Enquête, zones d'ombre, conséquences... Trois questions sur le meurtre de Jamal Khashoggi

Publié le 20 octobre 2018 à 22h43, mis à jour le 20 octobre 2018 à 23h33
Enquête, zones d'ombre, conséquences... Trois questions sur le meurtre de Jamal Khashoggi

DÉCRYPTAGE - L'Arabie saoudite a admis samedi, 17 jours après la disparition du journaliste saoudien, que celui-ci avait été tué à l'intérieur du consulat du royaume à Istanbul. Un aveu qui pourrait coûter cher aux Saoudiens, surtout qu'aucune information permettant de localiser son corps n'a été communiqué.

L'Arabie saoudite passe aux aveux. Le royaume a reconnu samedi que le journaliste saoudien Jamal Khashoggi, dont la disparition le 2 octobre avait eu un retentissement mondial, avait été tué à l'intérieur de son consulat à Istanbul. Pour autant, cette volte-face ne devrait pas mettre fin au conflit diplomatique entre Ryad et les protagonistes de l'affaire : des zones d'ombre restent à élucider, en particulier le sort réservé au corps du journaliste. Des informations qui pourraient être synonymes de sanctions pour le royaume.

Où en est l'enquête ?

Après 17 jours sous pression à assurer à qui voulait l'entendre que Jamal Khashoggi était ressorti libre du consulat du royaume à Istanbul, l'Arabie Saoudite a admis ce samedi que le journaliste saoudien avait été tué à l'intérieur. L'agence de presse officielle saoudienne SPA a évoqué, citant le parquet, une "rixe". "Les discussions qui ont eu lieu entre lui et les personnes qui l'ont reçu au consulat ont débouché sur une bagarre et sur une rixe à coups de poing (...), ce qui a conduit à sa mort", a indiqué dans un communiqué le procureur général Saoud al-Mojeb. Pour témoigner de sa bonne volonté, le parquet a précisé que deux hauts responsables ont été limogés et 18 suspects ont été arrêtés, tous Saoudiens.

Quelles sont les zones d'ombre ?

Si l'Arabie Saoudite a reconnu que le Jamal Kashoggi est mort dans son ambassade, reste à savoir ce qu'est devenu le corps du journaliste. Dans son communiqué, le parquet saoudien a précisé ne pas savoir où il se trouvait. C'est pour cela que les enquêteurs turcs ont poursuivi leurs investigations ce samedi, fouillant notamment une vaste forêt proche d'Istanbul, et Ankara a annoncé qu'elle allait "tout" révéler sur le sort du journaliste. De leur côté, Berlin, Londres, Paris et l'ONU, mais aussi des ONG, ont appelé à une enquête approfondie permettant de faire toute la lumière sur cette affaire.

Quelles conséquences l'assassinat peut-il avoir pour Ryad ?

Au-delà des condamnations morales, c'est sur le front économique que la pression pourrait se faire la plus forte. En particulier de la part de l'allié américain : Donald Trump a admis jeudi que Jamal Khashoggi était très probablement mort, menaçant l'Arabie saoudite de "très graves" conséquences. Vendredi, son administration avait adressé une nouvelle mise en garde à Ryad, évoquant de possibles sanctions tout en s'inquiétant des retombées sur la relation stratégique et commerciale entre Washington et Ryad. Le chiffre évoqué par le président américain donne le tournis : le 45e président des Etats-Unis a en effet dit "préférer que nous n'utilisions pas, comme représailles, l'annulation de l'équivalent de 110 milliards de dollars de travail, ce qui veut dire 600.000 emplois", allusion à des contrats militaires passés avec l'Arabie saoudite. 

Difficile pour autant d'imaginer une rupture entre l'Arabie Saoudite et le secteur technologique américain : les Saoudiens ont lourdement investi dans la Silicon Valley, laquelle convoite les contrats liés aux projets futuristes du prince héritier Mohammed ben Salmane, alias "MBS".

Des grands noms mondiaux des affaires ont, eux aussi, pris les premiers leurs distances avec Ryad en annulant leur présence à une grande conférence économique prévue à partir du 23 octobre à Ryad. Parmi les défections de patrons, le gratin de la finance : des banques comme HSBC, Crédit Suisse, JPMorgan Chase; des fonds d'investissements comme Blackrock et Blackstone. Le signal a été donné d'abord par le retrait du Britannique Richard Branson, auquel Ryad avait promis des fonds pour ses projets de tourisme spatial. Et par l'annulation du patron du groupe de VTC Uber, dans lequel le fonds souverain saoudien a investi 3,5 milliards de dollars.


La rédaction de TF1info

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