DECRYPTAGE - Révélé par le "New York Times" le 26 juin dernier, le possible financement par Moscou d'insurgés afghans ne cesse de déchaîner les passions aux Etats-Unis. Quels faits ? Dans quel contexte ? Quelles conséquences pour le pays et à l'international ? LCI fait le point.
Nouveau tremblement de terre aux Etats-Unis ? Déjà fortement affectés par des problématiques sociétales et sanitaires actuellement, le pays s'est découvert une nouvelle affaire, qui tient davantage de questions diplomatiques. Depuis quelques jours, révélations, réactions et appréhensions s’enchaînent dans l'affaire des primes russes. On vous explique tout.
De quoi s'agit t'il ?
Selon une enquête du New York Times publiée vendredi 26 juin, des insurgés afghans auraient touché une prime de la part d'agents aux ordres de Moscou. Des fonds auraient ainsi été versés à des combattants "proches des talibans" pour qu'ils tuent des soldats de l'Otan et notamment des Américains. L'information communiquée par des sources anonymes du renseignement américain a ensuite été relayée par le reste de la presse aux Etats-Unis. Elle a rapidement été niée par les différentes parties concernées. L’ambassade russe aux Etats-Unis s'est fendu d'un tweet accusateur : "ces accusations infondées et anonymes affirmant que Moscou est derrière la mort de soldats américains en Afghanistan ont déjà abouti à des menaces directes sur la vie des employés des ambassades russes à Washington et Londres". Les Talibans ont, de leur côté, publié un communiqué dans lequel ils martèlent que "la guerre sainte menée depuis 19 ans par l'Emirat islamique (nom de l'Etat afghan sous le régime taliban, de 1996 à 2001, ndlr) ne doit rien aux bienfaits d'un quelconque service de renseignement ou pays étranger".
Donald Trump a, pour sa part, affirmé ne pas avoir été "briefé" par ses services secrets sur de tels agissements (ce que ces derniers ont démenti). Une affirmation qu'il a aussi relativisée en estimant que "tout le monde le nie" et qu'"il n'y a pas eu beaucoup d'attaques contre nous". En revanche, la réponse est radicalement différente du côté du Royaume-Uni. Le ministre britannique de la Défense Ben Wallace a confirmé mardi 30 juin être "au courant de ces renseignements". "Je ne peux pas faire de commentaires sur des sujets touchant au renseignement si ce n'est pour dire que nous prenons de nombreuses mesures pour nous assurer que nos soldats [...] soient en sécurité", a t'il précisé.
Quel contexte ?
Cette affaire intervient dans un contexte de tensions entre les Etats-Unis et la Russie, superpuissances mondiales en perpétuelle rivalité. Durant son mandat, Donald Trump toujours suspecté d'avoir vu son accession à la Maison Blanche favorisé par une action de la Russie, a tenté un rapprochement entre les deux pays. Dernièrement, le chef d'Etat américain a même offert à son homologue russe la possibilité d’assister au prochain sommet du G7, anciennement G8 duquel la Russie avait été bannie après l'annexion de la Crimée en 2014.
La représentation politique outrée
Les réactions n'ont pas tardé au pays de l'Oncle Sam. "Tous les chemins mènent à Poutine" a fustigé la présidente démocrate de la chambre des représentants, Nancy Pelosy, en référence aux soupçons de collusion entre le Kremlin et l'équipe de campagne de Trump lors des présidentielles, de 2016. La représentante a également dénoncé que l'"administration [de Donald Trump] savait". Une accusation qui fait écho à celle du New York Times qui affirme que le président américain a reçu en février un document qui évoquait ces primes controversées. Chez les républicains, le camp de Trump, des voix s'élèvent également. Le sénateur Thom Tillis a notamment déclaré que "si les informations du renseignement sur le fait que la Russie ou tout autre pays mettent des primes sur (la vie, ndlr) des militaires américains sont vérifiées, alors ils doivent être traités comme des Etats soutenant le terrorisme".
Quelles conséquences ?
Les allégations de paiement de rebelles afghans en vue de tuer des Américains pourraient renforcer drastiquement les dissensions entre Etats-Unis et Russie. Un rapprochement ne serait en tout cas plus à l'ordre du jour, avec au contraire un risque d'escalade. Matthew Rojansky, du Woodrow Wilson International Center for Schola, nuance toutefois en rappelant que, même aux heures les plus sombres de la Guerre froide, le dialogue n'a jamais été totalement rompu. Avec l'arrivée potentielle de nouveaux éléments, d'autres pays pourraient aussi être impliqués (les soldats américains n'étaient pas les seuls visés, les primes récompensant la mort de soldats de l'Otan). Plus localement, ces révélations fragilisent encore davantage un Donald Trump sous pression depuis plusieurs semaines. Il semble probable que le Congrès ouvre une enquête pour faire la lumière sur toute cette affaire.
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