Tout au long de l’audience, elle a défendu sa position, et chargé son époux : "Quand je l'ai épousé, il était chanteur de rap, c'est en arrivant en Turquie que j'ai découvert que mon mari était un djihadiste", raconte-t-elle. La jeune femme de 29 ans affirme qu’une fois en Turquie, "où nous devions seulement passer une semaine de vacances", "mon mari a été contacté par un homme nommé al-Qourtoubi". "Je les entendus parler de départ vers la Syrie et l'Irak", a-t-elle complété et aussitôt, ils "m'ont enfermée dans une cave avec mes enfants", Abdallah et Khadija, a-t-elle encore raconté. "Mon mari m'avait dit 'je ne veux plus t'entendre' et il m'a forcé à rester dans cette cave".

C'est mon mari qui m'a obligée
Djamila Boutoutaou

Abdallah, dont elle n'a pas donné l'âge, a ensuite "été tué dans un bombardement", au cours de la contre-offensive des forces irakiennes pour repousser les djihadistes après leur percée fulgurante de 2014, a-t-elle dit. "Avant sa mort, je pesais 122 kilos, aujourd'hui, à cause de ma tristesse, je n'en pèse plus que 47". Avant de commencer à l'interroger, le juge a demandé à la jeune femme qui s'est présentée en arabe comme "mère au foyer née en 1989" si elle était assistée d'un avocat.

Elle a brandit une lettre qu'elle a présentée comme celle "d'un avocat français nommé Martin Pradel transmise par (sa) mère", et a indiqué ne pas savoir si son défenseur avait pu faire le déplacement. A trois reprises, les huissiers de la cour ont appelé l'avocat français par son nom. Mais personne n’a répondu. Le juge a donc assigné un avocat commis d'office qui a plaidé pour la clémence, arguant que Djamila Boutoutaou avait été forcée par son mari de rejoindre l'Etat islamique. A la question du juge : "As-tu rejoint l'Etat islamique avec ton mari Mohammed Nassereddine et tes deux enfants?", la jeune femme a répondu qu'elle l'avait fait contre son gré. "C'est mon mari qui m'a obligée", a-t-elle dit et redit.

C'est comme si j'avais passé deux ans en prison
Djamila Boutoutaou

"Pendant les dix mois que j'ai passés en Irak, je n'ai pas vu mon mari qui passait son temps hors de la maison", a-t-elle poursuivi. "Il a été tué près de Mossoul, alors nos voisins nous ont emmenés à Tal Afar, et là-bas la femme de mon voisin et moi-même, nous nous sommes rendues aux peshmergas", les combattants kurdes qui tenaient alors de larges pans du nord de la province de Ninive, où se trouvent Mossoul et Tal Afar. Là, elle a été retenue dans le camp Tel Keif, avec d'autres femmes et enfants de djihadistes. En pleurs, elle a ajouté : "C'est comme si j'avais passé deux ans en prison : dix mois chez l'EI puis plus d'un an en prison". Régulièrement, des ressortissantes étrangères sont condamnées à la perpétuité ou à la peine capitale en Irak pour avoir rejoint l'EI.

Lors de la même audience, deux Russes, tenant chacune un nourrisson dans les bras, vêtues d'une veste rose sur une robe noire et coiffées d'un foulard de la même couleur, ont également écopé d'une peine de réclusion à perpétuité. Depuis une dizaine de jours, au moins huit femmes ont été condamnées à la perpétuité, tandis que huit autres, des Turques et des Azerbaïdjanaises, ont reçu la peine capitale, selon une source judiciaire. Au cours des derniers mois, plusieurs dizaines de ressortissantes turques ont été condamnées à la peine de mort en vertu de la loi anti-terroriste irakienne. Une Allemande a également été condamnée à la peine capitale.

La loi antiterroriste irakienne permet d'inculper des personnes qui ne sont pas impliquées dans des actions violentes mais sont soupçonnées d'avoir aidé l'EI et prévoit la peine capitale pour appartenance au groupe djihadiste même pour des non-combattants. Environ 20.000 personnes ont été arrêtées au cours de la contre-offensive irakienne.


La rédaction de TF1info

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