En l'espace de quelques années, Abolqasem Salavati s'est affirmé comme le principal exécutant du régime iranien.Depuis son tribunal révolutionnaire, il distribue les peines de mort à tour de bras, ne manquant pas de briser la moindre opposition.Zoom sur celui que l'on surnomme le "juge de la mort".
Il ne fait preuve d'aucune pitié. Juge de la 15e chambre du tribunal islamique révolutionnaire de Téhéran (Iran), Abolqasem Salavati s'est fait connaître, depuis une quinzaine d'années, pour sa sévérité et sa propension à prononcer les peines les plus sévères. Pas plus tard que le 11 janvier dernier, le magistrat de 60 ans a condamné à mort l'Irano-britannique Alireza Akhbari pour "corruption sur terre et pour atteinte à la sécurité intérieure et extérieure du pays", en d'autres termes pour espionnage. Le suspect a avoué sous la torture avoir fourni des renseignements aux services secrets britanniques (MI6). Une déclaration qui l'a conduit directement à la potence.
Des dizaines de condamnations à mort
Ce verdict est loin d'être une première pour le juge iranien né à Tuyserkan, une ville de l'ouest du pays. Selon les comptes tenus par l'Atlas des prisons iraniennes de l'ONG United for Iran, Abolqasem Salavati a déjà prononcé 34 condamnations à mort. C'est d'ailleurs lui qui a prononcé la sentence fatidique contre Mohsen Jekari (23 ans), récemment pendu pour avoir participé au soulèvement populaire après le décès de Mahsa Amini. "Cette condamnation à mort était totalement arbitraire. Une honte absolue mais Salavati n'a jamais honte de rien", fustige Mahmoud Amiry-Moghaddam, directeur de l'ONG Iran Human rights, dans les colonnes du Parisien.
Depuis près de 15 ans, celui que l'on surnomme le "juge de la mort" fait régner l'ordre par la terreur. L'homme est quasiment devenu l'exécutant direct du régime. Toujours dans les petits papiers du pouvoir en place, il traite les dossiers les plus sensibles. Il conserve pourtant "la réputation d'être un juge sans connaissances juridiques apparentes", note Rod Sanjabi, ancien directeur exécutif du Centre de documentation des droits de l'homme en Iran, dans des propos relayés par le site United against nuclear Iran.
Dans la milice, dans la police, puis dans la justice
Rien dans son parcours ne le prédestinait à occuper de telles fonctions. Blessé lors de la guerre entre l'Iran et l'Irak en 1987, lors de laquelle il servait comme milicien, il s'est ensuite engagé dans la police, dans la province du Kurdistan. Quelques années plus tard, il a connu une ascension fulgurante au sein de l'appareil juridique étatique. Il est ensuite devenu procureur et juge en 1991 à Sanandaj, la capitale provinciale du Kurdistan.
Ce n'est qu'à l'orée des années 2010 qu'il a commencé à se faire tristement connaître, s'illustrant lors des purges consécutives au grand soulèvement populaire de 2009. C'est à ce moment-là qu'il a été nommé au tribunal révolutionnaire, une juridiction d'exception traitant des affaires les plus graves. Rapidement, sa 15e chambre s'est démarquée par son zèle et sa cruauté. Elle est "considérée comme la plus implacable et répressive", confirme au Parisien Karim Lahidji, vice-président de la fédération internationale des droits humains (FIDH).
La torture comme instrument privilégié
Ce père de deux enfants au visage impénétrable et à la froideur invétérée se démarque par ses audiences expéditives lors desquelles accusés et avocats n’ont quasiment pas la parole. Pour arriver à ses fins, il n'hésite pas à user d'un grand éventail d tortures pour obtenir des aveux, ensuite pris comme argent comptant. Ce n'est certainement pas un hasard s'il est devenu la figure vers laquelle se tourne le pouvoir lorsqu'il souhaite faire un exemple.
Cette intransigeance lui vaut d'être détesté par une frange importante de la population de son pays. Il se déplace d'ailleurs systématiquement avec sept gardes du corps (et deux revolvers)... en Iran du moins. À l'étranger, il est persona non grata dans de nombreux pays. L'Union européenne l'a ainsi placé sur sa liste noire dès 2011. Elle a ensuite été imitée par les États-Unis en 2019. Des sanctions qui ne l'empêchent pas de poursuivre son entreprise de terreur en Iran.
Sur le
même thème
Tout
TF1 Info