EXIL - Face au blocage aérien, des milliers de personnes tentent un départ de l’Afghanistan par les terres. Le passage est toujours possible à la frontière pakistanaise, à un poste-clé laissé ouvert par les talibans.
Dix jours après la prise de Kaboul par les talibans, les opérations d’évacuations des pays occidentaux touchent à leur fin et des centaines de milliers de civils sont encore pris au piège dans leur propre pays. Tandis que la confusion règne toujours à l’aéroport, les insurgés ont annoncé mercredi 25 août avoir fermé les routes menant à l’aéroport, n’autorisant plus les candidats au départ à tenter leur chance.
Une "frontière très fréquentée", selon l'ONU
Or, la voie aérienne n’est pas la seule solution pour quitter l’Afghanistan. Un point de passage avec le Pakistan, pays frontalier, existe toujours au sud-est, entre les villes de Chaman et de Spin Boldak. Un poste stratégique à la frontière, tombé entre les mains des talibans le 16 juillet après d’intenses combats avec l’armée afghane et laissé ouvert aux flux de marchandises et de personnes. "Les talibans ont besoin des taxes de douanes", nous explique Bernard Dupaigne, historien spécialiste de l’Afghanistan. L'un des deux principaux postes frontaliers entre l'Afghanistan et le Pakistan, Spin Boldak est donc à ce jour "le seul endroit où les gens peuvent entrer et sortir" et "où les activités sont normales", selon Caroline Van Buren, représentante du Haut-commissariat aux réfugiés (HCR) de l’ONU en Afghanistan.
Depuis le retour au pouvoir des talibans et la promesse d’appliquer la loi islamique, ils sont nombreux à vouloir passer ce poste frontière. Selon la chaine arabe Al Jazeera qui s’est rendue sur place, des milliers de civils ont franchi le passage de Spin Boldak la semaine ayant suivi l’entrée des insurgés islamistes dans Kaboul, y compris des détenus afghans libérés de la prison de Bagram. Lundi 16 août, le responsable de la province pakistanaise du Baloutchistan rapportait 20.000 passages en une journée, soit le double du trafic quotidien habituel, dont 13.000 civils afghans entrés dans le pays. Mardi 17 août, la frontière était toujours accessible aux Afghans pouvant justifier leur identité ou une preuve de l’asile obtenu au Pakistan, soutient encore Al Jazeera à partir de témoignage.
Dans un entretien publié sur le site du HCR, Caroline Van Buren décrit la situation en date du mardi 24 août à la frontière afghano-pakistanaise, alors que le monde a les yeux rivés sur l’aéroport de Kaboul : "Ces deux derniers jours, 20.000 personnes sont sorties et 19.000 personnes sont entrées. Il ne s’agit pas nécessairement de demandeurs d’asile ; c’est une frontière très fréquentée et ce sont les chiffres que nous avons régulièrement. Nous avons des personnes qui vont au Pakistan pour des soins médicaux, des personnes qui vont à l’école, au travail, pour être avec leur famille".
Mais aujourd’hui, le passage semble plus ardu, probablement par la réticence des talibans à laisser les civils quitter le pays. D’après une vidéo circulant sur Twitter et publiée à l’origine par le journaliste indépendant Natiq Malikzada, des milliers de personnes patientent dans la cohue devant le poste-frontière de Spin Boldak, sous la surveillance des insurgés. Pour Mark Urban de la BBC, qui partage les images à son tour, "cette séquence met en évidence un point très important : le peu que nous connaissons de la situation en dehors de Kaboul en général et de la capacité des Afghans à partir par les frontières terrestres en particulier". En 40 ans, plus de 1,4 million de civils ont obtenu l’asile au Pakistan, estime l’ONU, ainsi que 2 millions de réfugiés clandestins, d’après les autorités du pays.
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