Les coulisses de notre rencontre avec Bachar Al-Assad

Michel Scott
Publié le 16 février 2017 à 8h30, mis à jour le 16 février 2017 à 8h48
Les coulisses de notre rencontre avec Bachar Al-Assad

COULISSES - L’offensive de charme de Bachar Al-Assad depuis la fin du carnage à Alep se fonde sur une certitude : entre le terrorisme et lui, la communauté internationale a déjà fait son choix. Celui de son maintien au pouvoir. En nous recevant cette semaine, le président syrien n'en a pas mâché ses mots pour autant contre ceux qui continuent de le trouver infréquentable. Michel Scott revient sur les conditions de cet entretien exclusif.

Il fait frais à Damas ces jours-ci. Le Mont Mezzeh qui surplombe la ville disparait parfois dans les brumes, laissant à ses pieds une capitale aux rues détrempées où la grisaille du moment accentue l’impression d’usure provoquée par 6 ans de pénuries de guerre.

Sur la pente se trouve le Palais présidentiel. Mais ce n’est pas là qu’aura lieu l’entrevue avec Bachar Al-Assad. Une annexe chic, sise dans un petit parc protégé par des grilles, à cinq minutes de voiture en contrebas, sera notre lieu de rendez-vous. Discrète, la sécurité n’en est pas moins omniprésente. Tous nos déplacements, d’un point à un autre de ce parcours très encadré qui va nous mener jusqu’au chef du régime syrien, sont programmés, minutés, précisément pensés à l’avance afin qu’aucune fausse note ne vienne perturber ce ballet protocolaire.

Le danger est évidemment là, me dis-je"
Michel Scott

A l’arrivée devant le petit pavillon où nous attend "Bachar", tout se déroule comme prévu donc. Le premier étage nous est indiqué. Au sommet des marches, c’est dans un costume d’un bleu intense, que le chef de ce qu’il reste de l’Etat syrien nous accueille. Son sourire parait excessivement chaleureux. La poignée de main est franche. Un quart d’heure d’entretien détendu, hors caméra, nous est réservé, pour "briser la glace" avant l’enregistrement de l’interview proprement dite. Le danger est évidemment là, me dis-je, dans cette tentation de me laisser convaincre par la civilité de cet homme éduqué, affable et sympathique dans ces apartés organisés. 

Nous allons lui parler de la prison de Saydnaya, transformée en centre de pendaison à la chaine d’après Amnesty, des 300 000 morts de ce conflit dont il est, à minima, coresponsable, et de sa conception si particulière du terrorisme, lui qui ne fait pas de Daech une cible prioritaire. Mais, sûr de son fait, il va dérouler l’argument massue dont il sait qu’il est imparable : "Ce sera moi ou le chaos. Et vous êtes si las de ce chaos au Moyen-Orient justement, que vous autres donneurs de leçons occidentaux, malgré votre répulsion, vous finirez bien par vous rendre à l’évidence : c’est moi qu’il faudra choisir."

Interviewer Bachar Al-Assad, en cette période où il aborde en position favorable les négociations avec ce qu’il reste de la rébellion, est un risque que nous assumons. La tentation de choisir Bachar pourra s’en trouver renforcée. Au moment où se dessine un avenir syrien sous l’égide de la Russie et de l’Iran, beaucoup n’ont pour autant pas encore franchi le pas.


Michel Scott

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