La Russie a fait voter une nouvelle loi contre les "fausses informations" ce vendredi.Certains craignent que, désormais, les mots "guerre" ou "invasion" soient interdits dans le pays.De fait, cette interdiction s'applique aux médias, mais aussi aux internautes et manifestants.
La Russie resserre l'étau. La loi contre les "fausses informations" votée ce vendredi 4 mars à l'unanimité fait peser de lourdes sanctions contre quiconque partagera des "informations mensongères" sur les événements en cours en Ukraine. Le texte vise donc clairement ceux qui cherchent à informer factuellement du conflit actuel en Ukraine. Ou plutôt de l'"opération spéciale" en cours, selon l'expression adoptée par les autorités russes. Dès lors, certains craignent qu'utiliser le mot "guerre" soit interdit en Russie pour décrire ce qu'il se passe en Ukraine. À raison.
Les médias, premiers concernés
Depuis le 24 février, les médias sous la tutelle du Kremlin suivent les consignes du Roskomnadzor, le service fédéral de supervision des communications. Or, celui-ci décrit le conflit actuel comme une "opération spéciale" visant au "maintien de la paix". C'est pourquoi, dès le 24 février - jour de l'invasion russe - l'outil de censure russe a menacé les "médias et autres ressources d'information". Face au "nombreux cas d'informations non vérifiées et non fiables diffusées", le message était clair. Le fait de qualifier l'opération militaire en cours d'"invasion", d'"attaque" ou de "déclaration de guerre" est considéré comme une "fausse" description des faits. Les utiliser entraine le blocage du site web incriminé. Une sanction qui s'appuie sur le "code des infractions administratives de la Fédération de Russie", qui prévoit une amende administrative et des sanctions pour quiconque "diffuse intentionnellement de fausses informations".
À partir du moment où la terminologie martiale est ciblée par l'organe de censure, les professionnels de l'information se sont vus, de facto, interdits d'utiliser ces mots dans leurs publications. Pour preuve, les nombreux témoignages sur les réseaux sociaux dans ce sens. Le correspondant d'Ouest France, à Moscou, ironisait le 2 mars sur cette consigne, en remplaçant le titre du roman de l'écrivain russe Tolstoï, Guerre et Paix, par "Opération spéciale et paix". Plus inquiétant, le correspondant de Radio France évoquait des habitants aveugles au conflit actuel. À son micro, les Moscovites évoquent, tout au plus, "des événements à caractère guerrier".
En résumé, à partir du moment où l'utilisation de mots comme "guerre" ou "invasion" est considérée comme une "information mensongère" lorsqu'il s'agit de décrire le conflit ukrainien, des sanctions peuvent être décidées. Une injonction qui a gagné en sévérité vendredi. La nouvelle loi votée par la Douma et ratifiée par Vladimir Poutine prévoit désormais jusqu'à quinze ans de prison contre les auteurs de "fausses informations". Et elle ne concerne pas seulement les professionnels de l'information, mais aussi tous ceux qui s'expriment sur les réseaux sociaux ou dans la rue.
Face à la menace de lourdes sanctions, le mot "guerre" disparaît donc peu à peu des écrans et des pancartes. À l'instar de cet article du journal russe Novaya Gazeta. Chaque occurrence du mot "guerre" a été remplacé par "mot interdit par les autorités russes".
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