"Nous savons qui vous êtes" : 456 actrices suédoises fustigent les violences sexuelles et l'impunité des agresseurs

Le grand déballage continue. Dans le sillages de l'affaire Weinstein et du hashtag  #metoo, 456 comédiennes suédoises ont chosi de dénoncer, par le biais d'un texte fleuve publié ce jeudi dans le quotidien local Svenska Dagbladet, le harcèlement sexuel et les viols dont elles ont été victimes pour certaines dans des théâtres et les plateaux de cinéma. 

Les histoires relatées sont pour le moins désolantes et mettent en cause (anonymement) des acteurs et metteurs en scène réputés dans le pays comme à l'étranger.

"Je devais jouer une scène d'amour avec ce 'grand acteur'. Je devais être sur lui pendant l'acte sexuel. Au cours d'une répétition, il m'a demandé s'il pouvait téter mon sein gorgé de lait (il savait que j'allaitais) tandis qu'il se pressait contre moi, en érection", relate une comédienne. 

"Je les admirais tant", raconte une autre. "Lui (un acteur) qui devait jouer mon père et qui m'a prise par le cou en essayant d'enfoncer sa langue dans ma bouche" et "cet auteur dramatique qui avait écrit un beau rôle pour moi dans sa pièce, et dont les mains enserraient soudain ma poitrine dans l'obscurité, derrière la scène", dépeint-elle.

Ces artistes par centaines tirent à boulets rouges sur  le "culte du génie" qui règne dans les arts de la scène suédois depuis l'époque d'Ingmar Bergman, cinéaste aussi exigeant que révéré. Un "culte" qui, selon ces comédiennes, laisse impunis les agresseurs "tant que ce qu'ils créent est auréolé d'une haute valeur artistique", écrivent-elles, un débat qui n'est pas sans rappeler le débat autour de la venue de Roman Polanski, cinéaste emprisonné pour le viol d'une adolescente de 13 ans avant de quitter les Etats-Unis.

"Acteurs et réalisateurs considérés comme des génies sont soutenus par la profession, peu importe ce qu'ils font subir à leurs collègues", écrivent les quelque 500 comédiennes signataires, parmi lesquelles Lena Endre (Millénium), Sofia Helin (The Bridge) et Ruth Vega Fernandez (Wallander, Kyss mig). "A cause de ce statut de stars, leurs agressions n'ont jamais de conséquences", déplorent-elles toujours  dans le quotidien Svenska Dagbladet.

Alice Bah Kuhnke, la ministre de la Culture suédoise, a jugé "ces agressions gravissimes". Elle a ainsi convoqué ce jeudi les responsables des grandes scènes nationales, le Théâtre dramatique de Stockholm, longtemps dirigé par Ingmar Bergman, le Théâtre national et l'Opéra royal.