La grimpeuse Elnaz Rekabi de retour en Iran, mais l'inquiétude subsiste autour de sa sécurité

Publié le 18 octobre 2022 à 15h55, mis à jour le 19 octobre 2022 à 13h12

Source : JT 20h WE

Elnaz Rekabi a participé à une épreuve d'escalade aux Championnats d'Asie à Séoul, sans porter son hijab, contrairement au règlement vestimentaire iranien.
La grimpeuse a été ensuite portée disparu 48 heures avant d'assurer que son geste n'avait pas été intentionnel.
Si elle est désormais de retour en Iran, l'inquiétude subsiste quant à son sort.

C'est sans voile, coiffée seulement d'un bandana, que la grimpeuse Iranienne Elnaz Rekabi est apparue devant le mur d'escalade de Séoul, le 16 octobre dernier. Qualifiée pour la finale du bloc féminin des championnats asiatiques d'escalade en Corée du Sud, la jeune femme de 33 ans a fait parler au-delà de sa performance sportive, dérogeant par là au règlement vestimentaire strict de l'Iran qui impose le hijab à ses sportives dans toutes les compétitions internationales.

Un mois jour pour jour après le début des manifestations déclenchées par la mort de la jeune kurde iranienne Mahsa Amini, la vidéo la montrant sans voile face au mur d'escalade est devenue virale ces derniers jours, certains voyant dans sa décision, un geste de solidarité.

Une possible arrestation de la sportive

Mais depuis, l'inquiétude grandit sur le sort réservé à la sportive. Quelques heures après qu'Elnaz Rekabi a grimpé et fini la quatrième de l'épreuve d'escalade, ses amis ont confié à la BBC persian ne plus avoir de nouvelles d'elle. Par la suite, un message a été publié en story sur son compte Instagram. Dans celui-ci, Elnaz Rekabi s'excuse quant à l'inquiétude créée autour de sa disparition et assure que la décision de retirer son voile n'était "pas intentionnelle".

"En raison d'un mauvais timing, et de l'appel imprévu pour que je grimpe sur le mur, mon voile s'est détaché par inadvertance", explique-t-elle dans ce message, ajoutant être sur le chemin du retour en Iran "aux côtés de l'équipe, selon le programme convenu".

Des explications que la jeune femme a répétées lors de son arrivée à Téhéran, à l'aéroport international Imam Khomeini, mercredi 19 octobre. Accueillie sous les applaudissements et hourras de dizaines de personnes massées devant le terminal, et alors qu'elle rejoignait ses proches, elle s'est adressée aux médias, s'excusant à nouveau.

"En raison du climat qui régnait pendant les finales de la compétition et du fait que j'ai été appelée à prendre le départ quand je ne m'y attendais pas, je me suis retrouvée emmêlée dans mon équipement technique (...). À cause de cela, je n'ai pas fait attention au foulard que j'aurais dû porter", a-t-elle raconté. "Je suis rentrée en paix en Iran, en parfaite santé et selon le programme prévu. Je présente mes excuses au peuple iranien pour les tensions créées", a-t-elle déclaré, ajoutant ne pas avoir "l'intention de dire au revoir à l'équipe nationale" d'escalade. 

La sportive a ensuite quitté l'aéroport dans une voiture pour une destination inconnue, toujours sous les applaudissements. "Elnaz est une héroïne", criaient certains.

Les déclarations de la sportive comme son retour en Iran n'ont pas cependant suffi à rassurer sur son sort. Un média indépendant iranien, "IranWire", affirmait qu'à la suite de son épreuve, Elnaz Rekabi s'était vue retirer son portable et son passeport et qu'elle aurait été détenue à l'ambassade iranienne en Corée du Sud. Une fois en Iran, le média ajoutait que la grimpeuse serait directement incarcérée dans la prison d'Evine à Téhéran

L'ambassade d'Iran à Séoul avait par la suite démenti "toutes les fausses informations et la désinformation" au sujet de sa situation et certifié qu'elle avait quitté la Corée du Sud avec ses coéquipiers mardi. "Les inquiétudes demeurent pour sa sécurité", a commenté l'ONG Center for Human Rights in Iran, basée en Iran, à la suite du retour d'Elnaz Rekabi. 

La République islamique a effectivement plusieurs fois été accusée de provoquer des aveux ou déclarations forcées. L'actrice britannique d'origine iranienne Nazanin Boniadi, ambassadeur pour Amnesty International au Royaume-Uni, estimait sur Twitter que la sportive "a été forcée de faire cette déclaration par les autorités, coutumières des confessions forcées à la télévision".

En Iran, malgré la volonté du pouvoir de faire taire la contestation née de la mort de Mahsa Amini, décédée trois jours après avoir été arrêté par la police des mœurs, les manifestations se poursuivent. Depuis le début du mouvement, les Iraniennes ont été le fer de lance des manifestations, criant des slogans antigouvernementaux, enlevant et brûlant leur foulard, et tenant tête aux forces de sécurité dans les rues.


Aurélie LOEK

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