Naufrage du Moskva : un avion américain a-t-il aidé les Ukrainiens à couler le navire amiral russe ?

Publié le 20 avril 2022 à 11h33

Source : TF1 Info

Un avion américain survolait-il la zone juste avant le naufrage du "Moskva" ?
Le navire amiral russe en mer Noire a coulé après des explosions le 13 avril dernier.
Il a vraisemblablement été touché par au moins un missile Neptune.
Le patrouilleur maritime Poseidon a-t-il guidé le tir des missiles ukrainiens ?

Le journal britannique The Times révèle la trajectoire d'un avion-espion américain en mer Noire, le jour même du naufrage du "Moskva". Le navire amiral de la flotte russe avait sombré après ce que Moscou présente comme un incendie accidentel, mais qui serait en fait la conséquence de frappes de missiles ukrainiens Neptune. La perte de ce fleuron de la marine russe, qui jouait un rôle clé pour la coordination de la flotte en mer Noire, est vécue comme un traumatisme en Russie, et pourrait réduire les possibilités d'invasion par voie maritime.

Le P8 Poseidon est l'appareil de patrouille maritime le plus sophistiqué de l'armée américaine, qui en possède plus de cent exemplaires. Il est dérivé de l'avion de ligne Boeing 737, et entré en service en 2013. Le jour du naufrage du Moskva, c'est la trajectoire d'un de ces avions qui intrigue. 

Le 13 avril, à 13h32 (heure de Kiev) un P8 répondant au nom de code AE681B, aurait décollé de la base aérienne sicilienne de Sigonella. Les données du traceur de vols FlightRadar24 localisent l'appareil au-dessus des Balkans, jusqu'à son arrivée sur les côtes roumaines de la mer Noire en début d'après-midi. L'avion américain est à une vingtaine de kilomètres de la frontière ukrainienne lorsque l'on perd son signal, à 15h27. À cet instant, le Poséidon était descendu d'une altitude de vol de 8.800 mètres, à seulement 3.600 mètres. 

Pendant trois heures, le Poseidon disparaît des radars

Pendant les presque trois heures qui suivent, on perd sa trace. Le P8 ne réapparaîtra sur les radars qu'à 18h23, alors qu'il survole la vile roumaine de Casimcea, à une soixantaine de kilomètres de sa dernière position connue, et à une centaine de kilomètres de la frontière ukrainienne. Selon des experts de la Défense consultés par The Times, la procédure standard d'un avion P8 est d'éteindre son transpondeur lorsqu'il atteint une zone de guerre. On perd une nouvelle fois le signal du Poseidon pendant 42 minutes : il réapparaît à 19h24 au sud de la Roumanie, et ne disparaîtra plus des radars jusqu'à son retour à la base de Sigonella. À 20h42 ce soir-là, émergeront les premières informations rapportant que le Moskva a été endommagé.

Le Moskva survolé par un avion américain ? Le point de vue de Volodymyr Poselsky, président de l'ONG "Ukraine en Europe"Source : TF1 Info

Le Poseidon a-t-il pu aider les Ukrainiens à localiser le croiseur russe pour ajuster leurs tirs de missiles ? Bien que les capacités techniques précises de l'appareil soient classées secret-défense, on sait qu'il est capable de détecter le signal d'une cible à plus de 300 kilomètres. Or, ses dernières positions connues le placent dans un périmètre de moins de 160 kilomètres du  croiseur russe, qui patrouillait à ce moment-là au large d'Odessa. 

Une distance qui a d'ailleurs pu diminuer pendant les presque trois heures où le Poseidon a disparu des radars. Il est cependant impossible, en l'état des informations, de démontrer sa participation à l'opération ukrainienne contre le Moskva. Selon l'experte Amelia Smith, la présence de ce P8 en mer Noire est inhabituelle, "mais pas totalement extraordinaire", même si elle note un léger accroissement du trafic d'avions américains au-dessus de la mer Noire ce jour-là.

Le Pentagone a admis récemment que les États-Unis partageaient avec l'armée ukrainienne leurs informations classifiées sur le Donbass, dans l'est du pays où le front s'est concentré à la suite du redéploiement russe. Par ailleurs, si les Américains ont longtemps hésité à fournir de l'armement lourd aux Ukrainiens, de peur d'aggraver le conflit, cette doctrine semble avoir été largement infléchie depuis la découverte des exactions russes dans les zones libérées. 


Frédéric SENNEVILLE

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