Selon Alexis Corbière (LFI), il y a eu depuis 20 ans "au moins 171 désobéissances au niveau européen sur la question des 3% de déficit".Nous avons vérifié cette affirmation.
C’est l’antienne de la France insoumise : la mise en œuvre de certaines dispositions de son programme entrera en contradiction avec le droit européen et obligera à une confrontation avec les institutions européennes et à des "mesures de désobéissance". Pour Alexis Corbière, député LFI, ce ne serait pas une première. "Depuis 20 ans, il y a eu au moins 171 désobéissances au niveau européen sur la question des 3% de déficits", a-t-il déclaré dans l’émission les 4 Vérités sur France TV, le 10 mai.
Ce qui est exact : les États européens s’affranchissent régulièrement des "règles" en matière budgétaire. De quoi parle-t-on ? Les États européens ont conclu un Pacte de stabilité et de croissance (PSC) entré en vigueur à la fin des années 1990. Sa mise en œuvre reposait essentiellement sur une règle, qui demande aux pays d’atteindre des positions budgétaires "saines" à moyen terme. Ainsi, si le déficit budgétaire dépasse 3 % du PIB à l’année, l’UE peut demander des corrections.
Sur une période de 20 ans, le Comité budgétaire européen - qui veille sur l’équilibre des finances publiques dans chacun des 27 États de l’Union - a fait une évaluation du respect de toutes les règles budgétaires européennes. Les résultats sont édifiants. "En moyenne, tous pays, toutes années et toutes règles confondues, les politiques budgétaires ont été conformes dans un peu plus de la moitié des cas, c'est-à-dire que le respect des règles est aussi courant que le non-respect de celles-ci."
Des situations très fréquentes
Il existe des différences majeures entre les pays qui sont en conformité avec les règles, comme la Finlande qui les respecte à 95%, et d’autres, comme la France qui ne les respecte qu’à 25%.
Bref, les cas de non-respect des règles sont très fréquents. Ce qui ne surprend pas Andreas Eisl, chercheur en politique économique européenne à l’Institut Jacques Delors. La question, à ses yeux, est plutôt de savoir pourquoi ces pays ne respectent pas les règles.
Ce n’est souvent pas "volontaire", nous explique-t-il. Le respect du déficit, année par année, est un indicateur "biaisé" et de nombreux États peuvent se retrouver avec un déficit involontaire compte tenu des règles techniques comptables. "En 2004, par exemple, l’Autriche affiche un déficit de 1,2% du PIB. Sauf qu’en 2008, Eurostat a décidé que l’endettement de l’Oebb (l’équivalent autrichien de la SNCF) comptait finalement dans le calcul final. Résultat, à la place de 1.2%, Eurostat a annoncé un déficit de 3.7% pour l’année 2004."
"Désobéissance", une formulation "trompeuse"
Mais même dans les cas où les États ont "volontairement" creusé leur déficit au-delà des 3%, peut-on parler de désobéissance, comme l’affirme Alexis Corbière ? "La formulation est trompeuse parce que ne pas respecter la règle des 3%, ce n’est pas forcément violer les règles européennes", nous explique Vincent Couronne, membre des Surligneurs. "Avoir un déficit excessif n’est pas illégal, c’est une procédure normale et c’est prévu par les traités."
Les traités européens n’imposent pas en effet de respecter la règle des 3% de déficit de manière absolue. Il est possible, selon l’article 126 du traité de l’Union européenne, de dépasser les 3% de façon temporaire ou exceptionnelle. Tant que l’État s’engage dans un programme qui permettra à moyen terme de revenir dans les limites des 3%. Ce qui veut dire qu’en cas de crise économique ou de nécessité de financer un service public de manière temporaire, c’est possible. Exemple : la France est sortie des règles en 2009 au moment de la crise des subprimes puis est revenue en 2015 dans les "clous budgétaires".
Enfin, les sanctions ou amendes, qui pourraient prouver ou laisser entendre que certains États ont désobéi, sont rarissimes. Un exemple pourtant : les Portugais, en 2016, choisissent le dirigeant de gauche Antonio Costa qui s’est engagé à relancer l’économie portugaise quitte à creuser le déficit. Il s’éloigne alors volontairement de la stratégie de retour aux 3% en "désobéissant", explique Vincent Couronne. La Commission européenne alerte à l’époque les autres États membres de la situation et propose, en guise de sanction, une amende de… Zéro euro.
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