Emmanuel Macron au Rwanda : "Je viens reconnaître nos responsabilités"

V.M
Publié le 27 mai 2021 à 11h31, mis à jour le 27 mai 2021 à 13h35

Source : TF1 Info

GÉNOCIDE DES TUTSIS - Emmanuel Macron a reconnu jeudi 27 mai la responsabilité de la France dans le génocide des Tutsis en 1994. Un acte historique, 27 ans après l'une des pires tragédies de la fin du XXe siècle.

"Me tenant avec humilité et respect, je viens reconnaître nos responsabilités." C'est avec ces mots simples qu'Emmanuel Macron a conclu un discours historique, jeudi 27 mai, marquant la reconnaissance par la France de ses responsabilités dans le génocide des Tutsis au Rwanda, qui a fait près de 800.000 victimes entre avril et juillet 1994.

"Reconnaître ce passé, notre responsabilité, est un geste sans contrepartie. Une exigence envers nous-mêmes et pour nous-mêmes", a ajouté le président de la République, qui s'exprimait depuis le Mémorial du génocide, à Gisozi. 

"La France n'a pas compris qu'en voulant faire obstacle à une guerre civile, elle restait aux côtés d'un régime génocidaire. En ignorant les alertes des plus lucides observateurs, la France endossait une responsabilité accablante dans un engrenage qui a abouti au pire, alors même qu’elle cherchait précisément à l’éviter", a déclaré Emmanuel Macron dans ce discours très attendu qui intervient après la publication, fin mars, d'un rapport d'historiens mettant gravement en cause le rôle de la France à l'époque.

"La France n'a pas été complice"

La reconnaissance de la responsabilité française s'inscrit dans la droite ligne du rapport Duclert, qui mettait en avant "les responsabilités lourdes et accablantes" de la France, alors dirigée par François Mitterrand, tout en concluant qu'elle ne pouvait être considérée comme "complice" du génocide. 

"Les tueurs qui hantaient les marais, les collines, les églises n’avaient pas le visage de la France. Elle n’a pas été complice. Le sang qui a coulé n’a pas déshonoré ses armes ni les mains de ses soldats qui ont, eux aussi, vu de leurs yeux l’innommable, pansé des blessures et étouffé leurs larmes", a ainsi relevé Emmanuel Macron lors de son discours.

"Mais la France a un rôle, une histoire et une responsabilité politique au Rwanda", a-t-il poursuivi. "Et elle a un devoir : celui de regarder l’histoire en face et de reconnaître la part de souffrance qu’elle a infligée au peuple rwandais en faisant trop longtemps prévaloir le silence sur l’examen de vérité."

"Nous avons abandonné des centaines de milliers de victimes à cet infernal huis clos", a également souligné Emmanuel Macron, pour qui "27 années de distance amère, de souffrance, se sont écoulées"

Nouveau chapitre

"Un génocide ne s’excuse pas, on vit avec", a répété Emmanuel Macron lors d'une conférence de presse commune avec son homologue rwandais Paul Kagame. "Et un pardon ne s’exige pas. Qui serais-je pour le faire ? Je nous devais une chose, c’est d’essayer de retranscrire la vérité telle qu’elle apparaît aujourd’hui. Le chemin de reconnaissance est celui qui nous permet de continuer à faire route."

Emmanuel Macron est le premier président à reconnaître explicitement la responsabilité française dans le génocide des Tutsis. Avant lui, Nicolas Sarkozy avait reconnu "une forme d'aveuglement" de la France. L'acte posé ce 27 mai est considéré comme un nouveau chapitre dans les relations entre les deux pays. Un réchauffement diplomatique symbolisé par l'annonce, par le président français, du retour d'un ambassadeur à Kigali. 

Les paroles d'Emmanuel Macron "avaient plus de valeur que des excuses, elles étaient la vérité", a salué le président Paul Kagame lors de la conférence de presse, soulignant que le travail "doit se poursuivre à deux". "Cette visite parle du futur, pas du passé. La France et le Rwanda vont beaucoup améliorer leurs relations au bénéfice de nos peuples, économiquement, politiquement et dans le domaine de la culture", a-t-il ajouté. 

"La relation entre nos deux pays ne sera jamais totalement conventionnelle", a conclu Paul Kagame. "Il y a une familiarité particulière qui résulte de la terrible et complexe histoire que nous partageons, pour le meilleur et pour le pire. Nous souhaitons créer une relation forte et durable, fondée sur des priorités qui comptent pour nous deux, France et Rwanda."


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