Une journaliste russe avait défié en mars dernier le Kremlin, en brandissant une pancarte contre la guerre et la propagande en plein journal télévisé.Après avoir fui le pays, Marina Ovsiannikova accuse depuis la France Vladimir Poutine d'avoir forcé les médias à "construire une réalité parallèle" sur la guerre, et d'avoir musclé son arsenal répressif.
Quelques secondes ont suffi pour faire basculer sa vie. En mars 2022, peu de temps après le déclenchement de l'offensive russe en Ukraine, la journaliste Marina Ovsiannikova avait interrompu brièvement le journal du soir de la grande chaîne d'État russe Pervy Kanal, où elle travaillait depuis près de 20 ans, en brandissant une pancarte contre la guerre. Un geste la forçant rapidement à quitter son pays, où les critiques contre l'offensive militaire sont sévèrement punies. "C'était bien sûr une protestation suicidaire", a-t-elle reconnu sur France Inter ce mardi 2 mai. Sans pour autant regretter son choix, déplorant le fait que la Russie soit devenue à ses yeux une "forteresse assiégée".
Sur cette pancarte brandie à l'écran, "j'ai écrit 'No War' pour le public occidental et j'ai écrit en russe : 'c'est de la propagande, ici on vous ment', parce que vous ne vous rendez pas compte que Poutine a détruit pendant les 20 dernières années les médias indépendants de la Russie", a expliqué la journaliste de 44 ans. "Toutes les chaînes de télé sont sous contrôle de l'État, et on n'a qu'un flux incessant de propagande du matin au soir", a déploré l'opposante, qui publie jeudi 4 mai son livre NO WAR : L’incroyable histoire de la femme qui a osé s’opposer à Poutine (éditions L'Archipel).
"Des millions de Russes zombifiés"
"Cette propagande fonctionne sur le même modèle que celle de Goebbels (ministre de la propagande sous Hitler, NDLR) : elle parle du noir comme du blanc et du blanc comme du noir. C'est très étonnant que des millions de Russes soient devenus zombifiés par cette propagande, ils seraient prêts à tuer des gens en Ukraine", a poursuivi Marina Ovsiannikova, estimant que "la propagande est l'arme principale de Poutine".
Au sein de sa rédaction, "quand la guerre a commencé, on a eu un ordre du Kremlin de ne pas parler d'une guerre, mais d'une opération spéciale militaire pour libérer les populations pacifiques du Donbass", a-t-elle aussi dénoncé. La chaîne ne diffusait que des vidéos des autorités russes : "nous étions en train de construire une réalité parallèle", dénonce amèrement la journaliste.
Marina Ovsiannikova encourait dix ans de prison en Russie, après avoir été inculpée en août pour "diffusion de fausses informations" sur l'armée. Elle a fui clandestinement son pays début octobre, alors qu'elle était assignée à résidence, avec un bracelet électronique. "Mes amis, quand ils m'appellent depuis la Russie, blaguent en me demandant si je préfère le polonium ou le novitchok (des poisons, NDLR). Alors, je blague en leur répondant qu'il n'y aura pas assez de novitchok pour tous les dissidents qui parlent aujourd'hui contre Poutine", a-t-elle glissé, précisant tout de même respecter attentivement "des règles de sécurité".
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