Selon le président Volodymyr Zelensky, la Russie a utilisé des drones iraniens Shahed ce lundi pour attaquer plusieurs villes d'Ukraine.La Maison Blanche avait alerté, dès cet été, sur les livraisons de drones de combat par l'Iran.Voici ce qu'il faut savoir sur cette arme suicide autonome.
La guerre technologique. Depuis plusieurs années, les armées développent de nouveaux types d'appareils autonomes. Les drones ont pour avantage de diminuer l'intervention humaine et donc de baisser le nombre de victimes potentielles. D'abord utilisés pour des missions de surveillance, ils sont de plus en plus polyvalents. Désormais, certains engins peuvent être déployés pour affaiblir ou anéantir des cibles.
Kiev en colère contre l'ingérence de Téhéran
C'est le cas du Shahed 136, fabriqué par la firme iranienne HESA. Une arme que Téhéran a livrée par dizaines à la Russie, ont révélé cet été les États-Unis. Des accusations reprises par l'Ukraine. Depuis le 13 septembre, quand Kiev a abattu son premier drone iranien, environ "deux douzaines" d'entre eux ont été aperçus dans le Sud ukrainien - notamment dans le ciel d'Odessa -, pour moitié neutralisés, a assuré Natalia Goumeniouk, une porte-parole militaire.
Une présence fustigée quelques jours plus tôt par la présidence ukrainienne, par la voix de son porte-parole Serguiï Nikiforov : "Il s'agit de mesures de l'Iran allant à l'encontre de la souveraineté, de l'intégrité territoriale de notre État, ainsi qu'à l'encontre de la vie et de la santé des citoyens ukrainiens". En réaction, Kiev a réduit "significativement" la présence diplomatique de l'Iran dans le pays, et retiré son accréditation à l'ambassadeur.
Il évolue en autonomie, atteignant une cible qui est nécessairement fixe à quelques centaines de kilomètres
Pierre Grasset
Mais alors, en quoi consiste ce drone, qui nourrit peurs et fantasmes ? "Le Shahed 136 est un drone suicide d'assez grande taille (d’une longueur de 3,5 m et d’une largeur de 2,5 m , ndlr) de construction à bas coûts", explique à l'AFP Pierre Grasser chercheur français associé au centre Sirice à Paris. "Il atteint sa cible par coordonnées GPS, entrées avant son décollage. Il évolue ensuite en autonomie, volant assez bas et atteignant une cible qui est nécessairement fixe à quelques centaines de kilomètres", ajoute-t-il. À noter que, selon le constructeur, le lancement se fait à partir de rack contenant 5 drones, installé sur le pont d'un camion. Une installation qui permet flexibilité, imprévisibilité et déplacements rapides.
Une efficacité (très) limitée ?
Pour la Russie, l'emploi de ces drones suicide, mis en service en 2020, est une "mesure d'économie car elle épargne de précieux missiles de croisière, qui coûtent de 1,5 à 2 millions USD", note l'expert. "Comme tous les drones armés ou les munitions rôdeuses, ils sont très efficaces quand l'adversaire ne dispose pas de moyens pour s'en protéger ou riposter", souligne, de son côté, Jean-Christophe Noël, chercheur français à l'Institut français des relations internationales (Ifri). "Beaucoup de leur succès initial viendra du fait que c'est une arme nouvelle sur ce théâtre. Les Ukrainiens vont en capturer, les disséquer et développer des systèmes anti-drones. Avant cela, ils seront efficaces", abonde Vikram Mittal, professeur à l'académie militaire américaine de Westpoint.
Les industries de défense iraniennes ont tendance à privilégier le côté bon marché, de sorte que leurs systèmes présentent généralement un taux de défaillance assez élevé
Jeremy Binnie
Malgré tout, ils ne sont pas d'une fiabilité à toute épreuve. "Les industries de défense iraniennes ont tendance à privilégier le côté bon marché au contrôle qualité, de sorte que leurs systèmes présentent généralement un taux de défaillance assez élevé", indique Jeremy Binnie, un analyste au centre de recherche britannique Janes. "Il y a quelques bugs dans le système", ont d'ailleurs estimé des officiels américains, selon lesquels les "Russes ne sont pas satisfaits" du matériel. Par ailleurs, selon Pierre Grasser, l'un de leur "principal défaut" est de ne pouvoir "frapper que des cibles fixes". "Cela ne menace guère les troupes déployées", met-il en avant. Les Shahed "sont très difficiles à détecter car ils volent très bas. Mais ils font beaucoup de bruit, comme une tronçonneuse ou un scooter", ce qui fait qu'on les entend de loin, complète Natalia Goumeniouk. Globalement, ils mettent surtout une "pression psychologique sur la population".
De quoi douter du fait qu'ils puissent inverser la tendance sur le champ de bataille. D'ailleurs, l'utilisation massive de ces drones par la Russie traduit plutôt une forme d'impuissance de la part de Moscou. D'une part, ils sont expédiés sur des objectifs désormais hors de portée des forces terrestres, comme Odessa par exemple. D'autre part, cela démontre que "les sanctions occidentales", couplées à la crise du Covid-19, "ont causé des problèmes et [...] perturbé les chaînes d'approvisionnement", note Vikram Mittal. Les Russes "n'ont plus accès aux composantes technologiques occidentales et leurs essais pour développer en série ce type d'engins ont été infructueux", conclut Jean-Christophe Noël.
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