Guerre en Ukraine : la contre-offensive ukrainienne se fait attendre

Oligarque russe mort soudainement à Antibes : l'étrange série noire continue

Publié le 19 décembre 2022 à 15h36
JT Perso

Source : TF1 Info

Un magnat de l'immobilier russe est mort à la suite d'une "chute dans les escaliers" à Antibes.
C'est le dernier d'une longue liste de décès soudains d'oligarques russes, en moins d'un an.
TF1info fait le point sur cette mystérieuse série noire.

Dmitry Zelenov avait 50 ans. Lors d'une soirée avec des amis à Antibes (Alpes-Maritimes) le 9 décembre dernier, ce magnat de l'immobilier aurait éprouvé un malaise, puis serait tombé dans les escaliers, selon des sources russes. Le parquet de Grasse confirme que l'homme est mort le lendemain dans un hôpital niçois, des suites d'un traumatisme crânien. Une enquête a été ouverte sur les causes de cette mort soudaine, qui frappe une nouvelle fois un oligarque ou un ex-oligarque russe, le douzième depuis le début de l'année.

C'est le magazine Newsweek qui avait remarqué le premier, dès avril dernier, que les morts suspectes se succédaient dans les rangs de proches ou d'anciens proches du Kremlin, depuis le début de l'année 2022, avant même le début de l'invasion de l'Ukraine, en février. Les journalistes américains chiffraient alors à cinq les victimes de cette série noire, qui s'est poursuivie depuis. 

Plusieurs morts en lien avec Gazprom

La première était celle d'un des principaux dirigeants du géant de l'énergie russe, Gazprom. Leonid Shulman, 60 ans, avait été retrouvé mort dans la salle de bain de sa datcha de la région de Saint-Pétersbourg, laissant une lettre qui a permis aux enquêteurs russes de conclure à un suicide. Gazprom est une entreprise privée depuis les années 1990, mais l'État en demeure l'actionnaire majoritaire, et les liens de la société avec le Kremlin restent très étroits.

Le second est également un dirigeant de Gazprom, mort le 25 février 2022, au lendemain même du déclenchement de l'invasion de l'Ukraine par l'armée russe. Alexander Tyulakov, 61 ans, directeur financier de la firme, avait été retrouvé pendu dans son garage, avec là encore une lettre à ses côtés justifiant son "suicide".

Trois jours plus tard, Mikhail Watford, né Tolstosheïa, était retrouvé dans des circonstances analogues dans le garage de sa résidence en Angleterre. Âgé de 66 ans, ce magnat du pétrole et du gaz vivait là avec sa femme et ses trois enfants, et la police britannique n'a pas trouvé d'autre piste que celle du suicide.

Un ex-vice-président de Gazprombank retrouvé mort avec femme et enfant

Un mois plus tard, c'est toute une famille qui est tuée. Vassili Melnikov a été retrouvé mort aux côtés des siens, poignardés, dans leur résidence de luxe de Nijni Novgorod. Les enquêteurs russes ont conclu que ce riche responsable de la firme médicale MedStorm avait tué sa femme et ses deux fils, avant de se donner la mort. Des sources ukrainiennes avaient alors avancé la théorie que la compagnie de Melnikov subissait de lourdes pertes à la suite des sanctions occidentales.

Scène de crime analogue le 18 avril suivant, lorsque les policiers ont découvert les corps de l'ancien vice-président de Gazprombank, de sa femme et de sa fille, dans leur appartement de luxe à Moscou. Même conclusion des enquêteurs russes, qui disent avoir trouvé un domicile fermé de l'intérieur : Vladislav Avaev aurait abattu son épouse et sa fille à l'aide d'un pistolet, avec lequel il se serait ensuite suicidé. 

Autre oligarque lié au secteur de l'énergie, Sergueï Protosenia avait été le principal dirigeant du géant gazier Novatek. Son corps, ainsi que ceux de sa femme et de sa fille, ont été découverts le lendemain de ceux de la famille Avaev, dans une villa qu'ils avaient louée pour les vacances de Pâques en Espagne - alors qu'ils vivaient habituellement en France. Protosenia était pendu dans le jardin, tandis que ses proches avaient été poignardés dans leurs lits. La police espagnole enquête actuellement sur les deux pistes, un double meurtre avec suicide ou un triple meurtre déguisé.

Le 4 juillet, Youri Voronov, un chef d'entreprise partenaire de Gazprom, était retrouvé mort dans la piscine de son manoir de St-Petersbourg, tué d'une balle dans la tête. Le pistolet avait été retrouvé au fond de l'eau, et les enquêteurs russes n'ont pas tranché entre les pistes du suicide et de l'assassinat, évoquant des "différends avec des partenaires commerciaux"

Des dirigeants de Lukoil, géant du pétrole russe

L'hécatombe d'oligarques russes reprend le 1er septembre, avec la mort de Ravil Maganov, tombé de la fenêtre de sa chambre d'hôpital à Moscou, où il avait été admis pour une maladie jamais précisée. La piste du suicide est, là aussi, la seule envisagée par les enquêteurs. Ce co-fondateur du géant pétrolier russe Lukoil au début des années 1990, dont il aurait même imaginé le nom, avait publiquement pris position contre l'invasion de l'Ukraine dès le mois de mars, ainsi que l'avaient fait plusieurs cadres de l'entreprise. Ainsi, en mai, Alexander Subbotin, ancien haut responsable de Lukoil et lui aussi hostile à l'offensive russe, avait été retrouvé mort à la suite d'une étrange séance de chamanisme, où il aurait ingéré du venin de crapaud.

Le 12 septembre, c'est au tour d'Ivan Pechorin, un homme d'affaires de 39 ans, de se noyer lors d'une sortie en mer du Japon, près de Vladivostok. Il aurait chuté du bateau, alors qu'il était en état d'ivresse. En charge de l'exploitation des ressources naturelles en Arctique, il était réputé proche de Vladimir Poutine. 

Anatoli Gerashchenko est le plus âgé de cette sinistre liste. Ancien recteur de l'Institut de l'Aviation de Moscou, où il a travaillé plus de 45 ans, ce scientifique respecté a été retrouvé mort à 72 ans, après une chute "depuis une grande hauteur". Ni le lieu, ni les circonstances précises de sa mort n'ont été divulguées par les autorités.

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Vient enfin la mort à Antibes de Dmitry Zelenov, après une "chute dans les escaliers", donc. Douze morts soudaines, violentes, qui ont frappé des proches ou d'anciens proches du régime, et parfois leurs familles. La liste ne considère que des figures de premier plan, dont les connivences passées ou présentes avec le Kremlin sont établies. On remarque que la plupart appartiennent à une même génération d'oligarques, et sont très majoritairement liés à l'industrie de l'énergie. Aucun de ces décès n'est officiellement considéré comme un assassinat dû à un tiers. Si la main de Moscou semble planer sur chacun, comme le pense un consensus d'experts de la Russie, le lien est impossible à établir, et encore moins les motifs pour lesquels le Kremlin, le FSB, ou toute autre entité en lien avec le conflit ukrainien, aurait voulu se débarrasser d'eux.


Frédéric SENNEVILLE

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