"Mort à la République islamique" : en Iran, la colère grandit après le décès de Mahsa Amini

Publié le 19 septembre 2022 à 22h32, mis à jour le 20 septembre 2022 à 12h36

Source : TF1 Info

De nouvelles manifestations ont eu lieu en Iran après la mort d'une jeune femme.
Mahsa Amini a été arrêtée le 13 septembre pour "port de vêtement inapproprié" par la police des mœurs.
La jeune femme est décédée après sa détention.

La colère gronde en Iran. Des milliers de manifestants se sont à nouveau réunis, ce lundi, à Téhéran, la capitale, et Mashhad, première ville sainte du pays située dans le nord-est, pour protester après la mort d'une jeune femme détenue par la police des mœurs. Dimanche déjà, une marche avait eu lieu à Sanandaj, capitale de la province du Kurdistan dans le nord-ouest du pays, d'où la jeune femme était originaire. 

Le 13 septembre dernier, alors qu'elle était en visite avec sa famille à Téhéran, Mahsa Amini a été arrêtée pour "port de vêtement inapproprié" par l'unité chargée de faire respecter le code vestimentaire strict de la République islamique d'Iran pour les femmes, et notamment l'obligation de se couvrir les cheveux, l'interdiction de porter des jeans troués ou encore des tenues aux couleurs vives. Au cours de sa détention, la jeune femme est tombée dans le coma. Elle est décédée le 16 septembre à l'hôpital, selon la télévision d'État et sa famille.

"Mort au dictateur"

Un décès que beaucoup ont jugée suspect. Le drame a suscité une vague de colère à travers l'Iran et, depuis, les manifestations prennent de l'ampleur. Lors de funérailles de la jeune femme, à Saqqez (Kurdistan), des slogans tels que "Mort au dictateur" ont notamment été entendus ce 19 septembre. Des manifestants ont jeté des projectiles sur le portrait du guide suprême iranien Ali Khamenei. Les partis politiques kurdes ont aussi appelé à la grève générale ce lundi dans cette région aux velléités indépendantistes, particulièrement contrôlée par le régime. 

"De nombreux manifestants sont convaincus que Mahsa est morte sous la torture", a détaillé l'agence de presse iranienne Fars. Lundi soir, dans la rue Hejab ("voile musulman" en persan) au centre de Téhéran, "plusieurs centaines de personnes ont scandé des slogans contre les autorités, certaines d'entre elles ont enlevé leur hijab", a annoncé Fars. Une courte vidéo diffusée par l'agence montre une foule de plusieurs dizaines de personnes, notamment des femmes ayant retiré leur voile criant "mort à la République islamique". Des manifestations qui ont été violemment réprimée.

Pour montrer leur soutien, plusieurs femmes iraniennes ont également décidé de couper leurs cheveux. Dans la capitale, des étudiants ont lancé des mouvements de protestation dans plusieurs universités, dont celles de Téhéran et Shahid Beheshti, d'après Tasnim. Ils ont exigé auprès des autorités "des éclaircissements" sur la mort de l'Iranienne.

Des "accusations injustes" ?

Lundi, le chef de la police de Téhéran, le général Hossein Rahimi, a de nouveau rejeté les "accusations injustes contre la police" affirmant qu'il n'y avait "pas eu de contact physique" entre les agents et la victime. "Il n'y eu aucune négligence de notre part. Nous avons mené des enquêtes (...) Et toutes les preuves montrent qu'il n'y a pas eu de négligence ou de comportement inapproprié de la part des policiers", a-t-il déclaré. "Il s'agit d'un incident regrettable et nous souhaitons ne jamais plus être témoins de tels incidents."

Le général Rahimi a de nouveau souligné que la jeune femme avait violé le code vestimentaire, et que les policiers avaient demandé aux proches de Mahsa de lui apporter des "vêtements décents". Le jour de son décès, la télévision d'État a diffusé une courte vidéo de surveillance montrant une femme présentée comme Mahsa Amini s'effondrer dans les locaux de la police après une discussion avec une policière. Lundi, Amjad Amini, le père de la victime, a déclaré à Fars que la "vidéo a été coupée" et affirmé que sa fille avait "été transférée tardivement à l'hôpital".

Ces derniers mois, la police des mœurs a été critiquée pour des interventions violentes alors que l'application de la charia, ou loi islamique, imposée en Iran après la révolution de 1979  qui oblige les femmes à se voiler et porter des tenues longues et amples est régulièrement contestée dans le pays. 

"Les cheveux de nos filles sont recouverts d'un linceul"

De nombreux cinéastes, artistes, personnalités sportives, politiques et religieuses ont également exprimé leur colère sur les réseaux sociaux après la mort de Mahsa Amini. "Les cheveux de nos filles sont recouverts d’un linceul", ont ainsi écrit plusieurs joueurs de l’équipe nationale de football dans une story commune sur Instagram.

L'ex-président et chef de file du courant réformateur Mohammad Khatami a appelé les autorités à "traduire devant la justice les auteurs" de cet acte. Le président iranien Ebrahim Raïssi a quant à lui demandé l’ouverture d’une enquête. À l'étranger, le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell a condamné lundi le décès "inacceptable" de cette jeune femme et appelé les autorités à punir les responsables.


Annick BERGER

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