ÉMOI - "Acte grave", "inacceptable", la présence de douaniers français dans une gare italienne a mis le feu aux poudres, quelques jours seulement après la mort d'une femme nigériane - enceinte - expulsée de France vers l'Italie. Le gouvernement français se défend de toute action illégale, toutefois, Gérald Darmanin, le ministre de l'Action et des Comptes publics, a annoncé qu'il irait s'expliquer en Italie.
Convocation de l'ambassadeur de France à Rome, réactions politiques outrées, l'Italie est très remontée contre la France, au point que Gérald Darmanin a annoncé ce dimanche sur LCI qu'il irait s'expliquer avec les autorités italiennes. En cause : l'irruption de douaniers français dans la gare d'une commune alpine frontalière ce vendredi 30 mars. Que s'est-il passé ? La France est-elle fautive dans cette affaire ? LCI fait le point.
Que faisaient des douaniers français en Italie ?
Des douaniers français sont intervenus sur le sol italien ce vendredi soir, dans la gare de Bardonnechia, à quelques kilomètres de la frontière (région de Turin). Ils sont intervenus dans le local d'une ONG qui occupe depuis décembre un espace de cette gare pour accueillir des migrants en transit vers la France. Selon Rainbow4Africa, ces douaniers souhaitaient qu'un Nigérian, recueilli dans ses locaux, effectue un test urinaire.
Que répond la France à ces accusations ? Dans un communiqué, Gérald Darmanin confirme qu'aux alentours de 19h "une équipe de la brigade ferroviaire des douanes françaises de Modane était en contrôle sur le TGV Paris-Milan". Selon le ministre de l'Action et des Comptes publics, elle soupçonnait "un voyageur, de nationalité nigériane et résident italien, de transport in corpore de stupéfiants (convoyage dans le corps d'une personne, ndlr). En application de l'article 60 bis du code des douanes, les agents ont demandé à la personne si elle consentait à un test urinaire de détection de stupéfiants, ce qu'elle a accepté par écrit à 19h15." Si les agents sont descendus du train et se sont rendus dans le local de l'ONG, ce serait pour "réaliser ce contrôle dans des conditions de respect de la personne".
Agenti di Confine francesi sono entrati armati nell’ambulatorio gestito a Bardonecchia, costringendo un migrante a un test delle urine e intimidendo un nostro medico e i mediatori e gli avvocati @asgi_it . Le nostre associazioni condannano l’accaduto #MissioneFreedomMountain — R@inbow for Africa (@Rainbow4Africa) 30 mars 2018
Cette intervention est-elle légale ?
Selon le gouvernement français, "le local attenant à la gare de Bardonnechia", est "mis à la disposition de la douane française en application des accords du bureau à contrôles nationaux juxtaposés (BCNJ) de 1990". Il précise, dans le communiqué, que les agents ont demandé à l'ONG d'accéder aux sanitaires pour effectuer le contrôle, qui s'est finalement révélé négatif.
Une déclaration qui n'est pas tout à fait exacte selon un haut fonctionnaire en charge de l'UE. Il met en avant de récents échanges entre les douanes françaises et les chemins de fer italiens, précisant que le local de la gare de Bardonecchia n'était plus accessible, car désormais utilisé par une organisation humanitaire.
Comment la situation s'est enflammée ?
Cette affaire a rapidement pris une ampleur internationale. A la suite des remontées de l'ONG, de nombreux responsables politiques transalpins se sont indignés d'une possible ingérence française sur le territoire italien.
Le ministère des Affaires étrangères a convoqué l'ambassadeur de France à Rome pour lui intimer de s'expliquer. Malgré les explications fournies, étayées par le communiqué de Gérard Darmanin, Angelino Alfano reste très remonté. Samedi soir, il a évoqué "un acte grave, considéré totalement en dehors du cadre de la collaboration entre Etats frontaliers".
"Au lieu d'expulser des diplomates russes, il faut ici éloigner les diplomates français", avait réagi avant toutes ces explications le président de la Ligue Matteo Salvini (extrême droite), arrivé en tête des dernières législatives grâce à une coalition avec Silvio Berlusconi. "Avec nous au gouvernement, l'Italie relèvera la tête en Europe, nous n'avons pas de leçons à recevoir de Macron et Merkel, et nous contrôlerons nos frontières", a-t-il ajouté.
Luigi Di Maio, chef du Mouvement 5 Etoiles (M5S, anti-système) arrivé en tête du scrutin, s'est quant à lui démarqué en attendant les explications françaises et en tweetant sobrement que l'Italie avait bien fait de convoquer l'ambassadeur français pour "clarifier complètement" les faits.
Bene ha fatto la Farnesina a convocare l'ambasciatore francese. Quanto accaduto a #Bardonecchia deve essere chiarito completamente in ogni suo aspetto. — Luigi Di Maio (@luigidimaio) 31 mars 2018
Cette situation fait aussi écho pour les Italiens à une autre affaire concernant une personne immigrée et les autorités françaises. La semaine dernière, le pays s'était offusqué en apprenant la mort d'une femme nigériane qui était malade et enceinte.
Que compte faire la France pour apaiser les tensions ?
Gérald Darmanin a annoncé ce dimanche lors du Grand jury LCI-RTL-Le Figaro qu'il se rendrait "dans les prochains jours" pour s'expliquer. Il soutient que l'intervention était légale et entrait dans le cadre d'un accord franco-italien. "J'ai demandé aux douaniers qui n'ont rien fait d'illégal(...), en attendant que j'aille voir le gouvernement italien (...) de suspendre le fonctionnement de notre accord et s'il faut revoir cet accord évidemment nous le ferons", a indiqué le ministre des Comptes publics.
Le directeur général des douanes doit par ailleurs rencontrer son homologue italien dès cette semaine, a-t-il ajouté.
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